Rencontre avec Ethical Property : l’équipe d’ETIC – Foncièrement Responsable en Angleterre
L’immobilier durable et solidaire, une utopie ? Certainement pas pour Ethical Property ! Depuis près de 30 ans, cette entreprise britannique, sœur d’ETIC – Foncièrement Responsable, prouve qu’un autre modèle est possible.

En repensant l’immobilier comme un levier au service de l’intérêt général, elle crée des espaces accessibles, écologiques et adaptés aux structures engagées.
Les années ont passé, mais les ambitions du début restent inchangées.
En octobre 2024, ETIC a traversé la Manche, en train bien sûr, pour rencontrer Ethical Property. L’objectif ? Échanger sur les bonnes pratiques dans les tiers-lieux professionnels et responsables des deux organisations.
Aux origines d’Ethical Property : changer le monde
Tout a commencé en Angleterre, où est née la famille Ethical Property, dont ETIC fait partie aujourd’hui. En 1998, Jamie Hartzell, militant engagé, reçoit un héritage et se heurte à un dilemme : comment placer son argent sans financer les entreprises contre lesquelles il lutte ?
Plutôt que de cautionner un système spéculatif, il décide d’investir autrement. Et s’il pouvait, en résolvant ce dilemme, en profiter pour s’attaquer à un autre enjeu majeur : l’impact écologique du secteur immobilier ?
Jamie achète alors un bâtiment à Londres pour y installer son association. Trop grand pour une seule structure, il le partage avec d’autres organisations engagées, mutualisant ainsi les charges et créant un écosystème où l’immobilier devient un levier au service de la société.
Très vite, le concept séduit : loyers équitables, impact environnemental maîtrisé et gouvernance participative. Ethical Property est né.

La naissance d’ETIC, pionnière des tiers-lieux responsables en France
Rapidement, le modèle se développe à travers le Royaume-Uni et inspire d’autres initiatives, dont la France. Cécile Galoselva, alors bras droit de Jamie Hartzell, voit en effet le potentiel de ce modèle et décide d’adapter le concept à la France en 2010.
C’est ainsi qu’est née ETIC – Foncièrement Responsable, qui conçoit et gère des bureaux et commerces dans des bâtiments écologiques. Mais ETIC va plus loin et propose également des espaces événementiels et de formation, et même des espaces de santé comme dans son tiers-lieu WIKIVILLAGE à Paris. Les tiers-lieux ETIC accueillent des organisations sur des thématiques diverses : l’éducation, l’environnement, la formation, l’inclusion, la santé, etc.

Repenser l’immobilier est un défi collectif. Cette visite en Angleterre a permis à Cécile, accompagnée de Thomas, Directeur Financier d’ETIC, et de Liuli, Directrice Générale Adjointe, de s’imprégner de presque 30 ans d’expertise.
Rencontre avec Jamie Hartzell, Fondateur d’Ethical Property
Lors de son passage à Oxford, l’équipe d’ETIC a eu l’occasion de partager un repas avec Jamie Hartzell, fondateur d’Ethical Property. Un moment d’échange privilégié, où Jamie a retracé la genèse de son projet.
Il est notamment revenu sur le tout premier tiers-lieu d’Ethical Property à Londres, qui accueillait une douzaine d’organisations engagées : des associations de défense des droits humains, un magazine indépendant aux perspectives féministes, écologistes et antiracistes, des ONG de développement, ainsi que des entreprises spécialisées dans la production de vidéos sur l’environnement.
Parmi elles, on retrouve Undercurrents, un média alternatif dont Jamie faisait partie. Il s’agit d’un média engagé documentant les luttes sociales et environnementales ignorées par les médias traditionnels. Jamie y apparaît d’ailleurs dans une vidéo présentant les missions et les combats d’Undercurrents.
Ce parcours témoigne de son engagement profond. Un engagement qui se retrouve d’ailleurs chez toutes les personnes d’Ethical Property. Loin d’être une simple actrice du secteur immobilier, la famille Ethical Property défend des valeurs fortes et veille à leur pérennité. ETIC et Ethical Property ont déjà contribué à transformer les secteurs financier et immobilier… et elles continuent de le faire.
Cet échange entre Jamie et l’équipe ETIC a également permis de revenir sur les différences entre la France et l’Angleterre.
Si l’Angleterre et la France partagent un même engagement pour un immobilier plus durable, leurs chemins pour y parvenir est parfois diffèrent.
Des approches différentes, mais une même vision de l’immobilier responsable
Lorsque Jamie a lancé Ethical Property en Angleterre, le financement participatif n’existait pas encore. Il a donc dû faire appel à l’épargne publique, une procédure lourde et très encadrée par l’Autorité des Marchés Financiers.
Levées de fonds complexes, prospectus à rédiger, frais légaux élevés… Lancer un projet immobilier à impact relevait presque du parcours du combattant !
En France, ETIC a pu s’appuyer sur d’autres leviers : financements privés au départ, puis développement grâce à l’épargne salariale solidaire et aux fonds dédiés. Nous parlions alors d’investissement immobilier responsable et solidaire. L’essor du crowdfunding a également facilité les levées de fonds, permettant de contourner les lourdeurs administratives.
Autre différence notable : en Angleterre, les fondations et associations jouent un rôle clé dans le financement. Elles pratiquent ce qu’on appelle le "mission-related investment", alignant leurs placements avec leur mission sociale.
Résultat ? Ethical Property a bénéficié du soutien financier de nombreuses fondations engagées. En France, cette approche reste marginale : beaucoup de fondations confient encore leur capital à des gestionnaires de patrimoine classiques, parfois en contradiction avec leurs propres valeurs.
Malgré ces différences de contexte, une chose est sûre : des deux côtés de la Manche, la vision reste la même.
C’est d’ailleurs ce que garantissent les Quintessentielles, une charte que chaque membre de la famille Ethical Property s’engage à respecter. Celle-ci garantit notamment une sélection rigoureuse des structures hébergées dans les espaces de bureaux et commerces des tiers-lieux écologiques ETIC.
Visite du tiers-lieu The Old Music Hall, siège d’Ethical Property à Oxford
Lors de son voyage, l’équipe d’ETIC a pu plonger au cœur du modèle Ethical Property.
À Oxford, le siège d’Ethical Property incarne parfaitement leur vision : un espace de travail accessible, ancré dans un quartier vivant, favorisant les rencontres et la collaboration.
Avec un grand nombre d’acteurs et d’actrices de l’enseignement et des services à la personne, ce lieu rappelle MUNDO-M, le premier tiers-lieu d’ETIC situé à Montreuil.
La visite a aussi été l’occasion d’échanger avec les membres du comité de direction et d’enrichir les réflexions d’ETIC sur les évolutions du secteur.
Découverte d’un nouveau tiers-lieu durable à Londres
Direction ensuite Londres pour découvrir The Foundry, un tiers-lieu installé dans une ancienne usine de cirage. Ce lieu foisonne d’échanges et d’événements : les résident.es ne sont pas de simples locataires, mais de véritables acteurs et actrices de la communauté.
À travers une programmation dynamique, Ethical Property a su créer un écosystème vivant : animations, formations communes entre groupes de pairs, etc.
Ce modèle inspire ETIC, notamment pour développer une offre événementielle encore plus ambitieuse en France. C’est un espace qui rappelle WIKIVILLAGE, le nouveau tiers-lieu écologique d’ETIC à Paris.
Bien que construits à 20 ans d’écart, le premier tiers-lieu d’Ethical Property et The Foundry partagent une même vision et des fondements similaires :
- Un bâtiment écologique pour un immobilier plus durable
- Des espaces de travail professionnels
- Des organisations engagées
- Mais aussi une implantation stratégique dans des quartiers en mutation, ce que l’on pourrait qualifier en français de « renouvellement urbain » ou de « quartier prioritaire de la ville ».
L’objectif ? Avoir un réel impact territorial : collaborer avec les entreprises locales, offrir des opportunités de stage aux étudiant.es des écoles voisin.es, créer des emplois accessibles aux habitant×es du quartier…

Lors de cette visite, l’équipe d’ETIC a également remarqué qu’Ethical Property avait internalisé certains métiers. Une approche qui donne quelques idées pour optimiser les tiers-lieux ETIC en France !
Côté commercialisation, Ethical Property a longtemps misé sur le bouche-à-oreille. Mais avec la pandémie du COVID-19, la visibilité en ligne est devenue essentielle pour attirer de nouvelles structures résidentes. Une évolution qui fait écho aux réflexions d’ETIC sur ses propres stratégies de communication.
En somme, un voyage riche en découvertes, en échanges et en inspirations pour imaginer les tiers-lieux de demain.
Cette visite a renforcé un sentiment d’appartenance à un projet bien plus vaste que celui d’ETIC en France. Au fil des échanges, une évidence s’est imposée : ce que Jamie Hartzell imaginait il y a presque 30 ans est toujours bien vivant. La mission initiale d’Ethical Property reste intacte.
Malgré des pratiques parfois différentes, nous partageons les mêmes valeurs et la même vision. Finalement, peu importe si les approches varient : l’essentiel est d’adapter les idées pour qu’elles aient le plus d’impact possible.
Cette visite a permis d’identifier des pistes d’amélioration pour ETIC, mais a aussi suscité l’envie, côté anglais, de venir découvrir ETIC en France !