Service civique : les nouvelles missions brutalement suspendues, en l’absence de budget pour 2025
Une note du ministère de l’Économie, publiée mercredi 29 janvier, suspend l’ensemble des missions de service civique dont la date de début est fixée à partir du 1er février 2025. La mesure, qui affecte les missions d’environ 5 000 jeunes, suscite la protestation des associations.

La lettre a mis en situation d’alerte de nombreuses associations. Alors que les discussions sur le projet de loi de finances sont encore en cours, l’Agence du service civique a informé jeudi 30 janvier ses partenaires d’une note émise la veille par le ministère de l’Économie et entraînant la suspension « de toute nouvelle mission de service civique à compter du 1er février 2025 et jusqu’à adoption du budget de l’État pour 2025 ».
Le site de gestion des contrats du service civique, intitulé Elisa, est bloqué tandis que l’ensemble des jeunes dont la date de départ était fixée à partir du 1er février 2025 voient leur entrée en mission suspendue « quand bien même un contrat a été saisi ou validé ».
« S’agissant des jeunes entrés en mission durant le mois de janvier, une incertitude demeure sur les contrats saisis sur Elisa après le 1er janvier 2025 », indique encore l’Agence du service civique, qui demande aux organisations d’informer tous les volontaires concernés.
Un choc pour le secteur associatif
« Des milliers d’associations, de clubs et de collectivités territoriales sont concernés par l’accueil de jeunes en service civique et ont appris la nouvelle la veille de sa mise en œuvre », dénonce Marie Trellu-Kane, présidente de l’association Unis-Cité, qui a contribué au lancement du service civique et qui accompagne environ 10 000 jeunes par an, soit 8 % des effectifs du service civique.
Surpris par la brutalité de l’annonce, de nombreux acteurs associatifs ont décidé de réagir. Une lettre ouverte à l’intention du Premier ministre est en train d’être rédigée pour demander à l’État d’honorer les engagements pris et signés. Les associations dénoncent une situation violente pour les jeunes et les associations, qui voient leurs contrats d’engagement suspendus juste avant leur mise en œuvre.
« Concrètement, cela laisse sur le carreau 5 000 jeunes à qui on a demandé brutalement de rentrer chez eux et qui ne sont pas sûrs de percevoir d'indemnités pour leur mission en janvier. Concrètement, cela signifie que toutes celles et ceux qui devaient commencer une mission en février se retrouvent sans rien. Concrètement, cela signifie que des milliers d'associations qui accueillent des volontaires ne peuvent plus le faire en 2025 alors que, rappelons-le, elles ont un agrément pour ça ! », s’indigne en ce sens sur le réseau social LinkedIn, Claire Thoury, présidente du Mouvement associatif.
« Cette décision, sans anticipation, fait douter de la démocratie et de la fiabilité de l’État à des milliers de jeunes et aux structures qui accueillent », considère en outre Marie Trellu-Kane.
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Des milliers de structures de l’intérêt général impactées
Sur le réseau Bluesky, certains enseignants soulignent également l’impasse dans lequel se trouvent les étudiants dont le service civique a été accepté à la place d’un stage ou qui sont en année de césure et pour qui le dispositif représente une expérience ou une passerelle importante.
« Nous refusons que des économies soient faites sur la jeunesse », proteste le syndicat étudiant La Fage, demandant que les contrats signés en janvier soient honorés.
La mesure, fixée jusqu’à l’adoption du budget par le parlement, impacte environ 5 000 jeunes et des milliers de structures qui œuvrent dans dix domaines différents : la solidarité citoyenne, la citoyenneté européenne, la santé, la culture et les loisirs, l’accès au sport pour tous, l’éducation, l’environnement, la mémoire et la citoyenneté, le développement international et l’action humanitaire et l’intervention d’urgence en cas de crise.
Les chiffres du service civique sont en effet imposants. En 2023 et en 2024, le dispositif avait atteint son objectif de 150 000 jeunes engagés, dont 1 681 en 2023 qui étaient partis à l’étranger pour réaliser leur mission.
Au-delà du respect des contrats signés, les associations souhaitent voir cette situation perdurer.
« Nous demandons au gouvernement que le service civique, qui fait l’objet d’un large consensus politique, soit préservé. Nous voulons qu’il s’engage à préserver les 600 millions de budget qui ont été validés par le parlement », appelle la présidente d’Unis-Cité, qui le considère comme « une des rares politiques publiques consacrées à la jeunesse qui fonctionne ».
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« Cela serait très grave politiquement et socialement de casser ce dispositif »
« Chaque jour, je suis davantage convaincue que le service civique permet à des jeunes en souffrance et en questionnement de regagner confiance en eux et en la société. Cela serait très grave politiquement et socialement de casser ce dispositif qui redonne de l’espoir aux jeunes », estime-t-elle.
En l’absence de situation claire, l’association encourage les jeunes ayant débuté leur mission durant le mois de janvier à continuer de se rendre à leur service civique.
De son côté, les députés et les sénateurs ont trouvé un accord sur le projet de loi de finances pour 2025 vendredi 31 janvier, dans le cadre d’une commission mixte paritaire. L’examen des conclusions de cette commission mixte paritaire est prévu lundi 3 février, à 16 heures.
Élisabeth Crépin-Leblond