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Par Carenews INFO - Publié le 12 juillet 2023 - 15:48 - Mise à jour le 13 novembre 2023 - 10:08 - Ecrit par : Célia Szymczak
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Accor, Coca-Cola, Danone, Nestlé… pourquoi ces grandes entreprises soutiennent-elles la loi sur la restauration de la nature ?

Ce texte, proposé par la Commission européenne et adopté mercredi 12 juillet au Parlement, vise à protéger et restaurer la biodiversité dans l’espace européen. De grandes entreprises se sont officiellement prononcées en sa faveur.

D'où vient la mobilisation des entreprises pour la biodiversité ? Crédits : iStock.
D'où vient la mobilisation des entreprises pour la biodiversité ? Crédits : iStock.

 

Les débats ont fait rage au sujet de la loi sur la restauration de la nature, adoptée de justesse par le Parlement européen le 12 juillet. Ce texte proposé par la Commission européenne vise notamment à restaurer 20 % des terres et espaces marins abîmés d’ici 2030. D’un côté, les députés conservateurs, une partie des centristes et les syndicats de l’agriculture conventionnelle s’y opposent. Ils arguent qu’il mettrait en danger la sécurité alimentaire et serait préjudiciable aux petits pêcheurs et agriculteurs. De l’autre, les députés européens du parti socialiste européen et les militants écologistes le soutiennent. Plus étonnant, des grands groupes se mobilisent également en faveur du texte. 

En effet, dans une lettre ouverte publiée sur le site « Our nature our business », 67 grandes entreprises appuient la proposition de la Commission européenne. À leurs yeux, la loi permettra de « s’attaquer à la crise climatique, assurer notre sécurité alimentaire et d’approvisionnement en eau à long terme, ainsi que protéger et créer de nouvelles opportunités d’emploi ». 

Sur LinkedIn, le directeur général du groupe MAIF Pascal Demurger a aussi déclaré soutenir « pleinement » le texte. « J’espère sincèrement que ceux qui nous représentent feront leur part et prendront cette fois-ci les bonnes décisions pour notre futur », a déclaré sur le même réseau Lucie Bash, la cofondatrice de TooGoodToGo, avant le vote du Parlement.

 

Un soutien paradoxal 

Les entreprises ont déjà demandé plus de régulation en termes de protection de la biodiversité. À l’occasion de la COP15 en octobre, 300 entreprises dont BNP Paribas, Danone et H&M, réunies dans la coalition Business for nature, appelaient dans une lettre ouverte à « rendre obligatoire pour toutes les grandes entreprises et institutions financières l’évaluation et la divulgation de leurs impacts et dépendances à l’égard de la nature ». 

Pourtant, ces groupes sont souvent loin d’être exemplaires. En janvier dernier, les organisations non gouvernementales Zero Waste France, Surfrider Foundation et ClientEarth assignaient par exemple le groupe Danone en justice pour non-respect de la loi sur le devoir de vigilance. L’entreprise de l’agroalimentaire, qui possède notamment les marques d’eau minérale en bouteille Évian et Volvic, serait le « leader de la pollution plastique », avec des conséquences environnementales et sanitaires « catastrophiques ». En mai, les ONG estimaient que le plan de vigilance publié par le groupe n’était « toujours pas à la hauteur des enjeux ».

 

Des intérêts économiques 

Comment expliquer ce paradoxe ? Les entreprises perçoivent désormais l’urgence. Le déclin de la biodiversité fait peser un risque clair sur leurs modèles économiques, qui dépendent des services écosystémiques. La perte des habitats naturels et les dérèglements climatiques « mettent en danger les vies humaines », mais surtout « les fondations de nos activités économiques », estiment Accor, Danone, H&M, Ikea, La Banque Postale, Mirova, Nestlé ou encore Suez sur le site « Our nature our business ». 

Ainsi, la loi constitue un « allié puissant pour les entreprises affectées directement par la perte de la biodiversité et les risques climatiques ».  Au-delà des risques, la protection de la biodiversité constitue une opportunité. Les signataires rappellent que selon la Commission, un euro investi dans la restauration de la nature apporte huit à 38 euros de bénéfices. 

La protection de la biodiversité constitue un  « enjeu moral » lié à notre « rapport au vivant », mais aussi un « enjeu pratique » et « économique » qui « conditionne notre survie collective », rappelle aussi l’assureur Pascal Demurger. 

 

D’autres explications

Ce soutien peut aussi s’expliquer par d’autres facteurs, à commencer par la volonté de s’impliquer dans la formulation de normes de toute façon inéluctables.

Celles-ci se multiplient. En France, la loi sur le devoir de vigilance rend les entreprises responsables de leurs impacts sur la biodiversité. À l’échelle de l’Union Européenne, la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) obligera les entreprises à les publier. L’Accord de Montréal sur la biodiversité adopté par près de 200 pays incite les États à prendre des mesures contraignant les entreprises à le faire. 

Des normes qui peuvent être influencées par les entreprises. En décembre dernier, Les Amis de la Terre publiait un rapport dans lequel l’association s’inquiétait que les grandes entreprises « infiltrent les processus des Nations unies, s’assurant que leurs intérêts soient défendus et que les “solutions” en faveur de la biodiversité n’affectent pas leurs profits. » « Les entreprises se présentent comme “volontaires”, prétendant qu’elles font partie de la solution (...). Certaines de ces “solutions” incluent de la compensation, de l’auto-déclaration, auto-régulation et auto-certification », ajoute l’ONG.

Dernier critère : la pression des consommateurs. Selon un sondage réalisé par BVA pour l’Office français de la biodiversité en juin, 94 % des Français jugent important ou crucial de se mobiliser pour la protéger et la restaurer. 57 % d’entre-eux estiment que les entreprises ont un rôle à jouer en ce sens. 

 

Célia Szymczak 

 

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