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Par Carenews INFO - Publié le 14 décembre 2023 - 19:00 - Mise à jour le 22 mai 2024 - 10:51 - Ecrit par : Elisabeth Crépin-Leblond
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Saveurs en partage, une épicerie à double tarification pour rendre le bio accessible à tous

Implantée dans le quartier le plus pauvre de Paris, l’épicerie Saveurs en partage veut rendre le bio et le local accessible à tous. Une double tarification permet à certains consommateurs de ne payer que 30 % du prix d’achat des produits.

L'épicerie a été créée en 2020 dans le 20e arrondissement de Paris. Crédit : Elisabeth Crépin-Leblond
L'épicerie a été créée en 2020 dans le 20e arrondissement de Paris. Crédit : Elisabeth Crépin-Leblond

 

À Paris, près de la porte de Bagnolet, une devanture verte tranche avec les enseignes environnantes. Saveurs en partage est une épicerie proposant des produits biologiques et locaux, implantée dans le quartier depuis 2020. Particularité de son fonctionnement, la double tarification mise en place permet à certains consommateurs de ne payer que 30 % du prix des produits.  

Une trentaine de foyers en moyenne chaque année, en grande majorité des familles monoparentales, profite de la tarification réduite. Les autres clients, environ 90 %, paient leurs achats au tarif affiché. La famille bénéficiaire reçoit une carte, valable de trois à six mois renouvelables, avec un budget défini en fonction de la composition du foyer et de l’âge des enfants. Elle n’en paie que 30 % du prix et peut l’utiliser à raison d’une fois par semaine sur une liste de produits définie. Fruits et légumes, farine, sucre roux… Les articles proposés à prix réduits sont surtout des aliments bruts à cuisiner. 

 

Une alternative aux distributions alimentaires

 

Car la philosophie du commerce est de permettre à toutes les populations de mieux se nourrir.

« Toutes les familles doivent avoir accès à des bons produits avec un prix accessible. Surtout celles avec des enfants », explique Mina Hassaine, salariée présente à la caisse ce jeudi. 

En charge de la comptabilité et de la communication avec les fournisseurs, elle sélectionne avec N’Daye Marna, la gestionnaire de l’épicerie, des produits français en grande majorité biologiques et le plus possible issus de circuits courts. Sur les étals du commerce, on retrouve notamment du miel, de la bière et de la lessive fabriqués à Paris ou encore des fruits et légumes cultivés par des fermes urbaines dans l’arrondissement. Du vrac est également proposé pour les produits secs. Dans un coin, quelques produits non bios ou à moindre coût sont disposés. 

 

La très grande majorité des produits proposés sont labellisés biologiques.
La majorité des produits proposés sont labellisés bios et locaux. Crédit : Elisabeth Crépin-Leblond

 

« En plus d’une meilleure qualité, l’intérêt du système est que les clients bénéficiaires de la tarification réduite ont le choix », explique la médiatrice environnementale Agnès Fontaine qui déplore la présence de nombreux produits industriels et de mauvaise qualité dans les dispositifs classiques d’aide alimentaire. 

Chaque semaine, elle organise des ateliers dans la boutique autour de la nutrition et de la santé. La semaine dernière, les clients ont par exemple fabriqué leur propre moutarde grâce au Paysan urbain, une association qui produit des micro-pousses agroécologiques. 

La double tarification fonctionne grâce aux subventions de Paris Habitat et de la Régie immobilière de la ville de Paris (RIVP) qui allouent chacun 5 000 euros par an à l’association conjointe à l’entreprise. De quoi financer les 70 % de réduction appliqués pour les familles bénéficiaires. 

Pour identifier les bénéficiaires, Saveurs en partage passe par des travailleurs sociaux ou des associations. L’épicerie n’a pas accès aux revenus des bénéficiaires et n’affiche pas la réduction de prix. « Le système de carte que l’on passe discrètement à la caisse permet d’éviter le sentiment discriminant », ajoute la médiatrice environnementale. Une méthode alternative aux distributions alimentaires dans lesquelles certains clients n’osent pas se rendre malgré leurs besoins.

 

Mina Hassaine est l'une des porteuses de projet et salariée de l'épicerie. Crédits : Élisabeth Crépin-Leblond
Mina Hassaine est l'une des porteuses de projet et salariée de l'épicerie. Crédit : Élisabeth Crépin-Leblond

 

Implanter le bio dans un quartier populaire

 

Saveurs en partage compte aujourd’hui trois salariés. Parmi elles, Mina Hassaine et N’Daye Marna. Elles font partie des cinq femmes porteuses du projet de 2014 à 2020. L’idée est née lors des « Lundi des femmes solidaires » organisé par le centre socioculturel Archipélia. En plus de rendre le bio accessible, le souhait était de générer de l’emploi pour ces mères de famille. 

Pour lancer leur projet, les entrepreneuses ont été accompagnées par le programme d’incubation « couveuse Epicéas » porté par l’association Projets-19. 

Leur business plan achevé, la plus grande difficulté fut de trouver un local où implanter le projet. Une tâche qui a pris plus de cinq ans avant de trouver l’enseigne actuelle, loin du quartier où elles souhaitaient originellement s’établir. 

 « C’était un défi de s’installer dans ce quartier », coincé entre le périphérique et les boulevards des maréchaux et considéré comme le plus pauvre de la capitale, raconte Agnès Fontaine. « Un no man’s land » peu dynamique économiquement, décrit la médiatrice environnementale qui y habite depuis 18 ans. 

Malgré l’inflation grimpante depuis leur ouverture, « on est toujours là, on tient », confie souriante Mina Hassaine. Durant le mois de novembre, Saveurs en partage a eu 548 clients. Son chiffre d'affaires oscille entre 10 000 et 11 000 euros par mois.

 

Agnès Fontaine est médiatrice environnementale chez Saveurs en Partage. Crédits : Elisabeth Crépin-Leblond
Agnès Fontaine est médiatrice environnementale chez Saveurs en partage. Crédit : Elisabeth Crépin-Leblond

 

 

Elisabeth Crépin-Leblond 

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