Mécénat culturel : comment La Poste soutient-elle le Grand Tour de l’Orchestre National de France ?
Faire vivre la musique classique et démocratiser la culture sur l’ensemble du territoire français. C’est l’objectif de l’accord de mécénat signé par Radio France et par La Poste. Cette dernière est désormais le mécène principal de la tournée de concerts de l’Orchestre National de France pour les saisons 2022 - 2023 et 2023 - 2024. Présentation d’un ambitieux projet.
Le 24 mai dernier, Radio France et La Poste ont annoncé la signature d’un accord de mécénat pour soutenir le Grand Tour de l’Orchestre National de France (ONF) pour les deux saisons à venir. L’objectif : rappeler que cet orchestre symphonique d’une centaine de musiciens est « l’orchestre de toute la France » en organisant des concerts sur l’ensemble du territoire.
Restaurer le lien social
« Nous créons du lien avec et entre les populations », résume Denis Francillon, directeur Communication de la Branche Grand Public et Numérique à La Poste. « Radio France le fait sur les ondes et La Poste en permettant les échanges via les services postaux et de téléphonie mobile. » Les deux entreprises de service public sont attachées à leur ancrage territorial. Ce projet commun est un autre moyen pour elles de favoriser les échanges et les interactions sociales entre les habitants de territoires parfois plus isolés.
Faire se déplacer l’ONF, c’est donner une occasion aux personnes de se rassembler autour de la musique. Dans chacune des villes qui accueillera l’orchestre, une partie des postiers aura la possibilité d’assister aux concerts et même de rencontrer les musiciens. La tournée sera l’occasion de moments de partage dans l’ensemble du territoire.
Ces échanges seront aussi enrichissants pour les musiciennes et les musiciens. Comme l’explique Denis Bretin, secrétaire général de la Direction de la Musique et de la Création à Radio France : « Il y a aussi un effet retour sur les musiciens qui sont à chaque fois impressionnés par l’accueil qui leur est réservé. » Les tournées dans les territoires leur donnent l’occasion de revenir dans leur région d’origine ou dans celle où ils ont été au conservatoire, restaurant ainsi un lien qui peut parfois sembler distendu entre Paris et le reste du pays.
Pour une réduction des fractures entre les territoires ?
Organiser une tournée de l’orchestre symphonique dans les régions, c’est aussi permettre à un plus grand nombre de Français d’accéder à des services dont ils ne bénéficient pas d’ordinaire. En cela, le projet permet de réduire les fractures entre les territoires en permettant à des personnes n’habitant pas Paris d’accéder à la musique symphonique.
Si Radio France œuvre déjà pour diffuser la musique classique sur les ondes grâce à près de 300 concerts captés et diffusés gratuitement sur ses diverses plateformes, cet engagement conserve ses limites. « Rien ne remplace le contact physique » rappelle Denis Bretin. « Si vous habitez certaines villes, vous avez peu ou pas d’occasions d’entendre une grande formation symphonique. » Une découverte qui, selon lui, surprend souvent le public. « Après avoir entendu pour la première fois des fortissimos lors d’un concert symphonique, beaucoup disent qu’ils n’auraient pas imaginé qu’un orchestre puisse dégager un tel son ! » Sans la tournée de l’ONF, de nombreux Français ne pourraient jamais entendre résonner dans toute leur splendeur des chefs-d'œuvre comme La Symphonie Fantastique de Berlioz ou Le Sacre du Printemps de Stravinsky.
Mais déplacer un orchestre symphonique n’a rien d’évident. Le transport des musiciens, des instruments peut s’avérer coûteux et de nombreuses salles ne disposent par exemple pas de plateaux assez vastes pour accueillir plus d’une centaine de personnes. L'investissement de La Poste joue donc un rôle clef et rend possible le « Grand Tour » pour les saisons 2022 - 2023 et 2023 - 2024. « Ce qui nous a le plus séduits, c’est cette proposition d’aller vers les populations au cœur des territoires pour démocratiser la musique symphonique », raconte Denis Francillon.
Le résultat est plus que concluant : « Nous réussissons à donner de grands concerts dans des allées qui ne sont pas spontanément faites pour les accueillir », résume Denis Bretin. « En plus, nous ne nous contentons pas d’un « demi-programme » ! La programmation et les solistes sont les mêmes qu’à Paris. » Parce qu’il permet cette tournée exceptionnelle, l’accord de La Poste et de Radio France contribue à la réduction des fractures et des inégalités entre Paris et les territoires.
Une mission pédagogique de démocratisation culturelle ?
Au-delà d’un simple accès à la musique classique, « Le Grand Tour du National » sera l’occasion, selon Sibyle Veil, la Présidente-directrice générale de Radio France, de « faire connaître notre patrimoine musical à encore plus de Français ».
L’objectif du Grand Tour : rendre sensibles à la musique classique le plus de Français possible. Après avoir entendu l’orchestre symphonique, les membres du public se mettront peut-être à écouter les captations et les podcasts accessibles sur Radio France. « Notre objectif est de créer des habitudes chez les personnes. Le Grand Tour est plus qu’un événement ponctuel ou une opération de communication : il s’insère dans un dispositif global », déclare Denis Bretin.
Au-delà d’une simple sensibilisation à la musique classique, il s’agit aussi d’organiser et de soutenir des actions culturelles en région. Des « programmes pédagogiques » vont être mis en place avec les écoles et les conservatoires locaux. Les étudiants auront la possibilité de rencontrer les musiciens de l’orchestre lors d’ateliers pratiques ou de sessions d’échange autour des morceaux qui auront été joués. « C’est génial pour les jeunes d’avoir un contact avec les musiciens ! », explique Denis Bretin. « Un collégien de douze ans, si tant est qu’il ait l’envie de devenir musicien classique, il faudrait déjà qu’il puisse en avoir l’idée. Quand je parle avec des musiciens, c’est souvent une rencontre ou un concert qui a provoqué un déclic chez eux. Le Grand Tour fera peut-être naître des vocations. »
Maxime Dhuin