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Par Carenews INFO - Publié le 15 avril 2025 - 10:00 - Mise à jour le 16 avril 2025 - 16:30 - Ecrit par : Elisabeth Crépin-Leblond
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La FNH dénonce le rôle de la grande distribution dans la baisse des achats bio

Absence d’objectifs chiffrés, baisse de l’offre, écarts de prix importants… Dans un rapport publié le 10 avril, la Fondation pour la nature et l’homme étudie les stratégies commerciales de la grande distribution vis-à-vis des produits alimentaires issus de l’agriculture biologique. Les huit principales enseignes françaises étudiées « ne sont pas à la hauteur », estime la fondation.

Selon la Fondation pour la nature et l’homme, les ventes de produits bio ont baissé de 12 % en grande distribution entre 2020 et 2023. Crédit : iStock
Selon la Fondation pour la nature et l’homme, les ventes de produits bio ont baissé de 12 % en grande distribution entre 2020 et 2023. Crédit : iStock

 

Depuis la pandémie de Covid-19 en 2020, l’agriculture biologique a connu une crise économique importante, marquée, entre autres, par un recul de la consommation. Face à cette situation, la Fondation pour la nature et l’homme (FNH) s’est penchée sur les politiques mises en place par les grandes enseignes vis-à-vis des produits labellisés agriculture biologique, dans un rapport publié le jeudi 10 avril. Le but : mieux comprendre le rôle de la grande distribution dans la crise, au-delà du facteur de la baisse du pouvoir d’achat.  

« Nous avons évalué trois dimensions de l’environnement pour mieux comprendre la stratégie générale des enseignes : l’accessibilité physique, c’est-à-dire la place des produits bios dans les rayons ; l’environnement économique, qui comprend les politiques de prix, de marges et de promotions ; et enfin l’environnement socioculturel et cognitif, déterminé notamment par les outils déployés pour informer les clients sur les produits », expliquent les auteurs du rapport à l’occasion de sa parution.  

« Le but est de sortir du mythe du consom’acteur en décentrant l’analyse sur les facteurs externes de l’achat », argumente également Alice de Bazelaire, consultante du cabinet Ceresco, mandatée pour construire la méthodologie de cette étude. 

 


À lire également : Dans l’agriculture biologique, une crise sans précédent depuis 3 ans


 

Le bio, sorti des feuilles de route des huit principales enseignes 

  

Selon la Fondation pour la nature et l’homme, les ventes de produits bio ont baissé de 12 % en grande distribution entre 2020 et 2023, alors même que cette dernière représente 60 % de la consommation des ménages. 

Pour son rapport, la fondation a étudié les stratégies commerciales de Carrefour, Monoprix, Intermarché, Lidl, Coopérative U, Auchan, Aldi et Leclerc, à partir de leurs données publiques. Sur ces huit enseignes, représentant 80 % de la grande distribution, toutes ont également accepté un entretien, à l’exception des trois dernières qui n’ont pas répondu aux sollicitations de la fondation. 

« Au global, le bio est sorti de la feuille de route des enseignes. Il n’y a pas forcément un abandon total mais plutôt une réticence à communiquer dessus », relèvent les auteurs du rapport, ajoutant que « le bio est aussi noyé dans des chiffres de durabilité globaux ».  

  

Quatre notes globales pour les distributeurs, allant de A à G 

  

Pour chacun des quatre indicateurs clés sur lesquelles elle s’est appuyée, la FNH a attribué une note globale aux huit enseignes étudiées, selon un barème allant de A à G.  

La note la plus basse, un F, est attribué pour le pilier « stratégie et transparence » en raison de « l’absence d’objectifs chiffrés en matière d’agriculture biologique » présents chez l’ensemble des distributeurs étudiés. « Pourtant, certaines le faisaient avant la crise. Michel-Edouard Leclerc qui parlait d'un doublement de ses parts de vente bio d'ici 2022, ne communique plus du tout là-dessus dans les médias. Intermarché avait des objectifs de 16 % en 2023, qui ont disparu depuis », pointe Marie Rapaud, chargée de mission alimentation durable à la FNH. 

Sur le pilier « environnement physique », les distributeurs, responsables de « trop peu de bio disponible dans les rayons » selon la FNH, reçoivent une note globale de E. Une situation accentuée par « une part d’offre qui connaît une forte diminution depuis la crise (avec notamment 7 à 25 % de références bio en moins selon les enseignes entre 2022 et 2023) », précise la fondation. 

Concernant le pilier « environnement économique », évalué en fonction de l’écart de prix entre les produits bios et conventionnels et en fonction de l’intégration du bio dans les programmes fidélité des grandes enseignes, le rapport attribue une note globale de D. « 2 enseignes sur 8 ont un écart de prix évalué à plus de 70% alors que certaines parviennent à le maintenir sous les 60 %, d’après l’étude la plus récente sur le sujet. Notons aussi que seule 1 enseigne possède un programme de fidélité dédié au bio. Pour les autres, le bio est soit absent du programme de fidélité, soit présent mais d’une manière non quantifiée », précise la FNH. 

Enfin, sur le dernier pilier « socioculturel et cognitif », les huit enseignes reçoivent la note globale E. « Pour évaluer ce pilier, la fondation s’est intéressée à la part des investissements publicitaires dédiée au bio en 2021, au soutien de la campagne BioReflexe de l’Agence Bio et aux actions diverses déployées par les enseignes pour améliorer l’état des connaissances des consommateurs », explique la FNH. « Résultat : 7 enseignes sur 8 ont dédié moins de 5 % de leurs investissements média à la bio en 2021, lui réservant une part dérisoire au regard des sommes investies, et seule 3 enseignes mènent des actions pédagogiques en faveur de la bio », conclut-elle. 

  

Un objectif de 12 % des vente en bio porté par la FNH 

  

Derrière ces notes globales, des disparités entre les distributeurs sont relevées par la FNH. « Coopérative U et Carrefour vont globalement davantage dans le bon sens. Monoprix propose de nombreux produits bios mais à des prix élevés, tandis que Lidl en propose peu mais fait des efforts pour les rendre accessibles à une clientèle moins aisée », notent les auteurs du rapport de la présentation. 

Dans l’ensemble toutefois, « les enseignes ne sont pas à la hauteur. Elles vont devoir mettre le pied à l’étrier », estime Thomas Uthayakumar, directeur des programmes et du plaidoyer au sein de la FNH. 

L’un des enjeux soulevés par la fondation est notamment de contribuer à atteindre l’objectif de 21 % de surface agricole utile en bio d’ici 2030, fixé par la loi d’orientation agricole. « L’agriculture biologique est une prise de risque, qui induit plus de main d’œuvre et moins de rendement. Il faut donc très important de sécuriser les agriculteurs », argumente notamment Thomas Uthayakumar. « La grande distribution ne doit pas être opportuniste, il faut développer des engagements tripartites avec des prix définis basés sur les coûts de production », ajoute-il. 

La FNH propose notamment d’ancrer dans la loi un objectif de 12 % des ventes alimentaires labellisées biologiques pour les distributeurs, ainsi que de donner plus de mandat à l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires « pour voir de quelle manière la valeur transite entre les maillons ». 

« Aujourd’hui le bio représente environ 6 % de la part des rayons et 4 % du chiffre d’affaires des enseignes. Notre recommandation est que ce dernier chiffre doit tripler pour atteindre 12 % », mettent en avant les auteurs du rapport. 

 

Élisabeth Crépin-Leblond

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