Loi « immigration » : les contributions au Conseil constitutionnel, dernière arme aux mains des associations
Dans la foulée de l’adoption de la loi controversée, universitaires, associations et syndicats se sont mobilisés pour présenter des contributions externes au Conseil constitutionnel qui doit examiner le texte avant le 25 janvier.
Adoptée, mais pas encore définitivement promulguée, la loi « immigration » continue de mobiliser ses opposants. Après avoir été voté par le parlement le 19 décembre dernier, le texte qui contient des dispositions « manifestement inconstitutionnelles » de l’aveu même du gouvernement, a été soumis à l’examen des juges de la rue de Montpensier.
« C’est une grande première qu’un président de la République et que le chef du gouvernement votent délibérément des dispositions dont ils savent et disent qu’elles sont inconstitutionnelles », s’indigne Marie-Christine Vergiat, vice-présidente de la Ligue des droits de l’Homme (LDH). « Il faut faire sortir ces dispositions qui portent atteinte tant au droit international qu’à notre Constitution », continue-t-elle.
Pour organiser la riposte juridique, un certain nombre de responsables associatifs, mais aussi d’universitaires ou de syndicats, se sont emparés de la possibilité offerte à toute personne physique ou morale d’adresser des contributions externes au Conseil constitutionnel. Ces dernières permettent d’alimenter la réflexion des sages en exposant les arguments juridiques au soutien de la censure des dispositions litigieuses. Le Conseil constitutionnel n’est toutefois pas tenu de répondre aux observations qu’elles contiennent.
Protection sociale, famille, asile… : de nombreuses dispositions contestées
En totalité, les contributions externes sont au nombre de 10 et traitent des sujets suivants : étudiants, mineurs non accompagnés, étrangers malades, rétention, asile, nationalité, protection sociale - hébergement d’urgence, légistique, contentieux judiciaire et famille.
L’association Forum réfugiés a participé à la rédaction de trois contributions sur le volet droit d’asile, rétention administrative des étrangers et protection sociale.
Concernant la rétention administrative, l'association critique son changement d’objet : circonscrite à l’éloignement de l’étranger visé par une obligation de quitter le territoire français, le nouveau texte en fait une modalité de privation de liberté de tout étranger qui constitue un trouble à l’ordre public. « Le Conseil constitutionnel qui veille au respect des libertés fondamentales devrait sans aucun doute censurer ce dispositif contraire au droit de ne pas être privé de sa liberté », nous affirme Laurent Delbos, responsable du plaidoyer au sein de Forum réfugiés.
Sur le volet « asile », elle conteste le recours à la vidéo audience pour la réalisation de certains entretiens, estimant qu'il n’offre pas les garanties nécessaires en termes de confidentialité.
La Ligue des droits de l’Homme, La Cimade, France terre d’asile ou le Secours catholique font également partie des nombreuses associations à s’être mobilisées.
Des tactiques différentes entre les associations
Dans un contexte où « le retrait du texte n’est pas à l’ordre du jour », « utiliser tous les outils à notre disposition pour que la loi soit la moins dure possible pour les étrangers » est la solution partagée par un certain nombre d’associations, nous explique Laurent Delbos.
Le Groupe d'information et de soutien des immigrés (Gisti), pour sa part, a décidé de ne pas produire de contribution extérieure, considérant que « l’ensemble de la loi transgresse des principes essentiels et que seul son rejet global est défendable », peut-on lire sur le site internet de l’association.
« Des tactiques différentes », qui ne doivent pas faire perdre de vue l’objectif commun : « se mobiliser contre un texte que l’on conteste depuis son origine », affirme la vice-présidente de la LDH.
En cas de validation partielle de la loi par le Conseil constitutionnel le 25 janvier – ce qui reste le scénario le plus probable –, le texte, dans sa version approuvée, sera promulgué par le président de la République et publié au Journal officiel. Les mesures n'impliquant pas de déclinaison réglementaire pourront alors être mises en œuvre dès le lendemain.
En attendant, les associations de défense des droits des étrangers continuent à appeler à la mobilisation de la population. Une nouvelle manifestation est prévue ce dimanche 21 janvier.
Félicité Dussel