Le Mécènes Forum revient sur les enjeux du mécénat pour demain
La rédaction a suivi certaines sessions et ateliers de réflexions lors du dernier Mécènes Forum mardi 12 octobre; Voici quelques idées à retenir pour penser le mécénat de demain !
Le Mécènes Forum a permis de réfléchir à divers sujets autour du mécénat et de l'associatif. Carenews a assisté à plusieurs conférences et vous fait part des meilleurs moments
Quel alignement entre RSE et mécénat ?
Pour la session d’ouverture du mardi 12 octobre, la question de l’alignement entre RSE et mécénat a été débattue entre plusieurs délégué.e.s de fondation et directeurs RSE. Deux questions majeures ont été abordées : comment sont liées les deux notions de performance (RSE) et d'expérimentation (mécénat) au sein de l'entreprise ? Et comment prendre en compte les causes oubliées, celles qui sont déconnectées de l’activité de l'entreprise ?
Pour Isabelle Verrecchia de la Fondation M6, le mécénat et la RSE sont au service de l’intérêt général. La déléguée générale de la fondation explique que pour le groupe M6, le choix a été de s’engager sur une cause en dehors du cœur du métier de l'entreprise :
Le mécénat permet d’aller vers des sujets où on ne nous attend pas. Cela a pu paraître comme une difficulté au départ. On a été interrogé sur notre légitimité, mais aujourd’hui, on est identifié comme un acteur important sur le sujet carcéral. Le mécénat est un laboratoire d’expérimentation et permet d’aller sur des choses très différentes.
Pour Arthur Toscan du Plantier, directeur stratégie, RSE, Mécénat et Communication chez Emerige, la RSE et le mécénat sont deux leviers d’engagement sociaux importants de l’intérêt général qui sont très proches. Il a rappelé que la politique de la RSE était tournée vers l’intérieur de l’entreprise, et surtout, qu’elle était quantifiable par ses objectifs de performances extra-financières.
À l’inverse, le mécénat est tourné vers l’extérieur de l'entreprise, c’est un don discrétionnaire (sauf dans le cadre de la loi Aillagon et les contreparties régies par un cadre législatif spécifique). Par ailleurs, la porosité entre ces deux notions s’est accentuée avec la loi Pacte de 2019 qui introduit l'entreprise à mission et sa contribution à la vie d’intérêt général :
Je suis donc partisan de dire que la RSE est d’intérêt collectif. Pourquoi ? Je pense que l’intérêt général est rattaché à la puissance publique et non pas à l’entreprise qui incarne des intérêts d’ordre privé.
Olivia Féré, déléguée générale de la Fondation Identicar, a rappelé l’exemple de sa PME engagée dans des projets au cœur de leur activité :
Nous sommes une PME, avec un budget assez restreint. Nous ne pouvons pas révolutionner la philanthropie et le monde des garages solidaires ! Nous avons choisi de mener des actions vers une cause en lien avec notre raison d’être et notre cœur de métier.
Le soutien aux projets se traduit autant par un soutien financier que par un réseau et tout l’écosystème business que le groupe peut apporter. « Je pense que le soutien dans la durée est primordial pour une association, et le fait d’actionner plusieurs leviers quand on choisit une cause proche de son cœur de métier, cela veut dire combiner plusieurs dons, aussi bien financier, en nature et de compétences ».
L’impact et l’hybridation des modèles
La session intitulée Pour plus d’impact : comment accompagner l’hybridation des modèles économiques ?, a permis à des entrepreneurs de raconter leurs parcours et les raisons pour lesquelles ils ont choisi l’hybridation des modèles économiques, associatifs, entreprise Esus ou encore fondation.
each One, une solution de recrutement de réfugiés et de nouveaux arrivants, était au départ une association. Finalement, une entreprise à mission est créée en parallèle pour rendre le modèle pérenne. « La notion d’hybridation, ça n’a pas été un choix », explique le cofondateur, Théo Scubla. « On a eu une double mission (favoriser un retour à l’emploi des réfugiés et nouveaux arrivants et permettre aux entreprises de saisir l’opportunité de l’arrivée de ces talents sur le marché de l’emploi) dès le départ et on s’est demandé quelle était la meilleure façon de les servir ».
Finalement, each One a perçu cette hybridation comme une complexité notamment dans la direction. « On a donc déplacé le barycentre du côté de l’entreprise et c’est elle qui a commencé à prendre le relais », explique Théo Scubla. Finalement, le groupe crée un fonds de dotation qui permet en parallèle de financer des activités d’intérêt général.
Lors de ce changement, il a cependant fallut affronter une barrière culturelle au sein de la structure, explique Théo Scubla : « Il a fallut assumer qu’on était une entreprise lucrative alors qu’on venait de l’associatif, statut qui était vu comme intouchable ».
Simplon, de son côté, a fait le chemin inverse. Cette structure qui forme divers profils aux métiers du numérique était au départ une entreprise Esus. Le but de ce choix était d’accéder à des fonds propres notamment. Mais finalement, Simplon décide de créer également une association et une fondation en parallèle : « C’était une demande de nos parties prenantes », explique Frédéric Bardeau, président de Simplon. « Ils nous ont demandé de nous mettre sous une forme associative pour créer des véhicules fiscaux ».
Cette conférence a également permis à des philanthropes de s’exprimer sur ce sujet de l’hybridation. Pour Isabelle Delaplace, déléguée générale de la fondation FDJ : « Ces modèles répondent parfaitement à nos exigences. Ils développent leurs capacités d’autofinancement et vont perdurer au-delà du financement ». Seul point d’attention, selon elle, l’hybridation demande une agilité juridique interne.
Christina Diego et Théo Nepipvoda