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Par Nos Épaules et Vos Ailes - Publié le 31 octobre 2025 - 07:00 - Mise à jour le 31 octobre 2025 - 07:00
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Le Moulin de Pont Rû : un havre de répit et de reconstruction pour les femmes victimes de violences

Créée en 2018, l’association Le Moulin de Pont Rû est un tiers-lieu social et rural situé au cœur du Parc naturel régional du Vexin français. Elle accueille des femmes et des enfants marqués par les violences, des jeunes en perte de repères, mais aussi des habitants et des élèves venus découvrir le lieu. Tous partagent une même expérience : se reconnecter à soi, aux autres et à la nature, à travers les gestes simples de la transition écologique. Depuis juin 2025, le Moulin de Pont Rû est soutenu par le fonds de dotation Nos Épaules et Vos Ailes, afin de renforcer deux projets essentiels : les séjours de répit pour les femmes victimes de violences et l’accueil de jour, qui leur propose un accompagnement psychologique, juridique et social sur le territoire. Explications d’Alan Caillaud, co-fondateur et directeur de l’association.

Crédit photo : Moulin du Pont Rû
Crédit photo : Moulin du Pont Rû

Un lieu pour souffler et se reconstruire

Installé dans un ancien moulin à eau du XVIIIᵉ siècle, le Moulin de Pont Rû a été pensé comme un refuge pour celles et ceux qui traversent des périodes de grande fragilité. Depuis 2020, ce lieu chargé d’histoire accueille des femmes en situation de vulnérabilité, leur offrant un espace de répit et de reconnexion à soi. « L’idée, raconte Alan Caillaud, qui a racheté en 2018 sa maison familiale avec une amie, Nathalie Guillaume, c’était de créer un endroit où l’on puisse souffler, se reconstruire et reprendre confiance. »

Leur parcours personnel explique cette orientation : Alan Caillaud a sillonné pendant deux ans le Moyen-Orient, sur des zones de guerre, avant de traverser un drame personnel ; Nathalie Guillaume, de son côté, était engagée au sein de l’association Femmes Debout, spécialisée dans l’accompagnement des femmes victimes de violences. De cette rencontre est née une vision commune : transformer ce lieu en un espace de ressourcement et de transformation personnelle.

Autour du bâtiment principal s’étend un jardin en permaculture de 4 000 m², une salle de restauration et une dizaine de chambres. Dans ce cadre apaisant, l’association accueille des femmes venues de toute l’Île-de-France, orientées par un réseau de 90 associations partenaires, pour des séjours de répit d’une semaine. Alan Caillaud précise : « ce sont des femmes de tous âges et de tous horizons, qui ont traversé des épreuves parfois très lourdes. Ici, elles peuvent enfin se poser, être cocoonées, se sentir à nouveau en sécurité. »

Encadrées par une vingtaine de salariés et autant de prestataires extérieurs, les participantes suivent un programme mêlant méditation, yoga, danse, théâtre, chant, photothérapie, équithérapie, cercles de parole et ateliers de gestion du stress. « On travaille beaucoup sur l’estime de soi et la libération des tensions. Chaque activité aide à se reconnecter à son corps et à ses émotions ». Pendant les vacances scolaires, des séjours parallèles sont proposés aux enfants dans un lieu partenaire situé à une quinzaine de kilomètres. « Les enfants participent à des séjours construits autour des mêmes thématiques que leurs mères — confiance en soi, gestion des émotions, … — pour vivre eux aussi un temps de respiration et d’expression, tout en laissant les mères se recentrer sur elles-mêmes. »

Le soutien du fonds de dotation Nos Épaules et Vos Ailes est essentiel : il permet d’accueillir davantage de femmes et d’enfants dans de bonnes conditions. « Pendant leur séjour, tout est pris en charge : le transport, l’hébergement, les repas, les ateliers. L’idée, c’est qu’elles n’aient rien à gérer et puissent enfin se concentrer sur elles-mêmes », rappelle le co-fondateur de l’association.

Crédit photo : Moulin du Pont Rû

Une réponse aux enjeux des femmes victimes de violences en milieu rural

En juin 2024, le Moulin a franchi une nouvelle étape avec l’ouverture d’un accueil de jour pour les femmes du territoire. « Ce projet, né d’un travail de terrain mené pendant deux ans avec Isabelle Rome, alors ministre chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes dans le cadre du Pacte Nouveau Départ, visait à mieux comprendre les besoins réels des femmes et leurs difficultés d’accès aux droits », explique Alan Caillaud. De cette démarche collective est né un diagnostic de territoire, conduit entre le Val-d’Oise et les Yvelines, mobilisant plus de soixante partenaires. En 2023, un colloque “Femmes et Ruralité” a réuni près de 200 participants et a conduit à la création de cet accueil de jour « écologique, juridique et social » ouvert à une trentaine de kilomètres du Moulin.

Depuis son ouverture, plus de 280 rendez-vous d’accompagnement ont déjà eu lieu. Les femmes y rencontrent des psychologues, des juristes et des travailleurs sociaux. Tout est pensé pour simplifier leurs démarches administratives, restaurer leur confiance et renforcer leur pouvoir d’agir.

Cet accueil de jour en milieu rural répond à une urgence encore trop souvent invisible[1]. Si les violences conjugales touchent tous les milieux sociaux, près de la moitié des féminicides (47 %) ont lieu en zone rurale, où les dispositifs d’aide sont rares ou difficilement accessibles. Les femmes y sollicitent moins les services de soutien : seules 18 % d’entre elles ont recours à au moins deux services d’aide, contre 31 % en milieu urbain.

Une ambition : identifier, former d’autres porteurs de projets associatifs

Chaque année, le Moulin accueille environ 250 femmes et une centaine d’enfants. Mais face à l’ampleur des besoins, l’équipe souhaite aller plus loin. Grâce à l’appui du fonds de dotation Nos Épaules et Vos Ailes, l’association va pouvoir agrandir l’accueil de jour et renforcer son équipe, en augmentant les permanences psychologiques et en développant un poste dédié à l’essaimage du modèle. « Il existe encore trop peu de dispositifs de court terme comme les séjours de répit, alors qu’ils représentent un sas de respiration, une étape nécessaire avant de se remettre en mouvement. Pour y remédier, nous avons le projet d’identifier, de former et d’accompagner d’autres porteurs associatifs partout en France. », explique Alan Caillaud.

Les besoins sont considérables, mais le manque d’information et la complexité des démarches freinent les initiatives. « Des dispositifs d’aide existent — ANCV, CAF, fonds départementaux —, mais c’est un véritable labyrinthe administratif. Il faut chercher, comprendre, recouper, et cela prend un temps fou. Nous voulons rendre ces dispositifs plus lisibles et accessibles à d’autres structures ». Les premiers projets pourraient voir le jour à Marseille, en Bretagne, près de Lille et à Strasbourg.

 

[1] Sénat, 2021), « Femmes et ruralités : en finir avec les zones blanches de l'égalité – rapport », octobre.

 

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