La Maison des familles, une ressource pour les familles vulnérables
Imaginez des lieux d’accueil et de soutien à la parentalité. Des lieux chaleureux, ouverts aux familles en situation de précarité, pour leur permettre de souffler, de se ressourcer, de créer du lien... Ces lieux existent, ce sont les Maisons des Familles. Il en existe 20 en France, dont 7 sont soutenues par la fondation The Human Safety Net (THSN) de Generali. Rencontre avec Karine Schoumaker, la responsable de la Maison des Familles de Bordeaux.
- Pouvez-vous nous présenter les Maisons des familles ?
Nos structures s’inspirent d’un programme québécois, les Organismes Communautaires des Familles, qui existent depuis 40 ans. Ces lieux de soutien à la parentalité accueillent les familles avec l’idée de proposer non pas un accompagnement descendant, mais un accompagnement de pair à pair.
En 2009, les Apprentis d’Auteuil ont voulu déployer ce programme en France. Trois Maisons des Familles ont d’abord vu le jour à Grenoble, Amiens et Marseille. Aujourd’hui, il y en a 20 et nous sommes présents dans toutes les régions françaises. Chaque structure s’adapte en fonction du territoire et du public accueilli, mais nous avons tous une philosophie commune qui repose sur la solidarité, l'entraide, le soutien, l'implication et la valorisation des expériences parentales.
- À Bordeaux, comment fonctionne votre Maison des Familles ?
Notre Maison a été créée en 2015. L’équipe est constituée de deux salariés (une directrice et une animatrice socio-culturelle) et d’une dizaine de bénévoles de tous âges qui viennent nous aider.
Nous nous adressons à des familles en situation de précarité, qui ont essentiellement des problèmes d’hébergement, qui peuvent vivre dans des squats, des hôtels ou dans la rue. Nous proposons un lieu sécurisé pour les enfants et les parents, ouvert à tous de 10h à 17h. Comme une vraie maison, nous disposons d’une cuisine, d’une salle de bain, d’un salon, d’une salle de jeux et d’un petit jardin. Nous sommes aussi un lieu « Relais popote », ce qui permet aux parents de cuisiner et de préparer les repas pour les enfants et de manger sur place ou de repartir avec leur plat. C’est important quand on vit dans un squat ou dans un appartement insalubre.
- À quelles difficultés sont confrontées les familles que vous soutenez ?
Quand les parents arrivent chez nous, ils sont dans l’urgence, et surtout, ils ont un énorme sentiment de culpabilité vis-à-vis de leurs enfants. Ils ne sont pas défaillants, bien au contraire, mais ils sont dans une telle logique de survie quotidienne qu’ils ont parfois du mal à poser un regard bienveillant pour faire grandir leurs enfants, les encourager et partager des moments de qualité avec eux. Notre rôle, c’est de leur redonner confiance et de revaloriser leurs compétences de parents. Au lieu de souligner les manques des familles, nous nous appuyons sur leurs points forts, leurs capacités.
C’est une approche qui fonctionne ! Cela permet de désamorcer certaines situations à risques et nous avons des retours très positifs des parents.
- Quel est le profil des familles ?
Nous accueillons entre 130 et 150 familles par an, surtout des enfants de 2 ou 3 ans, avant leur entrée à l’école. 40 % de ces familles sont en parcours migratoire, 60 % sont stabilisées, essentiellement des personnes réfugiées. Ce sont surtout les mamans qui viennent chez nous, avec ou sans leurs enfants, pour se ressourcer et s’autoriser un sas de décompression, un moment d’échange avec d’autres adultes. Les papas ne sont pas absents pour autant, mais ils sont souvent au travail.
- En plus d’être un lieu d’accueil, vous proposez de nombreuses activités, lesquelles ?
Toutes sortes d’ateliers (nutrition, jardinage, couture...), des sorties culturelles, des lectures à la bibliothèque, de l’accompagnement scolaire, de la médiation animale comme l’équithérapie… Tout ce qui permet de créer du lien et du partage entre les enfants et les parents. Nous avons même organisé un séjour à Arcachon.
Pour cela, nous travaillons avec plus de 50 partenaires : PMI, Samu social, ARS, bibliothèques, écoles, associations…
- Vous allez monter deux projets cette année, soutenus par The Human Safety Net (THSN), pouvez-vous nous en parler ?
Le premier, « Aller vers », est un programme pour aller rencontrer de nouvelles familles et parler de nos actions dans la ville. Pour cela, nous avons acheté un vélo cargo pour monter des animations au pied des immeubles, dans les parcs…
Le second est un projet de Maison des Familles mobile pour toucher les familles en zone rurale, qui sont confrontées aux mêmes problématiques autour de la précarité et de la parentalité. Notre camion aménagé devrait être prêt à la fin de l’année.
Au travers de ces nouvelles initiatives, notre objectif est d’aller au-devant des familles qui peuvent avoir des besoins, et faire encore plus largement connaître nos Maisons.