Pour relancer la consommation biologique, il faut la « reconnecter avec le plaisir » selon l’Agence bio
Les résultats du Baromètre de la perception et de la consommation de produits biologiques en France, réalisé par l’Agence bio avec l’Obsoco, ont été dévoilés le 27 février à l'occasion du Salon de l’agriculture. Le sondage montre la stagnation de la consommation bio et les contraintes financières des consommateurs, mais aussi leur méconnaissance des produits. Avec une campagne de communication, l’Agence bio entend contester les idées reçues.

Près de deux consommateurs sur trois (63 %) se déclarent inquiets des effets de l’alimentation sur leur santé et près de trois sur quatre (74 %) pensent que les produits biologiques sont meilleurs pour la santé. Pourtant, cela ne se traduit pas vraiment dans leurs actes. C’est ce que montre la 22e édition du Baromètre de la perception et de la consommation de produits biologiques en France, réalisé en novembre 2024 par l’Agence bio avec l’Obsoco et présenté le 27 février au Salon de l’agriculture à Paris.
En effet, seuls 30 % des répondants consomment du bio au moins une fois par semaine et un peu plus de la moitié d’entre eux (54 %) une fois par mois. D’ailleurs, si la consommation de bio s’est accrue jusqu’en 2021 pour atteindre 76 % de consommateurs mensuels et 52 % de consommateurs quotidiens, elle a ensuite diminué fortement dans les deux cas jusqu’en 2023. Elle stagne depuis 2023.
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« Le bio n’est pas une affaire de riches »
Première explication de cette consommation limitée : les contraintes financières, en particulier celles liées à l’inflation. 76 % des non-consommateurs et 81 % des consommateurs occasionnels déclarent qu’ils n’achètent pas plus souvent de produits biologiques en raison de leur coût.
Le prix n’explique pas tout. « Le bio n’est pas une affaire de riches », assure d’ailleurs Laure Verdeau, directrice de l’Agence bio. Peu de répondants ont l’intention d’augmenter leur consommation de produits bio dans les six prochains mois, alors que l’inflation ralentit. Malgré leur différence de niveau de vie, une proportion similaire des personnes gagnant 1 000 à 1 500 euros par mois (8 %) et ayant des hauts revenus (plus de 2 500 euros par mois, 9 %) consomment du bio quotidiennement.
Il s’agit plutôt d’une « affaire de diplômés et d’informés », poursuit Laure Verdeau. 12 % des personnes disposant d’un bac + 4 ou d’un bac + 5 consomment du bio quotidiennement, contre 5 % des personnes sans diplôme ou diplômées d’un certificat d’études primaires (CEP) ou d’un brevet d’étude du premier cycle (BEPC).
Créer des « réflexes » d’achat
Pour l’Agence bio, au-delà des freins financiers, le caractère limité de l’achat bio s’explique par une simple méconnaissance. Plus de la moitié (53 %) des non-consommateurs et des consommateurs occasionnels n’achètent pas plus souvent de produits bio parce qu’ils ont des doutes sur leur caractère totalement biologique. Une même proportion suppose que la plupart des produits bio vendus en France ne sont pas produits sur le territoire national. Pourtant, moins de 30 % d’entre eux sont cultivés à l’étrangers, avance Laure Verdeau.
Et si 47 % des non-consommateurs ne voient pas l’intérêt de consommer bio - une part en augmentation de six points par rapport à l’année dernière -, 23 % des consommateurs occasionnels et 18 % des non-consommateurs n’y pensent juste pas. « Nous avons un marché potentiel, il y a des actes d’achats qui ne demandent qu’à être déclenchés », assure Laure Verdeau.
Une campagne de communication intitulée « C’est bio la France ! », présentée à l’occasion du Salon de l’agriculture, invite donc les citoyens à adopter un « bioréflexe », un réflexe d’achat biologique. Un film publicitaire sera diffusé à partir du 22 mai prochain. « Vous n’avez jamais vu de campagne de télévision qui parle du bio en tant que label », se réjouit d’avance Laure Verdeau : la campagne permettra de mieux faire connaître les prérequis permettant d’apposer le fameux « AB » vert sur un produit.
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Une inquiétude pour « les opérateurs de l’aval »
Cette campagne insiste peu sur les arguments écologiques ou de santé. Ceux-ci ont un impact limité sur des consommateurs bombardés d’information, pour l’Agence bio : 77 % des personnes sondées disent ressentir de la fatigue ou de la lassitude par rapport aux actualités.
Au contraire, il faut associer l’alimentation biologique à la convivialité et au bon goût, d’après Laure Verdeau. La campagne ambitionne de « reconnecter le bio et le bien manger, le bio et le plaisir », martèle la directrice. Les visuels diffusés mettent en avant l’apéritif biologique, par exemple. Mais aussi la viande. « Nous voulons rompre avec le côté triste, le cliché du mangeur de graines », se justifie Laure Verdeau. L’objectif est aussi de montrer que le bio concerne bien tous les produits alimentaires et pas uniquement une partie d’entre eux.
« Nous pensons qu’avec cette campagne, on va réactiver la consommation », certifie Laure Verdeau. L’agence s’inquiète peu d’un manque de production : le métier d’exploitant en agriculture biologique reste attractif d’après elle, puisque 3 054 arrêts de production bio ont été recensés l’année dernière contre 4 337 lancements d’exploitation. Reste un maillon de la chaîne à assurer : les opérateurs de l’aval, les transformateurs, distributeurs ou stockeurs par exemple. 2 396 opérateurs ont cessé leur activité l’année dernière, pour 1 455 qui l’ont débutée. L’Agence bio insiste donc sur le besoin de maintenir des débouchés pour permettre à la filière bio de poursuivre son expansion.
Célia Szymczak