Budget des associations de solidarité : jusqu’à quand sera-t-il soutenable ?
Les associations alertent sur leur situation budgétaire à flux tendu. Les dons ponctuels d’entreprises ou les subventions étatiques sont insuffisants pour résoudre cette question, selon elles.
L’appel des Restos du Cœur à la générosité a fait grand bruit dans la presse depuis dimanche dernier. Suivie par d’autres associations, comme la Croix-Rouge française, elle alertait sur son incapacité à répondre à la demande croissante à laquelle elle fait face.
Suite à ces annonces, le gouvernement a annoncé une aide versée aux Restos du Cœur de 15 millions d’euros. Des particuliers et des entreprises ont aussi effectué des dons. Mais cela sera-t-il suffisant pour financer les associations ? Leur budget s’avère très contraint. « Depuis la crise sanitaire et sociale, ça a été un combat de tous les jours de faire en sorte de répondre à tous les besoins », constate Mario Papi, trésorier national du Secours populaire français.
Diminution des ressources
Premier motif de préoccupation : l’inflation. Elle pèse sur la solidarité des Français, selon France Générosité, le syndicat représentant 140 associations et fondations. Le montant des dons a chuté de 3,9 % entre 2021 et 2022, corrigé de l’inflation, selon le Baromètre de la générosité publié en mai dernier.
De plus, l’inflation cause une augmentation de la précarité, ce qui conduit en retour à l’augmentation du nombre de bénéficiaires des associations de solidarité.
Par ailleurs, la part des subventions publiques dans le budget des associations diminue depuis plusieurs années. Elle a baissé de 34 % à 20 % entre 2005 et 2017, constate la chercheuse Viviane Tchernonog dans une étude réalisée en 2019.
Renforcer les financements publics
Face à cette situation, il y a quelques mois, le Secours populaire français a sollicité avec d’autres associations de solidarité, le président de la République Emmanuel Macron et la Première ministre Elisabeth Borne. L’objectif ? Débloquer plus de fonds publics, pour pouvoir répondre aux besoins croissants. L’État n’a pas répondu à leur demande.
Plus largement, il faudrait repenser le mode de financement des associations, déplore Xavier du Crest de Villeneuve, président France d’Handicap International et d’Alliance Urgence. D’après lui, les associations ne sont pas financées « à la hauteur » de leur rôle dans la solidarité nationale et internationale. Il appelle les pouvoirs publics à mettre en place de financements institués, réguliers, « fondés sur l’analyse d'impact et les coûts évités ». Et à simplifier les processus : « nous sommes absolument redevables, au centime près, de l’usage des fonds qui nous sont donnés, avec des Commissaires aux comptes, avec la Cour des Comptes, avec l’Inspection générale des affaires sociales », ajoute-t-il, « nous sommes dans une gestion au cordeau comme je ne l’ai jamais vu dans le secteur marchand ».
Il suggère au gouvernement d’organiser un « Grenelle du monde associatif » pour repenser ces questions, dans un post publié sur son compte LinkedIn.
Des limites structurelles
Un renforcement des moyens accordés par les pouvoirs publics ne solutionnera pas tout. D’abord, une partie des associations veut conserver une indépendance vis-à-vis de ces derniers, comme le Secours populaire français. L’association s’attache à ce qu’une proportion majoritaire de ses financements proviennent de dons. Les associations qui font de tels choix souhaitent parfois préserver cette indépendance pour éviter de dépendre d’un seul financeur ou encore d’avoir une plus grande liberté de parole dans le cadre de leur plaidoyer.
Certains enjeux nécessitent de toute façon une réponse structurelle. « Le rôle premier de l’État, c’est de faire en sorte que les citoyens puissent s’en sortir. Ce n’est pas normal que des personnes soient dépendantes à ce point d’associations », déclare Mario Papi.
« Le gouvernement doit entendre l'alerte lancée par les @restosducoeur. Il est urgent d'investir dans des politiques publiques à la hauteur des enjeux pour lutter contre la pauvreté et garantir l'accès à une alimentation suffisante, saine et durable », a déclaré Action contre la Faim sur son compte Twitter. Le Secours catholique a relayé une alerte du même type sur le sien, demandant au gouvernement d'apporter « des réponses structurelles à la lutte contre la pauvreté et la précarité alimentaire ».
La rédaction