Les Beaux Mets, un restaurant inauguré au sein des Baumettes qui favorise l’insertion des détenus et prévient la récidive

Le bus s’arrête en face de la « prison des Baumettes » dans le IXe arrondissement de la cité phocéenne, à côté du parc national des Calanques. Il faut longer le mur de l’enceinte pour atteindre l’entrée de la Structure d’Accompagner vers la Sortie (SAS), un établissement pénitentiaire créé en 2018. Celle des Baumettes est la première inaugurée en France et elle accueille en son sein le premier restaurant d’insertion en détention accueillant du public : Les Beaux Mets. 

Le premier restaurant au sein d’une prison

Ce lieu, inauguré le 22 novembre 2022, est placé sous la responsabilité de l’administration pénitentiaire, les clients doivent donc respecter ses règles pour garantir le bon déroulement de l’expérience. Les réservations doivent par exemple être faites maximum quatre jours avant pour que l’administration puisse vérifier les casiers judiciaires, comme l’explique Aurore Coulon, directrice de la SAS dans un dossier de présentation : « Les Beaux Mets est ouvert au public, mais nous restons en milieu pénitentiaire, avec des règles qui sont là pour assurer la sécurité de tous. Les spécificités de réservation ou d’accueil avant d’accéder au restaurant ont été pensées pour les respecter tout en facilitant le parcours des convives. »

Première étape, une fois la première d'entrée franchie, déposer tous ses effets personnels à l’accueil – argent liquide, téléphone, appareils photos – avant de passer le sas de sécurité et enfin entrer dans la SAS, installée dans l’ancien quartier des femmes. Le bâtiment a entièrement été rénové. Plus que quelques marches à grimper avant de pouvoir entrer dans le restaurant, ouvert du lundi au vendredi midi uniquement et qui peut accueillir jusqu’à 42 couverts.

Un restaurant bistronomique

L’intérieur du restaurant a été imaginé par un cabinet d’architecte, très chaleureux, aux couleurs orangées, répondant parfaitement aux codes d’un restaurant bistronomique. Nous sommes accueillis par l’un des 14 détenus salariés au sein du restaurant. Divisés en deux brigades, ils sont formés et travaillent aux côtés de la cheffe Sandrine Sollier en cuisine et Marc Balthazard, le maître d’hôtel.

La carte a de quoi faire saliver. Chaque mois, un plat signature imaginé par un.e chef.fe réputé.e est proposé aux clients. L’occasion d’organiser une master class avec l’ensemble du personnel afin de les former à sa réalisation. Les détenus, répartis entre la salle et la cuisine sont de vrais professionnels, soucieux des clients, attentifs à bien faire. 

Un chantier d’insertion porté par Festin

Les Beaux Mets est un chantier d’insertion porté par Festin. Les détenus sont salariés au sein de l’association et ont un contrat d’emploi pénitentiaire leur permettant d’être rémunérés à hauteur de 45 % du Smic. À termes, l’association souhaite accompagner 40 détenus par an. Ce partenariat entre le secteur associatif et l’administration pénitentiaire est le fruit de la rencontre avec deux initiatives européennes similaires, The Clink à Londres et In Galera à Milan. Une première expérimentation a également eu lieu au sein du tiers-lieu marseillais Coco Velten. 

Le chantier d’insertion prévoit également un programme d’accompagnement. Sur les 26 heures prévues dans le contrat, six sont réservées pour un suivi hebdomadaire des projets professionnels et personnels des détenus salariés au sein des Beaux Mets. 

Favoriser l’insertion et lutter contre la récidive

Pour les détenus, le secteur de l’hôtellerie-restauration est un moyen de remettre un pied dans le monde extérieur. En travaillant aux Beaux Mets, ils renouent avec une certaine displicine, des valeurs et un savoir-être qui leur sera utiles à l’extérieur. C’est d’ailleurs l’objectif de ce chantier d’insertion : les accompagner afin de favoriser leur insertion professionnelle à leur sortie et ainsi lutter contre les risques de récidive, comme l’explique Carole Guillerm, responsable du chantier d’insertion Les Beaux Mets au sein de l’association Festin : 

La cuisine est une activité professionnelle qui véhicule des valeurs d’organisation, d’engagement et de rigueur indispensables à un retour à l’emploi réussi.

Les Baumettes : première SAS de France

Le restaurant est dans la SAS qui est un quartier des Baumettes. Elle peut accueillir jusqu’à 80 détenus ayant un reliquat de peine entre six mois et deux ans. Ce type d’établissement pénitentiaire a vocation à prévenir la récidive, créer du lien avec l’extérieur et aussi, en accueillant du public, changer le regard de la société.

Outre le restaurant, le SAS des Baumettes accueille également un studio pour former les détenus aux métiers de l’audiovisuel. Au vu du succès rencontré par ces projets d’insertion, la SAS va prochainement inaugurer un théâtre pour permettre aux clients de prolonger leur expérience. 

Lisa Domergue