Ensemble pour plus d’impact : introduction de Fred Bardeau

De l’entraide aux Justice leagues il n’y a qu’un pas, et il faut le franchir vite !

Dans l’Économie Sociale et Solidaire, on est habitué à l’acrasie (le fait de savoir ce qui est bon mais de faire le contraire) et donc, bien souvent, « les cordonniers sont assez mal chaussés », en mode « faites ce que je dis mais pas ce que je fais ». C’est vrai pour le rapport à l’État (autonomie versus dépendance), c’est vrai pour la qualité de vie au travail (les bénéficiaires passent avant les équipes), mais c’est également vrai pour l’entraide, la coopération et ce qu’on devrait appeler la « convergence des luttes » et que, personnellement, j’appelle les « Justice Leagues », en hommage aux films éponymes où les super héros et la super héroïne (Batman, Superman, Wonder Woman, etc.) s’allient pour combattre un mal qui les dépasse.

Pourtant, il y a l’ADN de l’ESS, pourtant il y a l’ODD 17 qui dit que c’est par les partenariats qu’on atteindra les 16 autres Objectifs du Développement Durable, et il y a toutes les déclarations d’intentions. Mais les faits sont têtus : l’esprit « boutiquier », les égos et la compétition pour les financements font rage dans notre beau petit landerneau « social et solidaire ». L’économie sociale se défend toujours un peu d’être miscible dans l’économie solidaire, les coopératives ne coopèrent pas toutes ensemble, les « entreprises sociales d’utilité solidaires » sont régulièrement assimilées à un « ver (capitaliste) dans le fruit de l’ESS », les projets emblématiques d’une filière ou d’un même territoire ne s’allient pas entre eux pour aller plus loin et plus vite.

Je noircis le trait ?

Peut-être un peu, mais il n’en reste pas moins que les phénomènes de coopération, de consortium, de fusion, de coalition et d’alliance sont encore trop largement minoritaires dans le monde de l’impact. Pablo Servigne et Gauthier Chapelle avaient bien analysé, dans L’entraide, l’autre loi de la jungle (Les Liens qui Libèrent), que l’entraide était centrale dans le développement des espèces non humaines - et non la compétition - mais on est encore très loin du compte chez les « changemakers »... tant les logiques d’appels à projets, de valorisation communicante et la starification des « entrepreneur·es du changement » instrumentalisent les projets les uns contre les autres au lieu de les inviter à converger.

Heureusement, certains pionniers ouvrent, comme d’habitude, la voie :

des fusions spectaculaires mais rarissimes (Article 1 née de Passeport Avenir et de Fratelli, Alliance pour l’éducation et United Way…), des initiatives publiques 5 portées par une filière (la Grande École du Numérique), des actions de mécénat collectif bien analysées et encouragées par l’Admical, des fondations en avance de phase comme la Fondation la France s’engage, qui permet de répondre en collectif à ses appels à projets, des partenariats publics privés et philanthropiques (bien analysés par Le Rameau), des consortiums ayant émergé d’expérimentations ou de dispositifs de financements… et, bien sûr, une multitude de coopérations ciblées (programmes communs) et d’initiatives convergentes (Collectif Mentorat) démultiplient les possibilités d’impact.

AG2R LA MONDIALE est, via ses Activités sociales, un de ces acteurs catalyseur, précurseur, accélérateur et créateur de coalitions et d’alliances. Simplon aussi fait sa part : dans le secteur de la médiation numérique avec l’AFPA et les hubs inclusifs dans tous les territoires pour former 3 000 des 4 000 conseillers numériques du Plan de Relance, dans le monde de l’éducation des enfants à la technologie avec CAPPRIO, ClassCode et les Intrépides de la Tech, dans le champ de l’insertion professionnelle par les métiers du numérique et la féminisation de la Tech, et encore, tout récemment, pour la promotion de l’approche par les compétences et de la pédagogie active avec la coalition APCAVIP.

Mais cela ne suffit et ne suffira pas.

Il est urgent de former des coalitions élargies et activistes pour faire vraiment la différence sur les ODD. Il est nécessaire de faire comme les Activités sociales d’AG2R LA MONDIALE avec ses partenaires et d’inviter et inciter fortement les fellows Ashoka, les lauréats de la France s’engage ou d’EPIC Foundation, les projets et les fondations sous égide de la Fondation de France, les Territoires Zéro Chômeur de Longue Durée, les startups de territoires, les acteurs soutenus par le Plan d’Investissement dans les Compétences inclusion, etc., à s’unir pour porter un coup définitif aux inégalités qui minent la cohésion sociale et détruisent les vies de millions de Français.

Et, au-delà de la France et des Français, il y a l’Europe et le monde entier.

Nous sommes toutes et tous dans le même bateau Terre. Les problèmes qui sont face à nous sont immenses et ils sont mondiaux. Il faut donc arrêter de réfléchir et d’agir de manière franco-française pour déployer des réseaux et des alliances à l’international. Simplon le fait dans 20 pays au travers de partenaires locaux et ça fonctionne. Travailler au quotidien avec des partenaires européens, africains, sudaméricains, et dans des réalités politiques, économiques et culturelles variées, rend d’une part modeste, mais d’autre part cela montre la seule voie possible et utile quand on veut réellement parler d’impact.

Alors, on y va !