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Par Carenews INFO - Publié le 26 octobre 2023 - 12:10 - Mise à jour le 30 octobre 2023 - 18:29 - Ecrit par : Théo Nepipvoda
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Railcoop placée en redressement judiciaire : symbole des difficultés des coopératives à trouver des financeurs

La coopérative ferroviaire dispose de six mois pour trouver des financements et ainsi garder l’espoir d’ouvrir la ligne Lyon-Bordeaux en 2024.

Une ligne Lyon-Bordeaux devait ouvrir en 2024. Crédit : iStock.
Une ligne Lyon-Bordeaux devait ouvrir en 2024. Crédit : iStock.

 

Sursis pour la coopérative ferroviaire Railcoop. Elle évite la liquidation judiciaire puisqu’elle a été placée en redressement judiciaire le 16 octobre par le tribunal de commerce de Cahors (Lot). Elle dispose désormais de six mois pour se recapitaliser et boucler le tour de table financier pour ouvrir sa première ligne de trains.

« Ce qui vient de se passer c’est plutôt une bonne nouvelle car cela veut dire que le tribunal estime qu’il y a des perspectives de redressement. Sinon, il aurait fait une liquidation judiciaire », tempère Cyril Rocher, directeur de l'Union régionale des Scop Occitanie - Midi-Pyrénées, qui a suivi le dossier. 

 

Ouvrir une ligne Lyon-Bordeaux en 2024

Le projet lancé en 2019 était ambitieux. Profiter de l’ouverture à la concurrence du rail pour relancer la ligne ferroviaire Bordeaux-Lyon arrêtée par la SNCF en 2014. Elle permettrait de desservir dix villes dont Limoges, Périgueux ou encore Roanne. Plusieurs fois repoussé, le premier trajet devait finalement avoir lieu à l’été 2024. La coopérative basée à Figeac prévoyait ensuite d’ouvrir dix autres lignes partout sur le territoire. 

D’autant plus ambitieux que le projet est coopératif. Raicoop est une société coopérative d’intérêt collectif basée sur le multisociétariat, c’est-à-dire qu’elle réunit différents types de sociétaires regroupés en collèges selon leur profil.

 

Des déconvenues financières

Mais tout ne s’est pas passé comme prévu puisque la structure a enchaîné les déconvenues. En 2022, elle a accumulé 4,3 millions d’euros de pertes à cause de l'échec commercial d’une ligne de transports de marchandises entre Figeac (Lot) à Toulouse (Haute-Garonne) ouverte en 2021. Elle s'est finalement arrêtée en avril 2023. Récemment elle a échoué à recueillir 500 000 euros auprès des sociétaires pour payer les salaires et les prestataires. Railcoop a également été freinée par les contraintes techniques imposées par la SNCF.

La coopérative peine également à attirer les investissements. Pourtant, elle a besoin de 49 millions d’euros pour lancer la ligne Lyon-Bordeaux, notamment pour l’achat des rames. Depuis son lancement, elle a réussi à attirer près de 15 000 sociétaires ayant acheté des parts à 100 euros. 

 

Un manque de soutien des acteurs financiers 

Mais la coopérative s’est vue refuser l’accès à des prêts de la part de banques, pourtant nécessaires, puisque trop peu de régions se sont portées garantes. La solution qui est donc apparue est la recherche de fonds propres auprès d’acteurs privés. Mission complexe.

 


Maud Sarda (Label Emmaüs) : « Plus on a de l'impact plus c’est difficile de convaincre les investisseurs et ce n’est pas normal » 


 

« On ne va pas dire que l’ESS attire les investisseurs puisqu’elle est en recherche de capital patient et non d’une rentabilité interne rapide », considère Cyril Rocher. « Il y a une défiance des investisseurs car les projets de l’économie sociale et solidaire ne sont pas capitalistiquement intéressants », continue-t-il. Or, un tel projet nécessite un afflux de financements importants.

Peu d’acteurs financiers sont spécifiquement positionnés sur l’économie sociale et solidaire. « Les banques vont chercher de la notoriété en étiquetant des produits comme solidaires. Mais ces outils financiers n'existent pas vraiment »

 

Une remise en cause des grands projets capitalistiques de l’ESS ?

Dès lors, peut-on imaginer aujourd’hui de grands projets capitalistiques de l’ESS ? « Si l’on souhaite créer un constructeur automobile coopératif, cela va être compliqué. C’est tellement capitalistique que ce n’est pas possible de le réaliser », illustre Cyril Rocher.

Actuellement, des discussions seraient en cours avec un fonds d’investissement espagnol Serena Partners. Pour conclure le deal, deux nouvelles structures pourraient être créées, l’une dédiée à la commercialisation et l’autre à l’achat et l’entretien des rames. Le fonds deviendrait actionnaire majoritaire des deux entités et la coopérative minoritaire. Il s’agirait alors d’une limitation du pouvoir coopératif mais qui permettrait de faire perdurer le projet . Un tour de table auprès d’autres investisseurs privés pourrait être réalisé pour compléter. Lors d’un conseil d’administration, 85 % des sociétaires avaient voté pour la poursuite des négociations avec le fonds industriel.

Début octobre, Railcoop a écrit à Emmanuel Macron pour demander à l’État de rentrer au capital. « La fonction régalienne de l’État ne s’est jamais appliquée à l’ESS, il n’y a jamais d’intervention directe pour les coopératives en difficulté », se désole Cyril Rocher. « Sur Scopelec, l’État n’a absolument rien fait. »

L’objectif est désormais l’ouverture de la ligne en décembre 2024.

 

Théo Nepipvoda

 

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