L’éco-score textile prochainement déployé en France
La méthodologie de l’Écobalyse élaborée par l'État doit être déployée en France d’ici à la fin de l’année. Fonctionnant à partir de points cumulatifs, elle vise à informer le consommateur sur l’impact environnemental des vêtements. Elle peut également pousser les marques à s’améliorer. Explications.

Vendredi 16 mai, le ministère de la Transition écologique a annoncé la validation par la Commission européenne du décret concernant l’affichage environnemental français des vêtements. La mesure, qui doit encore être validée par le Conseil d’État, devrait être déployée en France à partir de cet été.
« C’est un outil essentiel pour permettre aux consommateurs de connaître l’impact de leurs achats et aux producteurs responsables de se démarquer », s’est réjouie sur les réseaux sociaux la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher. Son application doit être accompagnée du vote de la loi anti fast fashion, inscrit à l’ordre du jour du Sénat pour le 10 juin. Ce texte pourrait notamment lier à l’affichage environnemental à venir, un système de « bonus-malus » fiscal à destination des entreprises du textile.
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L’Écobalyse : des points équivalent à l’impact environnemental, sur une échelle infinie
La méthode choisie par le gouvernement pour cet affichage environnemental est celui de « l’Écobalyse ». Présenté l’année dernière après plusieurs années d’élaboration, l’Écobalyse fonctionne à partir de points, attribués en fonction de l’impact du produit sur l’environnement, depuis sa fabrication jusqu’à la fin de sa vie. En intégrant les stratégies des marques dans ses critères, il se différencie également du Product Environnemental Footprint (PEF), utilisé par l’Union européenne et critiqué pour ses limites vis-à-vis de la fast fashion.
Plusieurs critères environnementaux sont ainsi pris en compte par l’Écobalyse : impact carbone, pollution de l’eau, rejets de microplastique, impact sur la biodiversité… Plus le score du vêtement est élevé, plus son impact négatif sur l’environnement est jugé important.

« C’est une méthode qui permet de donner l’ordre de grandeur de l’impact des produits, en se concentrant sur les externalités négatives, avec une échelle infinie, très liée à la consommation de matières », explique Marguerite Dorangeon, cofondatrice et dirigeante de Clear Fashion. Cette société à mission s’est donnée pour but d’accompagner les marques de textile à évaluer leurs produits en fonction de critère sociaux et environnementaux. Ayant développé son propre système de notation intitulé le « Fashion Score », Clear Fashion a également participé aux travaux d’élaboration de la méthodologie nationale auprès du gouvernement.
Il sera possible de comparer l’impact d’un vêtement avec celui d’une plaquette de chocolat par exemple. »
Marguerite Dorangeon.
Un outil de comparaison sans prise en compte des aspects sociaux
En offrant une méthode de calcul du coût environnemental, « l’Écobalyse permet de comparer entre différents produits textiles, mais aussi, dans le futur, entre des produits de différents secteurs. Il sera possible de comparer l’impact d’un vêtement avec celui d’une plaquette de chocolat par exemple », ajoute Marguerite Dorangeon. Un système similaire d’écobalyse dédié aux produits alimentaires fait en effet l’objet d’une concertation méthodologique par le gouvernement.
La dirigeante de Clear Fashion estime la méthode gouvernementale complémentaire à celle du Fashion Score développé par son entreprise. Ce dernier ajoute à la dimension environnementale, des aspects sociaux, de santé et d’impact sur les animaux. Des critères non pris en compte dans la méthode gouvernementale.
Générant un score de 0 à 100, le Fashion Score permet de comparer, cette fois au sein d’une même catégorie de vêtements, les produits de différentes marques. « La note de 0 correspond au pire produit et la note de 100 au meilleur », explique Marguerite Dorangeon. « Entre deux t-shirts par exemple, le Fashion Score permet de savoir lequel est fabriqué dans les meilleures conditions », met-elle en avant.
À côté de ses activités habituelles, l’entreprise veut se positionner désormais en « relai terrain » de l’Écobalyse, avec pour objectif de répondre à un enjeu de pédagogie auprès des consommateurs comme des marques de textile.
Un dispositif pour l’instant fondé sur le volontariat
Pour l’instant, le déploiement du dispositif gouvernemental, sur les étiquettes des produits ou sur les sites Internet des fabricants, reposera en effet sur la base du volontariat des entreprises, au lieu d’être obligatoire comme initialement annoncé.
À partir de 2026 cependant, n’importe quel acteur, notamment les associations de consommateurs, pourra générer par défaut les scores des vêtements, si la marque n’a pas réalisé elle-même la démarche. En cas de manque d’informations, le score généré se fondera alors « sur les pires hypothèses » possibles, afin d’inciter les entreprises textiles à plus de transparence. De plus, les marques qui communiquent déjà sur leur empreinte carbone auront quant à elles l’obligation d’afficher l’Écobalyse.
L’intérêt de l’affichage environnemental est d’apporter de l’information au consommateur mais aussi de pousser les marques à s’améliorer. » Caroline Mini.
« L’intérêt de l’affichage environnemental est d’apporter de l’information au consommateur mais aussi de pousser les marques à s’améliorer », met en avant Caroline Mini, directrice de l’engagement social et environnemental au sein de la marque de vêtements outdoor Picture. Cette entreprise française née en 2008 et labelisée B Corp affiche l’Écobalyse sur son site depuis l’année dernière, en plus du Fashion Score développé par Clear Fashion.
« Cela permet d’apporter de l’information de façon pédagogique et lisible. Nous voulons être le plus transparent possible, même si nous savons que nous ne faisons pas tout parfaitement », explique Caroline Mini. Les notes permettent également à la marque de déterminer de futurs axes d’amélioration, notamment vis-à-vis des produits les moins bien notés.
Récemment, Picture a participé à la campagne de Clear Fashion, menée à l’occasion de la validation par la Commission européenne de l’Écobalyse, et consistant à calculer les scores environnementaux de tenues de plusieurs marques partenaires. « Nous voulons inciter les autres marques à faire de l’affichage environnemental la norme, afin qu’il devienne un levier pour faire bouger les lignes », appelle Caroline Mini.
En comparant ses produits à ceux de la fast fashion, la campagne met également en avant la marque, qui revendique une démarche environnementale.

Élisabeth Crépin-Leblond