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Par Carenews PRO - Publié le 16 juillet 2020 - 13:00 - Mise à jour le 16 juillet 2020 - 13:00
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Quels lendemains pour le mécénat ?

Pour le président d’Admical François Debiesse, la crise sanitaire a suscité un véritable élan de générosité et de solidarité : tandis que l’État multipliait les plans de sauvegarde, entreprises mécènes et philanthropes ont su rassembler ou réorienter des ressources pour répondre aux besoins les plus urgents. Responsabilité du public et engagement du privé se sont combinés pour limiter autant que possible les risques et atténuer les effets de la crise sur nos existences. Mais qu’en sera-t-il demain, quand la vie « normale » aura repris son cours, et quelles leçons tirer de ce que nous venons de vivre ?

François Debiesse, président d'Admical. Crédit photo : Admical.
François Debiesse, président d'Admical. Crédit photo : Admical.

Un premier constat s’impose : l’intérêt général est l’affaire de tous. Certes, l’État en est le garant suprême et de fait, il a su, dans un contexte dramatique et inconnu jusqu’alors, prendre ses responsabilités pour préserver au mieux l’intérêt général, retrouvant ainsi une légitimité, un crédit que les années antérieures avaient largement érodé. Mais la preuve est faite aussi, qu’exsangue et endetté, il ne pourra plus tout faire, ni être cette providence qui fit la force et l’image dans le monde du « modèle social français ». Désormais, la puissance publique — État et collectivités — doit jouer un rôle majeur dans l’indispensable reconstruction à venir mais aussi dans la définition d’un nouveau modèle socio-économique plus équilibré, plus juste, plus durable vers lequel il est nécessaire d’aller ensemble. 


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Vers un « Grenelle social » ?

Ensemble, oui, car une véritable concertation est nécessaire. Il faut la mise en œuvre d’une intelligence collective, d’une vraie réflexion sur ce qu’est l’intérêt général, sur la société dans laquelle nous voulons vivre, en tirant les leçons de ce qui nous est arrivé (et pas seulement depuis mars dernier...). Qu’on le nomme « Grenelle social » ou autrement, il y a là un point de passage incontournable et urgent pour affronter et réparer les fractures grandissantes de la société française. Si le privé n’a pas à se substituer à l’État dans ses fonctions régaliennes, s’il n’a pas à en pallier les carences financières, il est clair que ses différentes composantes, les associations, les entreprises et les citoyens, auront un rôle à jouer dans le redémarrage économique et la reconstruction sociale. Et cela alors que les moyens des uns et des autres seront plus limités et sans doute orientés vers des priorités individuelles jugées plus urgentes que le vaste bien commun.

Le monde associatif est essentiel dans le fonctionnement de notre société, et ce dans tous les domaines de la vie sociale. Il se retrouve aujourd’hui dans une situation de grande précarité, confronté à un risque majeur d’effondrement de ses ressources financières tant publiques que privées. Les entreprises sont elles aussi plongées dans un véritable casse-tête économique : leur trésorerie asséchée, elles multiplient licenciements et plans sociaux, prolongent le chômage partiel, bloquent toutes dépenses d’investissement pour éviter une faillite pas toujours évitable. Quant aux particuliers, beaucoup d’entre eux se trouvent en situation incertaine, voire précaire, ce qui les pousse plus à l’attentisme, voire au repli sur soi.     

L’engagement collectif comme réponse à la crise      

Alors, si l’on veut sortir de l’impossible équation des besoins qui augmentent et des ressources qui baissent, sans pour autant rêver à des lendemains qui chantent, il n’y a qu’une solution, qu’un levier : l’engagement collectif. Après cette crise sanitaire (enfin, espérons-le !), il est absolument fondamental, et sur une longue période, que le réflexe d’engagement, apparu spontanément pendant le confinement, perdure, et que chacun, à la mesure de ses moyens, mette sa pierre à la reconstruction de l’édifice.

L’État doit continuer de jouer un rôle de guide sur l’intérêt commun et les attentes de la société, mais dans une concertation et une écoute qui ne soient pas de façade. Cela renforcera nécessairement le rôle des collectivités territoriales, le centralisme de tradition chez nous montrant à l’envi ses limites et même ses dangers. Et cela devra passer par une reconnaissance affirmée et loyale du rôle que le mécénat et la philanthropie jouent, et doivent jouer encore davantage dans l’intérêt général. 

Le mécénat comme levier d’ancrage territorial     

Les entreprises doivent continuer de s’engager malgré les difficultés économiques qu’elles affrontent, dès lors que leur situation le permet. D’abord parce que leur engagement n’est pas nécessairement financier, mais peut aussi prendre la forme d’un apport de compétences ou de biens. Ensuite, parce que le mécénat permet la création de liens très utiles à l’entreprise pour s’ancrer dans son territoire. Enfin, parce que la société de demain ne sera plus équilibrée que si les entreprises participent massivement à cette nécessaire évolution en s’engageant sur de nombreux aspects clés de leur fonctionnement propre et de la vie sociale (gouvernance, partage de la richesse créée, parité, diversité, développement durable, éthique professionnelle...). Telle est la responsabilité désormais attendue de l’entreprise. 

Quant aux citoyens, leur engagement n’est pas moins indispensable, et il peut prendre des formes très diverses selon les multiples situations sociales : philanthropie ou « grands dons » pour les plus fortunés, normalisation du don (à géométrie variable) pour beaucoup, bénévolat pour le plus grand nombre afin de faire fonctionner le monde associatif qui en a tant besoin. 

Et il faudra enfin réussir à prioriser les besoins du monde associatif dans la construction de ce nouvel ordre social, dans une vision à moyen-long terme inexistante aujourd’hui. Et ce en couvrant tous les domaines de la vie, y compris l’environnement bien sûr, ou la culture, en grande détresse aujourd’hui et trop oubliée ces derniers temps, alors qu’elle est un facteur majeur d’intégration sociale, tout comme le sport.

Développer le mécénat dans les entreprises françaises           

Alors oui, le mécénat est plus important que jamais. Oui la sortie de crise passe nécessairement par son développement. Oui il doit se répandre dans tous types d’entreprises (rappelons que moins de 10 % des entreprises françaises étaient mécènes en 2018 d’après le baromètre Admical). Oui, il doit irriguer tous les territoires, accompagnant les efforts de développement territorial auquel s’attachent la Banque des Territoires, la BPI et d’autres grandes institutions financières ou industrielles. Plus répandu, plus local, plus collectif, plus efficace, dans l’éthique et la transparence, tel sera le mécénat de demain, et c’est à le construire qu’Admical s’emploie. 

Nous avons pu réaliser une première étude concernant l’impact de la crise sur l’engagement des entreprises (publiée le 23 juin dernier), qui a démontré la volonté des mécènes d’agir et de s’engager pour répondre à l’urgence, et la force du collectif...mais qui a aussi souligné les incertitudes inquiétantes qui pèsent sur l’avenir du mécénat à court et même à moyen terme notamment sur la capacité d’engagement des PME et ETI. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de consacrer notre Mécènes Forum 2020, le 24 novembre prochain au Collège de France, à ce thème : « Le mécénat au défi de la crise ». Tel est le sujet de réflexion que nous vous proposons, pour tenter de répondre aux grandes questions de société que nous devons affronter ensemble. 

François Debiesse, président d’Admical 

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