Paris 2024 : plus de 600 structures de l’ESS ont été associées aux Jeux
Plus de 600 structures de l'ESS ont bénéficié des marchés de Paris 2024, en direct ou en sous-traitance. La directrice générale des Canaux, Elisa Yavchitz, dresse un bilan du dispositif ESS 2024 et de son héritage.
Le dispositif ESS 2024, porté par l’association Les Canaux, consistait à favoriser l’accès des acteurs de l’économie sociale et solidaire (ESS) aux marchés des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) de Paris 2024. Il s’agissait notamment d’informer les structures de l’ESS sur les différents marchés des JOP, lancés en direct ou en sous-traitance, et de les aider à y répondre, parfois en les incitant à constituer des consortiums pour allier leurs compétences.
Quel est le bilan de ce dispositif ? Quel pourra en être l’héritage ? Au lendemain de la clôture des Jeux, la fondatrice et directrice générale des Canaux, Elisa Yavchitz, répond aux questions de Carenews.
- L’association que vous dirigez, Les Canaux, a été chargée de la mise en œuvre du programme ESS 2024. Quel bilan tirez-vous de ce dispositif ?
Un bilan extrêmement positif. Le dispositif a permis à plus de 600 structures de l’ESS d’accéder à des marchés des JOP, en direct ou en sous-traitance. Et il pouvait d’agir de montants importants. Ainsi, le consortium « Laveries solidaires », qui regroupait des structures d’insertion et des structures du handicap, était chargé du nettoyage du linge des athlètes sur le village olympique et paralympique. Il s’agissait d’un marché d’un montant d’environ 2 millions d’euros, qui représentait 350 emplois. En montant, c’était le troisième marché du village olympique, après la restauration et l’hébergement.
Certaines structures de l’ESS ont également remporté des marchés en sous-traitance de grandes entreprises. Ainsi, Decathlon a remporté le marché de la fabrication des « kits » pour les volontaires des JOP, et a sous-traité la couture des T-shirts et des chapeaux à plusieurs entreprises d’insertion.
Les acteurs mettent en avant l’extrême fierté des équipes d’avoir participé à un événement historique, mais aussi la forte visibilité que cela leur a donné.
Il est difficile d’estimer le chiffre d’affaires total que cela a représenté pour les structures de l’ESS, car nous n’avons pas toujours d’information sur les montants des sous-traitances. Cependant, nous estimons que 10 à 15 % de l’ensemble des marchés ont été attribués à l’ESS.
Par ailleurs, nous menons, jusqu’en octobre prochain, une enquête qualitative auprès des structures de l’ESS. D’après les retours que nous avons déjà reçus, les acteurs mettent en avant l’extrême fierté des équipes d’avoir participé à un événement historique, mais aussi la forte visibilité que cela leur a donné.
- Comment ce dispositif est-il né ?
Le programme ESS 2024 avait été pensé dès la phase de candidature de Paris aux JOP, en 2016. Dès le départ, l’intention des organisateurs était d’organiser des jeux sobres, inclusifs et solidaires, permettant des retombées économiques pour les territoires concernés et pour leurs habitants. Nous voulions démontrer qu’il existait, sur les territoires, un tissu économique pertinent sur lequel nous pouvions nous appuyer pour porter ces jeux inclusifs et solidaires.
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- Ce dispositif peut-il inspirer les éditions suivantes des JOP ?
Notre dispositif a suscité beaucoup d’intérêt auprès des organisateurs des futurs JOP. Nous avons ainsi reçu des délégations des JO d’été de Los Angeles 2028 et de Brisbane 2032, mais aussi des JO d’hiver de Milano Cortina 2026. Brisbane, notamment, veut s’inspirer de ce que nous avons fait pour créer un dispositif visant à attribuer de manière préférentielle des marchés à des organisations portées par les Aborigènes, avec l’objectif de redonner à ces peuples toute leur place dans l’histoire et l’économie australiennes.
- Côté français, quel sera l’héritage de ce dispositif ?
Nous avons décidé de créer, au sein des Canaux, un nouveau programme, intitulé « La fabrique économique et solidaire », qui aura pour ambition de mettre en lien les grands marchés publics et l’ESS. Nous allons d’abord le lancer en Ile-de-France et en Provence-Alpes-Côte d’Azur, puis en Auvergne-Rhône-Alpes et en Bretagne. L’objectif est que les grands marchés publics bénéficient de plus en plus à l’ESS.
L’intérêt pour les donneurs d’ordre, au-delà de soutenir l’ESS, est que les chantiers, parfois lourds, sont mieux acceptés par les habitants si ceux-ci ont le sentiment qu’ils auront des retombées positives pour le territoire, en matière de création d’emplois inclusifs par exemple.
Nous avons décidé de créer, au sein des Canaux, un nouveau programme, intitulé « La fabrique écologique et solidaire », qui aura pour ambition de mettre en lien les grands marchés publics et l’ESS.
- La France vient d’être désignée pour organiser les JOP d’hiver de 2030 dans les Alpes. Est-il question qu’un dispositif du même genre y voie le jour ?
Pour l’instant, c’est en discussion et ce n’est pas encore décidé. Toutefois, cela doit s’inscrire dans une démarche plus générale en faveur de l’environnement et de l’inclusion. Si cela n’était pas le cas, les Canaux ne se lanceront pas dans une telle aventure. Nous ne souhaitons pas servir de caution pour un éventuel social-washing ou greenwashing.
Propos recueillis par Camille Dorival