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Par Carenews INFO - Publié le 19 décembre 2023 - 14:44 - Mise à jour le 19 décembre 2023 - 17:22 - Ecrit par : Célia Szymczak
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Projet de loi immigration : à la rencontre citoyenne d’Emmaüs Solidarité, entre « désespoir » et « résistance »

Les travailleurs sociaux et responsables associatifs présents le 18 décembre déplorent l’attitude du monde politique et médiatique face à l’immigration, qui les affecte dans leur travail.

Lotfi Ouanezar, directeur général d'Emmaüs Solidarité, qui parle du contexte politique actuel. Crédit : Célia Szymczak, Carenews.
Lotfi Ouanezar, directeur général d'Emmaüs Solidarité, qui parle du contexte politique actuel. Crédit : Célia Szymczak, Carenews.

 

« Les temps vont être durs en 2024 et on aura besoin de se mobiliser », résume Lotfi Ouanezar, directeur général d’Emmaüs Solidarité. Le soir du lundi 18 décembre, à l’occasion de la journée internationale des migrants, l'association tient une réunion publique à la Maison des réfugiés à Paris. L’événement a été organisé trois jours plus tôt, en réaction à la convocation par le gouvernement d’une commission mixte paritaire (CMP) réunie les 18 et 19 décembre, qui fait suite au vote d’une motion de rejet de la loi immigration à l’Assemblée nationale. 

Les acteurs associatifs, chercheurs spécialisés et travailleurs sociaux sont inquiets. Alexandra Galitzine-Loumpet, anthropologue à l’Institut Convergences Migrations, déplore un « agenda politique (...) profondément xénophobe ». Dans ce contexte, la loi constitue un « glissement terrifiant », ajoute Pascal Brice, président de la Fédération des acteurs de la solidarité. Selon lui, même si la CMP n’aboutit pas sur un texte, « le mal a été fait ». 

 

« Lubie des politiques » 

Il alerte : la loi questionne « le sens du travail et de l’engagement des travailleurs sociaux », en particulier par la possible interdiction d'hébergement d’urgence des personnes sans-papiers qui était présente dans le texte adopté il y a quelques mois par le Sénat. Les travailleurs sociaux se disent inquiets. « On discute entre nous et on essaie de se redonner un peu de baume au cœur en se disant que tout n’est pas perdu (...). Moi j’ai peu d'espoir », intervient Pauline, travailleuse sociale. 

Plusieurs intervenants mentionnent en effet leur « désespoir » face au « décalage profond entre la façon dont le politique imagine la migration » et sa réalité, selon les mots d’Alexandra Galitzine-Loumpet. « La France n’a jamais accueilli de grande vague de réfugiés », affirme cette dernière, chiffres à l’appui. 3 % des réfugiés syriens relocalisés en Europe ont été logés en France entre 2014 et 2020. Le pays a ouvert ses portes à 4 % des réfugiés ukrainiens.

« On dit souvent, et c’est la lubie des politiques, “l’opinion demande que” », analyse Jean-Marie Delarue, ancien conseiller d’État et ancien président de la Commission nationale consultative des droits de l’homme. Or, « selon des études américaines très précises (...), en matière d’immigration ce n’est pas l’opinion qui est demanderesse. L’opinion suit ce qui est demandé par les politiques », explique-t-il. Il les accuse ces derniers de faire des immigrés les « responsables » des « désastres économiques que l’on traverse ». 

 

« Personne ne choisit d’être migrant »

Mahmoud Amidou témoigne : il a quitté le Soudan en 2016, en raison de la guerre civile. Il travaille désormais au pôle sport et culture de la Maison des réfugiés, et parle plusieurs langues. Il raconte avoir traversé la mer par bateau, puis être resté sans domicile fixe, avant d’être hébergé par Emmaüs Solidarité et de s’insérer professionnellement. « Je viens d’une famille riche. J’étais bien chez moi (...). Quand les gens parlent d’immigration, ils ne savent pas de quoi il s’agit », déclare-t-il, « Personne ne choisit la misère ou d’être migrant ». 

 


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Mobilisation politique et citoyenne

Face à cette situation, « il va falloir montrer notre force », estime Pascal Brice, qui appelle à une « résistance constructive ». Il propose aux participants de se filmer les bras croisés, pour montrer leur opposition. 

Au-delà de cette résistance symbolique, Pascal Brice et Jean-Michel Delarue appellent à se mobiliser sur le plan politique. Hélène Soupios-David, la directrice plaidoyer, international et vie associative de l’association France terre d'asile, propose quant à elle à ceux qui rentreront dans leur famille à Noël de raconter « la réalité » des parcours de migrations afin de les « réhumaniser ». « Foncièrement, les gens ne sont pas pour les expulsions systématiques », conclut-elle.

 

Célia Szymczak 

 

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