Cadeaux de Noël : seconde main, premier choix
L’achat de cadeaux d’occasion à Noël se développe et devient de plus en plus accepté, selon un baromètre réalisé par l’Ifop pour Leboncoin cette année. Mais il s’agit parfois d’un choix contraint, encore loin de se généraliser.
De « belles pièces de décoration », des bijoux, des livres, des vêtements... À 27 ans, Marion Soissons achète la majeure partie de ses cadeaux en seconde main. « Si quelqu’un veut spécifiquement quelque chose, il y a tellement d’alternatives en ligne pour le trouver ! », assure l’attachée de presse, qui vit « entre Toulouse et Paris » et fréquente aussi des brocantes, des boutiques Emmaüs ou de la Croix-Rouge. Si elle ne précise pas toujours qu’elle offre de l’occasion, ses cadeaux réjouissent généralement. « C’est valorisé parce que j’y ai passé du temps. J’ai toujours aimé le concept de chercher et de fouiller », souligne-t-elle.
« Chaque année, depuis que Label Emmaüs a été créé il y a neuf ans, septembre à décembre est la plus forte saison », constate Maud Sarda, directrice générale de cette plateforme de vente en ligne d’objets de seconde main, dont Marion Soissons est une adepte. Parmi les produits à succès pendant cette période : les jeux et jouets notamment, mais aussi la décoration, les vêtements et les équipements électroniques. « Ce qu’il faut relativiser, c’est que depuis deux ans, les chiffres sont plutôt en baisse. Nous avons une concurrence très forte des ventes entre particuliers, mais aussi du low cost. Quand on peut acheter du neuf pour moins cher, on l’achète encore », estime Maud Sarda.
Une petite moitié (45 %) des 2 007 répondants à un sondage de l’Ifop pour Leboncoin réalisé en octobre déclare avoir déjà offert de la seconde main par le passé. Une pratique plus répandue chez les catégories « pauvres » ou « modestes » et chez les jeunes. Première motivation mentionnée : le prix, par un offreur sur deux. Le choix de la seconde main peut d’ailleurs être contraint, puisque 20 % d’entre eux ont ressenti de la gêne ou de la honte en offrant leur cadeau d’occasion.
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Des émissions de gaz à effet de serre principalement dues aux cadeaux
D’après ce sondage, la pratique se diffuse : plus de la moitié (52 %) de ceux qui ont déjà offert des cadeaux d’occasion ont commencé il y a moins de trois ans. C’est le cas de Julie Chopin : il y a « deux ou trois ans », son compagnon demande « à tous ses proches de lui offrir des cadeaux de seconde main ». « Je me suis rendu compte qu’on trouvait des choses très qualitatives ! Des gens revendent même des produits avec étiquette. Je n'offrirai pas un cadeau s’il est très usé », précise la chargée de production de 31 ans, qui habite Angers. Trouver des objets adaptés dans les temps « demande un peu d'organisation », souligne-t-elle cependant.
Pour Julie Chopin, comme pour 38 % des personnes interrogées par l’Ifop pour Leboncoin, les motivations sont avant tout écologiques. Comme l’indique l’Ademe, les cadeaux représentent 57 % des émissions de gaz à effet de serre des fêtes de fin d’année, soit plus que le transport et l’alimentation combinés, deux domaines qui peuvent pourtant être particulièrement émetteurs.
Une suspicion de radinerie ?
Estelle Shanon, 35 ans, offre « en priorité » de l’occasion à son conjoint, à sa mère et à sa sœur, pour des raisons économiques, mais aussi pour limiter l’impact social et environnemental de ses achats. Pour les plus jeunes en particulier : « les enfants ne s’en rendent pas compte si c’est en bon état ! Pour les bébés, les cadeaux ne durent qu’un ou deux mois, les jouets ne sont utilisés que trois ou six mois, je ne vois pas bien l’intérêt d’acheter du neuf », affirme-t-elle. Dernière acquisition : le sabre laser dont rêvait sa nièce, trouvé en ligne pour 15 euros.
Mais la consultante, spécialisée sur les questions de durabilité, ne met pas systématiquement des produits d’occasion sous le sapin. « C’est peut-être un petit peu moins dans les habitudes de ma famille étendue. Je leur offre plutôt de l’upcyclé [des produits recyclés en les transformant, pour en modifier l’esthétique ou l’usage] ou des créations d’artisans locaux. Si j’achète un livre et qu’ils se rendent compte qu’il a déjà été lu, ils vont peut-être se dire que je suis un peu radine ! », pense-t-elle.
Une pratique encore limitée
Quatre répondants sur dix au sondage de l’Ifop jugent encore qu’il est « choquant » d’offrir de la seconde main à Noël. « Si l’objet d’occasion n’est pas perçu comme un objet de rebut dans un contexte de consommation courante, il peut le devenir pour un cadeau (sauf si c’est un objet de collection ou un objet de luxe que l’offreur n’aurait pu acheter neuf) », soutiennent les auteurs d’une étude réalisée par le Crédoc et l’université Paris-Dauphine pour l’Ademe, publiée début 2023.
« Ce qui est important, pour moi, c’est le geste : un cadeau, c’est neuf », explique par exemple Antoine, 31 ans, entrepreneur parisien. « Pour les vêtements, c’est rédhibitoire ! », détaille-t-il. Deux exceptions : si l’occasion se justifie par un prix trop élevé – on lui a déjà offert une planche de snowboard, très coûteuse neuve – ou par la nature vintage du cadeau. « Un sac vintage, un vinyle, je suis 100 % pour ! La dimension historique donne du charme », illustre-t-il, déclarant aussi avoir reçu avec plaisir un appareil photo argentique.
Si la seconde main a suscité un « débat » sur le groupe de discussion avec les membres de sa famille, de toute façon, elle n’est pas entrée dans leurs habitudes en matière de cadeau. Ils ne sont apparemment pas les seuls. Cette année, seuls 35 % des sondés de l’Ifop envisagent d’acheter des cadeaux d’occasion, dont 6 % avec certitude.
Célia Szymczak 