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Par Carenews INFO - Publié le 8 octobre 2021 - 15:00 - Mise à jour le 8 octobre 2021 - 15:47 - Ecrit par : Christina Diego
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[Portrait] Céline, maman aidante de William atteint du syndrome de Prader-Willi

Céline est la maman de William, porteur d’une maladie grave et rare : le syndrome Prader-Willi. Elle est aussi psychologue de formation et a dû mettre de côté sa vie professionnelle pour se consacrer à l’éducation de son fils à plein temps. Récit.

Céline, maman aidante de son fils. Crédits : Céline Martinez
Céline, maman aidante de son fils. Crédits : Céline Martinez

 

 Je suis comme un poisson-pilote. Je suis dans le corps de mon enfant. Je vis sa vie et je vis la mienne en plus. C’est du non-stop. Je ne peux pas dire précisément quand commence ma journée avec William. »

 

C'est par ses mots que Céline débute son récit.  

Il y a 12 ans, William naissait, porteur du syndrome Prader-Willi, une anomalie du chromosome 15, maladie rare et parmi les plus graves. Des symptômes omniprésents qui ne laissent pas beaucoup de répit à sa mère, Céline, proche aidante. Elle vit au gré des émotions de son fils. 

William gère ses ressentis comme un enfant de deux ans. Chaque frustration, chaque changement engendrent de violentes réactions, des cris, très forts, des coups et surtout, il n’a pas de sensation de satiété. Un état qui envahit les journées et les nuits de la famille, nous explique Céline. 

« Mon fils a faim tout le temps. La maladie provoque un dérèglement hormonal grave qui induit chez lui un besoin constant de se nourrir. Cela veut dire des situations compliquées à gérer pour éviter qu' il mange sans arrêt la nuit notamment. Plus jeune, ayant une hypotonie du corps, je devais le porter pour le déplacer. Ou alors si nous étions en promenade en famille, il s’arrêtait et se mettait par terre. Je restais avec lui. Je me suis donc isolée petit à petit pour l’aider à vivre avec sa maladie. »

 

Une maladie qui isole

 

Quand William est né, Céline allait s’installer et ouvrir son cabinet de psychologue. Projet professionnel qu'elle a dû arrêter net quand elle a appris le handicap à la naissance de son fils.

Je me suis dit que je voulais avant tout sauver mon enfant. J'ai eu la chance de ne pas devoir travailler, mon mari ayant un travail stable. Au niveau personnel, je le regrette aujourd’hui. Je ne me sens pas une femme indépendante. Je ne peux pas travailler de façon classique avec des heures fixes. J’ai donc choisi d’être en freelance. Je suis constamment dans une gestion d’équilibriste entre ma vie d’aidante et de mère auprès de William et ma vie professionnelle. »

 

Très rapidement, Céline a l’impression de vivre dans une bulle avec son fils. Elle ne voit plus personne et se consacre entièrement à lui. La maman compense pendant les premières années le handicap de son fils, en faisant avec lui et pour lui tous les gestes du quotidien qu’il n’arrivait pas à réaliser. Elle montait dans le toboggan avec lui pour l’aider à glisser, le faisait marcher, etc. Un engrenage qui l’a conduite à la limite du burn-out. Céline décide alors de faire autrement. 

« J’ai utilisé la force de la maladie et j’ai fait avec. J’ai accepté la maladie de mon fils. Elle m’imposait des diktats, je les ai suivis. Mon fils ne voulait plus marcher, je m'asseyais avec lui et je lisais un livre. »

Difficile pour elle de savoir combien de temps elle consacre à William. « Je suis constamment en alerte, vérifiant sur mon téléphone si l’institut ne m’a pas contacté en urgence pour William ! », nous confie-t-elle. 

La vie sociale de cette mère courage s’est très vite réduite à des contacts via les réseaux sociaux avec ses ami.e.s. « Il m’a fallu dix ans pour vraiment commencer à lever la tête. J’ai eu une place dans un institut spécialisé en 2019 pour William. J’ai commencé à reprendre une activité professionnelle de quelques heures. » Elle a maintenu des liens sociaux malgré tout. Dès qu’elle le peut, elle rentre en contact avec les autres. Mais, c'est une vie sociale très particulière. 

J’ai des amis, mais en même temps je n’ai personne. Je ne peux pas inviter une copine à la maison. Mon fils ne me laisserait pas la recevoir facilement, il ne peut pas rester seul. »

 

Une vie en flux tendu

 

Pendant le premier mois de la crise sanitaire, Céline et William, et leur famille, étaient coupés du monde. Céline se souvient avoir eu des troubles de la mémoire, des maux de tête extrêmes, comme si son corps lui disait qu’elle vivait une situation anormale. 

 J’ai vécu en concentré et en condensé ce que vivent les aidants habituellement. Lors du premier confinement, tout s’est arrêté, William n’allait plus à l’institut et je n’avais aucune nouvelle de leur part pour l'occuper la journée. J’ai cru que j’allais mourir. J'étais comme enfermée dans un hôpital psychiatrique, mais sans soutien. William avait des troubles du comportement constamment, pour dormir, se nourrir, etc. C’était très dur. »

Depuis le déconfinement du printemps dernier, William a repris le chemin de l’institut, quelques heures le matin. Céline a quelques missions de freelance. Elle est devenue une aidante qui aide d’autres aidants.e.s. « Je suis consultante psychologue pour l’association La compagnie des aidants. J’ai un rôle d’écoute auprès des familles qui gèrent des enfants porteurs d’un handicap. Je passe également une heure par semaine sur une plateforme digitale d’écoute. C’est un premier pas qui permet de faire rentrer le monde extérieur dans la vie des aidants. Ils se sentent moins seuls. Cela leur permet de ne pas être dans un huis clos permanent avec leur enfant. » 

Quand on lui demande comment pallier le sentiment d'isolement social des aidant.e.s, Céline précise qu’il manque avant tout des moments de convivialité plus inclusifs.  

Je n’ai pas envie d’être qu’entre aidant.es. C’est très bien les Cafés d’aidant.e.s. Je pense qu’il faut dépasser l'entre soi. J’ai aussi envie d’être avec des copines qui n’ont pas d'enfants handicapés, pour parler d’autre chose », conclut-elle.

 

Signe que la vie sociale est possible en dehors de l’aidance.

 

Christina Diego 

 

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