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Par Carenews INFO - Publié le 2 décembre 2022 - 16:00 - Mise à jour le 6 décembre 2022 - 13:56 - Ecrit par : Lisa Domergue
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Makesense, une association sur le chemin de la gouvernance décentralisée

La gouvernance est l’un des piliers de l’ESS. Carenews a souhaité mettre en lumière une organisation avec un modèle d’organisation innovant. Depuis 2018, l’association makesense repose sur une gouvernance décentralisée. Témoignage.

Makesense, une association sur le chemin de la gouvernance décentralisée. Crédit photo : iStock.
Makesense, une association sur le chemin de la gouvernance décentralisée. Crédit photo : iStock.

S’il y a une phrase que vous n’entendrez jamais chez makesense c’est : faut que je demande à mon N+2”. Ici, il n’y a pas de chef.fe, pas plus que de hiérarchie.

Voilà ce qu’on peut lire sur le site Internet de l’association qui compte plus de 130 salariés en France et dans le monde. Mais, que se cache-t-il derrière ces promesses ? Comment l’association a-t-elle mis en place une telle organisation, que l’on appelle « gouvernance libérée » ou « décentralisée » ? 

Coralie Gaudoux, l’une des cofondatrices de makesense, a accepté de nous raconter la construction de ce modèle de gouvernance inspirant. 

Un « ADN communautaire »

Comme pour toute histoire, revenons aux débuts. Tout commence en 2010, lors d’un voyage en Inde, lorsque deux amis ont l’idée de créer une communauté de citoyens pour aider les entrepreneurs sociaux à développer leurs projets à impact. L’esprit communautaire est donc dans l’ADN de l’association, qui a, entre temps, développé un incubateur, un fonds d’investissement à impact et beaucoup d’autres projets. 

Au fur et à mesure des années, makesense grandit et se structure, mais sans oublier ses racines : « Il n’y a jamais eu un directeur ou une directrice en haut de la pyramide », raconte Coralie. En 2016, l’association souhaite quand même « rationaliser » l’organisation, tout en ayant la forte volonté de ne pas reposer sur une hiérarchie verticale : « Nous avions cette croyance très forte que le fait de prendre des initiatives, de se faire confiance et de donner l'opportunité aux personnes d’expérimenter devait se retrouver dans la manière dont nous allions nous organiser. »

S’inspirer de ce qui existe

Les équipes de makesense commencent donc à se documenter sur le modèle de l’organisation décentralisée, ses fonctionnements et les structures qui l'ont mis en place. Ils s’inspirent notamment des thèses de l’organisation Opale de Frédéric Laloux. « Notre objectif était de trouver notre recette à partir de ces ingrédients pour fonctionner de manière décentralisée », explique la cofondatrice.

Après la théorie, l’heure de la mise en pratique est venue. Première étape : construire collectivement la raison d’être de l’association et ses valeurs. « Cela nous a permis de poser le cadre et d’être au clair sur la façon dont nous avions envie de travailler ensemble. » En parallèle, chaque salarié se forme à ce modèle de gouvernance. En 2018, un groupe de travail est désigné grâce à des élections sans candidat pour définir le modèle de gouvernance. Lors d’une élection sans candidat, aucune personne ne se présente. Collectivement, des critères d’éligibilité sont définis et chaque personne vote pour les personnes de l’organisation qui leur semblent les plus compétentes. Une première proposition de groupe est présentée avant d’être soumise à l’objection ou non du reste de l’équipe. 

Aucune hiérarchie et décentralisation du pouvoir

Concrètement, comment ce mode d’organisation se traduit-il ? Premier principe : il n’y a aucune hiérarchie. « N’importe qui peut prendre n’importe quelle décision. » Une règle : suivre le processus de décision qui repose sur le principe de la sollicitation d’avis. « La personne doit demander l’avis aux personnes expertes sur le sujet et à celles qui sont impactées par la décision. »

Qu’en est-il pour les décisions importantes impliquant parfois la responsabilité légale de makesense ? Ces grandes décisions passent par la « Waterline », un bureau « spécial » chargé de prendre toutes décisions « qui peuvent mettre en danger l’association ». La « Waterline » se réunit en moyenne quatre fois par an. 

Les collaborateurs choisissent leur salaire

Venons-en au point qui suscite beaucoup de curiosité : la rémunération. Chez makesense, les salariés sont décisionnaires de leur rémunération. Pour ce faire, une grille de rémunération a été définie collectivement en fonction de l’autonomie du salarié et de sa contribution au collectif. Une fois par an, chaque salarié doit organiser son « comité de développement » – comme un entretien annuel. C’est à cette occasion qu’il s’autoévalue et demande le retour de ce comité. 

La gouvernance décentralisée n’est pas un long fleuve tranquille

Makesense est encore « en chemin ». Et Coralie Gaudoux le précise : « Nous ne prétendons pas avoir un modèle de gouvernance exemplaire ». Et certains aspects ont mis du temps à se mettre en place : 

  • La question de la gestion du conflit 
  • La question de la transparence et en particulier la transparence budgétaire : « Il a fallu mettre en place des outils pour mettre à disposition de l’information de manière lisible et pas trop complexe afin que chacun puisse savoir où nous en sommes au niveau du budget. »
  • Le surengagement : « Le fait de donner le pouvoir aux gens, d'autant plus dans un métier où ils y trouvent du sens, chacun a tendance à vouloir trop en faire. On doit donc les accompagner pour poser leurs limites. »
  • La question du leadership et comment le rendre compatible avec l’organisation centralisée.

Comment mettre en place une gouvernance décentralisée ?

Coralie Gaudoux nous a livré trois conseils pour les organisations qui hésitent à se lancer dans la gouvernance décentralisée : 

  • Se demander pourquoi on veut le faire. Il faut que cela soit au service de son projet.
  • Ne pas essayer de copier-coller un modèle existant. Il n’existe pas de recette parfaite. 
  • L'intention des personnes qui ont le pouvoir dans l’organisation doit être sincère. 

 

Lisa Domergue 

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