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Par Carenews INFO - Publié le 30 avril 2021 - 18:00 - Mise à jour le 7 mai 2021 - 15:19
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[Portrait] Claire néo-paysanne aujourd’hui, était en quête de sens

Installée à Peuton, en Mayenne, Claire est une jeune diplômée qui a quitté la ville en quête de sens. Ses compétences acquises durant ses études apportent du dynamisme et un nouveau regard à son mode d’agriculture. Portrait.

Crédit photo : la Ferme de Peuton
Crédit photo : la Ferme de Peuton

 

Le Ferme du Peuton produit des fruits et légumes entre avril et décembre, et distribue sa production en direct. Claire et son mari proposent également des cours de yoga, des semaines de stage d'immersion à la ferme (permaculture, écologie interieure et extérieure) et des retraites bien-être. Diplômée d’HEC, en quête de sens, Claire permet, à l'aide de ses compétences en création et gestion d'entreprises, d’apporter de la viabilité à son projet agricole. 

En quête de sens

Claire a terminé ses études à HEC en 2013, en faisant une année de spécialisation en entrepreneuriat. « Après mes études je sentais que cela n’allait pas vraiment me convenir de travailler en entreprise à Paris ». Elle décide donc de partir en Amérique du Sud, en Colombie plus précisément, avec son compagnon de l’époque qui est aujourd’hui son mari. Rentrés en France après six mois d’expérience colombienne, les deux compagnons quittent Paris et s’installent à Aix-en-Provence. Claire travaille en tant qu'ingénieur d'affaires. 

L’absence de sens, de perspective, l'interrogation sur sa place dans le monde la poussent à remettre en question sa vision de l’avenir. « Je me retrouvais un peu dans une impasse. Toute ma vie on m’a dit que l’objectif était de trouver un CDI, bien payé. Mais en rentrant dans le monde de l’entreprise je me sentais vide », explique Claire. Elle commence un an plus tard une formation en naturopathie, discipline qui vise à améliorer le bien-être et permet de reprendre contact avec soi et avec la nature par le biais de moyens naturels. 

La Mayenne, terre de vacances où Claire revient régulièrement, devient centrale dans sa quête de sens. Avec son mari, elle rénove une vieille grange qui menaçait de s'effondrer dans l’idée d’en faire une salle de yoga, un lieu dans lequel elle pourrait animer des stages. 

« Plus on construisait cette grange, plus la salle de yoga prenait forme, plus on se disait que ce lieu nous plaisait. On se verrait bien créer un projet ici », détaille-t-elle. 

Un projet de maraîchage sur sol vivant 

Le maraîchage sur sol vivant se développant de plus en plus, cette technique a été choisie par Claire et son mari pour cultiver leurs denrées. La base de ce modèle est « de ne pas travailler le sol. De partir du principe que le sol est vivant. Il y a énormément d’insectes, de vers de terre, de micro-organismes, de bactéries qui travaillent dans le sol en permanence. Quand le sol n’est pas travaillé, il s’autorégule. » 

La deuxième pratique la plus importante en maraîchage sur sol vivant est de couvrir constamment le sol, en le paillant. « Quand le soleil tape sur la surface du sol, cela vient brûler toute la biodiversité qui cohabitent dans les premiers centimètres. Le paillage permet aussi de garder l’humidité des sols, parce qu’il y a moins d'évaporation, et donc de diminuer l’arrosage », précise Claire.  

Pluriactivité et distribution en circuit court 

La ferme de Peuton fait de la vente en direct, via des paniers de légumes que les clients viennent chercher à la ferme chaque semaine. « C’est une collaboration entre le consommateur et le producteur. Le consommateur s’engage au début de l’année, paye son année de paniers, et nous le tenons au courant de nos productions. » Ce système est un bienfait pour tout le monde car il permet aux agriculteurs de s'assurer un revenu annuel stable. « On connaît en début d’année notre chiffre d'affaires pour toute l’année. » Cela permet aussi à Claire et son mari de ne produire que ce dont ils ont besoin et de limiter les pertes. De plus, les légumes et fruits proposés n’ont pas besoin d’être calibrés. Dans la grande distribution, les denrées produites doivent être d’une certaine taille, en distribution directe ce n’est pas le cas, cela permet à la Ferme de Peuton de choisir des variétés paysannes en fonction de leur qualité gustative.  Comme beaucoup de néo-paysans, Claire a opté pour un modèle en pluriactivité. Elle et son mari organisent des cours de yoga, des semaines de stage d'immersion à la ferme (permaculture, écologie interieure et extérieure) et des retraites bien-être.. Grâce aux bénéfices de cette activité annexe, ils rénovent d’autres bâtiments pour améliorer la ferme. 

La Ferme du Peuton, symbole d’un projet agricole économiquement viable

Pour Claire, il est « très important de communiquer de façon beaucoup plus positive sur les métiers agricoles. Il est possible d’en vivre. » Dans l’imaginaire collectif, il est impossible de vivre de l’agriculture. A l’origine du projet, la jeune femme avait des réticences quant à la viabilité d’un système reposant uniquement sur l’agriculture et voulait s’appuyer sur des activités annexes, comme les stages de yoga et de naturopathie, pour en tirer ses principaux bénéfices économiques. « Si tout le monde à l’idée que l’on ne peut pas vivre d’une activité agricole, c’est problématique. » Le modèle agricole intensif et de distribution en circuit long est encore majoritaire et repris par un grand nombre d’agriculteurs. Les jeunes qui reprennent l’exploitation de leurs parents et qui ne connaissent qu’une unique méthode de production et de distribution ont tendance à perpétuer ce modèle. Il s’agit d’ une des principales problématiques résultant de la crise actuelle que traverse le monde agricole.  

Les néo-paysans apportent une nouvelle dynamique, de nouvelles méthodes de production. Les compétences de ces personnes, souvent plus diplômées, permettent d’améliorer la rentabilité et la résilience des exploitations. Claire et son mari, qui sortent respectivement d’HEC et de l'école d'ingénieur des Arts&Métiers, se sont installés avec un business plan viable, des connaissances en communication, en planification économique qui leur permettent d’être rentables dans une temporalité étendue. « Il y a toute une nouvelle vague de personnes qui arrivent avec une vision différente, un regard d'entrepreneur. On pense cohérence globale, impact social et environnemental, viabilité économique et pas uniquement chiffre d'affaires »

La mixité entre agriculteurs traditionnels et néo paysans

La mixité entre agriculteurs traditionnels et paysans est une des solutions pour une transition agricole réussie. « C’est un gros plus que ces deux mondes se rencontrent, que des personnes qui ne sont pas issues du milieu agricole puissent apporter des systèmes nouveaux. A l’inverse, on a besoin des agriculteurs traditionnels parce qu’ils ont des compétences, ils sont sur les territoires depuis plusieurs dizaines d’années, ils ont un réseau et des outils ». Claire souligne l’importance de ne pas arriver en détenteur de la vérité. Les nouveaux modèles des néo-paysans fonctionnent grâce aux réseaux d’agriculteurs locaux déjà en place depuis des décennies. « Mon beau-père, qui est agriculteur, nous aide sur certaines choses. » Les modèles qui marchent sont des résultantes d’une mixité des connaissances, de cocréation entre agriculteurs et néo-paysans. « Il est important que les deux systèmes se rencontrent, se nourrissent. »

Une des problématiques liées aux nouvelles réglementations d'incitation à faire sa transition vers une agriculture durable et notamment les réglementations de la nouvelle PAC est que cette transformation n’est pas réalisable pour une partie des agriculteurs, surendettés, qui ne peuvent pas dégager de nouveaux fonds pour investir dans cette transition. Certains agriculteurs « se sont installés il y a 20 ans et se sont endettés sur 30 ans donc il est compliqué de changer de méthodes. »

 

Florian Grenon

 

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