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Par Carenews INFO - Publié le 26 novembre 2024 - 17:19 - Mise à jour le 29 novembre 2024 - 08:52 - Ecrit par : Elisabeth Crépin-Leblond
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Les difficultés d’accès aux prestations sociales accentuent la pauvreté en France, alerte le Secours catholique

Dans son rapport annuel sur l’état de la pauvreté en France, le Secours catholique rapporte un éloignement des dispositifs de service public ainsi qu’un durcissement des conditions d’accès aux prestations sociales. Cette situation augmente les taux de non-recours et les situations de pauvreté, alerte l’association.

Le rapport du Secours Catholique analyse chaque année la situation des personnes rencontrées. Crédits : Carenews
Le rapport du Secours Catholique analyse chaque année la situation des personnes rencontrées. Crédits : Carenews

 

Le Secours catholique fait état d’un recul du recours aux prestations sociales par les ménages y étant éligibles, accentuant les situations de pauvreté et d’extrême pauvreté, dans son rapport annuel sur l’état de la pauvreté en France, publié jeudi 14 novembre.  

Intitulé « Prestations sociales : quand la solidarité s’éloigne », le document croise les statistiques relevées par l’association avec le regard des bénévoles et les situations vécues par les personnes accueillies, plus d’un million en 2023. 

 

pauvreté secours catholique
Crédits : Carenews

 

  

Une hausse des personnes accueillies sans ressource 

  

94 % des ménages rencontrés par le Secours catholique perçoivent des prestations sociales. En moyenne, elles représentent 82 % de leurs ressources perçues en 2023, note le rapport. 

Ces dernières évoluent néanmoins d’une manière différente en fonction de leur nature. D’un côté, la part de bénéficiaires qui perçoivent des prestations sociales liées à l’âge, à la santé et au handicap a connu une hausse ces dix dernières années.  

« Cette augmentation tient au vieillissement de la population que nous accueillons mais aussi à la part croissante des ménages en âge de travailler mais dont l’état de santé ne le permet pas », analyse le Secours catholique.  

D’un autre côté en revanche, la part des allocations familiales, du revenu de solidarité active (RSA), de l’allocation personnalisé au logement (APL) ainsi que des indemnités chômage a enregistré une baisse en dix ans, note le rapport. En deux ans, la part de ménages percevant des indemnités chômage a diminué de deux points. 

Selon l’association, cette évolution est due à « un recul de l’accès à certains droits » et aux « durcissement des critères d’éligibilité décidé ces dernières années par le gouvernement, concernant les APL, le RSA et les allocations chômage ».  

« Si la solidarité nationale semble s’éloigner des personnes rencontrées par le Secours catholique, c’est d’abord parce qu’une part croissante n’y ont pas ou plus droit », affirme l’association. « L’absence de toute prestation pour les ménages étrangers sans titre de séjour se traduit par la proportion toujours plus grande de ménages rencontrés qui vivent sans ressources financières », dénonce-t-elle. 

En 2023, les personnes sans ressources financières constituaient 25,4 % des ménages accueillis, contre 15, 5 % en 2013. Un score inédit, témoigne le Secours catholique.  

 

Une distance qui se creuse entre les usagers et le service public 

  

Le Secours catholique constate de plus un éloignement géographique des services publics. « L’éloignement des guichets fait de la possibilité et du coût de la mobilité un enjeu plus crucial encore, en particulier en zone rurale », rapporte-t-il. 

Selon l’association, l’administration française « n’est plus à disposition pour orienter, conseiller et accompagner mais se limite essentiellement à traiter des dossiers, verser des prestations et contrôler les usagers ».

Le Secours catholique rapporte ainsi une dématérialisation qui pèse sur certains usagers et une déshumanisation des démarches administratives « qui s’apparente trop souvent à un parcours du combattant » et qui provoque l’exclusion des personnes éloignées du numérique. 

 


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L’association dénonce également « des discours accusateurs » envers les personnes percevant des allocations et des dispositifs de contrôle « de plus en plus sophistiqués », provoquant « l’augmentation de l’automatisation des ruptures de prestations sociales », «de la maltraitance institutionnelle » ainsi « qu’un sentiment d’exclusion fort ». 

Ces difficultés se traduisent dans les chiffres. Le non-recours au RSA parmi les ménages français éligibles est ainsi passé de 26 % en 2010 à 36 % en 2023. La part des ménages français bénéficiaires du RSA parmi les personnes percevant des allocations a également baissé de 10 points en dix ans, pour atteindre 33,1 % en 2023.  

La réforme du RSA a renforcé ce mouvement, analyse l’association, puisqu’en un an, le non-recours au RSA a augmenté de 10,8 % dans les 18 départements expérimentant le dispositif qui exige des allocataires qu’ils effectuent 15 à 20 heures d’activité par semaine, alors qu’il a baissé de 0,8 % dans les autres départements. 

Du côté de l’allocation de solidarité aux personnes âgées, 36,6 % ménages français éligibles rencontrés n’y avaient pas recours en 2023, rapporte l’association. 

Enfin, 24 % des ménages français éligibles aux allocations familiales, parmi les ménages rencontrés par le Secours catholique, ne les percevaient pas, contre 15 % en 2010. « Le chiffre atteint même 42 % chez les ménages étrangers éligibles en 2023 », ajoute le rapport. 

  

L’absence de « socle minimal » pour sortir de la pauvreté 

  

Pour le Secours catholique, ce recul des prestations sociales a pour première conséquence le maintien des populations concernées dans un état de pauvreté, voire d’extrême pauvreté.  

« La solidarité ne permet pas aujourd’hui de sortir de la pauvreté (définie par un niveau de vie inférieur à 60 % du revenu médian, soit 1 275 euros mensuels pour une personne seule). La plupart des prestations sociales ne permettent pas non plus de sortir de l’extrême pauvreté (40 % du revenu médian, soit 850 euros mensuels), alors même que la protection sociale vise à garantir un minimum vital », dénonce le rapport.  

100 % des personnes n’ayant pas recours au RSA rencontrées par l’association vivent sous le seuil d’extrême pauvreté, contre 81 % des allocataires du RSA rencontrés et 36,4 % des personnes non éligibles.  

Parmi les ménages rencontrés par l’association et percevant des pensions de retraite, le niveau de vie médian est de 985 euros, tandis que celui perçu par les ménages percevant au moins l’AAH est de 950 euros. Pour les ménages percevant des allocations de chômage, le revenu médian descend quant à lui à 775 euros. Il s’établit enfin à 694 euros par mois pour les ménages percevant le RSA.  

D’une manière globale, le niveau de vie médian des ménages rencontrés par l’association s’établit à 555 euros par mois en 2023, enregistrant un recul de 19 euros par rapport à 2022. 95 % d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté et 74 % sous le seuil d’extrême pauvreté, rapporte le Secours catholique. 

46,1 % d’entre eux sont en situation d’impayés, tandis que 35 % des ménages rencontrés n’ont pas accès à un logement stable, ce qui représente 2 points de plus par rapport à 2022. Les femmes sont également le plus touchées par la pauvreté et représentent 56,7 % des personnes rencontrées par le Secours catholique en 2023. 

Les étrangers enfin représentent 52 % des ménages rencontrés par l’association, alors qu’ils ne composent que 7,8 % de la population générale. « Plus de la moitié des ménages étrangers rencontrés sont sans ressources », appuie le Secours catholique.

 

Des choix politiques  

  

La difficulté d’accès aux prestations sociales et le maintien de la pauvreté accroissent la dépendance des bénéficiaires de prestations sociales envers leur entourage ou les associations, « qui sont sommés de compenser l’éloignement de la solidarité », détaille le rapport. « Nombreux sont ceux qui ne trouvent pas ce soutien, ou préfèrent encore ne pas le solliciter », ajoute-t-il. 

Face à ce constat, l’association considère que « renforcer les filets de la solidarité n’est pas tant une question de moyens que de choix politiques ». 

« Même si la tendance dominante est au recul des solidarités, certaines politiques publiques esquissent un mouvement inverse sur lequel s’appuyer », met en avant l’association, citant notamment les espaces France Services, permettant une plus grande proximité des services sociaux.  

 

Élisabeth Crépin-Leblond

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