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Par Carenews INFO - Publié le 24 juin 2025 - 18:30 - Mise à jour le 24 juin 2025 - 18:50 - Ecrit par : Elisabeth Crépin-Leblond
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En Bourgogne, les acteurs de l’agriculture biologique défendent leur modèle devant Maxime Baduel

Le délégué ministériel à l’économie sociale et solidaire s’est rendu dans l’Yonne mardi 10 juin, invité par la coopérative Biocoop à découvrir l’écosystème local. Les acteurs présents ont défendu un modèle coopératif ambitieux à l’échelle locale comme nationale, alors que la situation des producteurs bio est encore difficile et que la Stratégie nationale de l’ESS est en cours de préparation.

Germinal est une coopérative de consommateurs dont les magasins sont membres du réseau Biocoop. Crédit : Elisabeth Crépin-Leblond
Germinal est une coopérative de consommateurs dont les magasins sont membres du réseau Biocoop. Crédit : Elisabeth Crépin-Leblond

 

« Il y a une indifférence politique vis-à-vis de la bio », estime Christelle Garnier, agricultrice dans l’Yonne, également vice-présidente du label Bio Equitable en France et administratrice de Biocoop. La coopérative de magasins bio a organisé une visite d’une partie de son écosystème en Bourgogne à destination du délégué ministériel à l’économie sociale et solidaire, Maxime Baduel.  

Au programme : découverte d’un magasin Germinal, une coopérative de consommateurs fondée dans les années 1970 et parmi les pionniers du réseau Biocoop ; rencontre avec les acteurs d’une expérimentation locale de sécurité sociale de l’alimentation ; visite de la coopérative agricole 100 % bio Cocebi et de l’usine adjacente Avena Bio ; et enfin accueil dans l’exploitation de Christelle Garnier où sont cultivées des céréales et élevés des poulets. 

  

Un contexte économique encore difficile pour l’agriculture biologique 

  

« Cette visite de terrain résulte d’un échange qui a lieu l’année dernière. Elle a pour but de mieux appréhender Biocoop, de faire découvrir les spécificités du modèle collaboratif, de souligner les problématiques que nous rencontrons mais aussi de montrer des solutions et de trouver les bons interlocuteurs », explique Dalila Habbas, délégué générale du Fonds de dotation Biocoop.  

Ces dernières années, le secteur de l’agriculture biologique français a fait face à une forte crise. Celle-ci était liée à une production en augmentation, notamment pour les cultivateurs de céréales bio, au moment où la consommation s’est mise à ralentir, après des années de croissance exponentielle. 

Alors que la demande en alimentation bio commence à remonter et que les producteurs doivent amortir les investissements mis en place pour accompagner le développement pré-crise, 2024 a été une année faible en rendement, en raison des conditions climatiques. « Il y a un cumul des difficultés », pointent les membres de la coopérative Cocebi devant le délégué ministériel.  

Pour ces agriculteurs bio, l’un des points à ajuster est celui des aides à la conversion. Dans un contexte où l’Europe s’est fixé un objectif de 25 % de ses surfaces agricoles cultivées en agriculture biologique d’ici à 2030, ils  estiment ces ambitions trop élevées face à un manque d’accompagnement des producteurs convertis, créant une déstabilisation du marché. « Il n’y a pas assez d’aides pour les débouchés. Si le gouvernement encourage à passer au bio, il doit aussi y avoir une valorisation des produits. Sinon on risquera encore de vendre du bio en conventionnel », argumente Julien Bourgeois, vice-président de la Cocebi. « Certaines grandes exploitations convertissent une partie en bio, touchent les aides, puis font machine arrière », dénonce quant à elle Christelle Garnier.  

 

christelle garnier champs
Les champs de l'exploitation de Christelle Garnier. Crédit : Elisabeth Crépin-Leblond

 

 

La construction de filières réunissant l’amont et l’aval : l’exemple d’Avena Bio mis en avant 

 

Dans ce contexte, Biocoop et les coopératives associées souhaitent d’autant plus défendre le modèle du bio, basé notamment sur l’exclusion des pesticides de synthèse et la rotation longue des cultures, auprès du responsable ministériel. « Il y a une inadéquation entre les apports environnementaux de l’agriculture biologique et la conjoncture économique », dénonce Christelle Garnier.  

Ils mettent également en avant la construction de liens intrarégionaux pour permettre aux filières françaises de se structurer, via l’adoption du modèle coopératif. « Il faut une vue plus globale, qui permette de lutter contre la concurrence déloyale et d’accompagner les investissements nécessaires. L’enjeu du bio est un enjeu de territoire », défend Julien Bourgeois.  

La Cocebi, par exemple, compte 290 adhérents, représentant entre 13 000 et 14 000 hectares de cultures, et cumule entre 20 et 25 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel. Avec deux autres coopératives de production, situées en Lorraine et en Normandie, ainsi qu’avec les sociétés Favrichon, Cereco et Biocoop, la coopérative bourguignonne a investi dans la création de l’usine de floconnage d’avoine Avena Bio. 

 

Avena Bio usine
L'usine de floconnage Avena Bio est adjacente à la coopérative Cocebi. Crédit : Elisabeth Crépin-Leblond

 

Située juste en face des entrepôts de la Cocebi, cette usine fabrique de la farine et des flocons destinés à la production de muesli. Une manière de relocaliser un processus auparavant réalisé à l’étranger, ainsi que de garantir des prix justes pour les producteurs grâce à des contrats de long terme et à une certification l’usine sous le label Bio équitable en France. Ce projet a reçu plusieurs subventions, dont 1 million d’euros de la part du Fonds européen agricole pour le développement rural, 700 000 euros de France Relance et de l’Agence bio ou encore 300 000 euros de l’Agence de l’eau Seine Normandie.

  

La stratégie nationale de l’ESS en perspective 

  

De son côté, Biocoop met en avant auprès du délégué ministériel « un cahier des charges mieux-disant » de sa marque par rapport au label AB (le label bio européen), car il exclue le recours aux travailleurs détachés, le transport en avion ou encore le sucre et le sel caché présents dans l’alimentation. Le réseau, qui a bénéficié d’un report des consommateurs bio à la suite d’un déférencement par la grande distribution, permet en outre de privilégier les producteurs partenaires sans pénaliser les producteurs locaux grâce à son programme de fidélité, défend Frédéric Faure, le vice-président de Biocoop. 

Ces divers engagements sont présentés devant la délégation ministérielle, qui réalise ses visites dans la cadre de la préparation de la Stratégie nationale de l’ESS. Cette feuille de route, qui doit être élaborée avant la fin de l’année 2025, a été introduite par une recommandation européenne datant de fin 2023. Elle se déploie selon chaque pays sur des thématiques spécifiques. 

« En France, nous nous concentrons sur la promotion du modèle de l’économie sociale et solidaire, l’attractivité des métiers et l’accès aux financements », explique Maxime Baduel. L’innovation sociale, technologique et environnementale devra également faire partie des axes développés. Cet exercice inédit nécessite de croiser les compétences, entre responsables politiques et réseaux de l’ESS, avant d’être approuvé par Matignon. « La stratégie dépendra beaucoup du contexte politique dans laquelle elle sera finalement rédigée », pointe le délégué ministériel. Une consultation citoyenne, codirigée par le Conseil supérieur de l’ESS et l’État, a également été lancée. 

 

Élisabeth Crépin-Leblond

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