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Par Carenews PRO - Publié le 18 avril 2024 - 14:48 - Mise à jour le 24 avril 2024 - 21:48 - Ecrit par : Théo Nepipvoda
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Dividendes climat : cet outil basé sur les émissions évitées est-il pertinent ?

Portés par une association créée en 2022, ce nouvel indicateur extra-financier standardisé entend valoriser la contribution positive des entreprises à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Est-ce une bonne idée ?

L'association Climate Dividends porte le concept depuis 2022. Crédit : Chai_pagchong, iStock.
L'association Climate Dividends porte le concept depuis 2022. Crédit : Chai_pagchong, iStock.

 

L’un des enjeux majeurs de la transition écologique est celui du fléchage des investissements vers des activités durables. C’est dans cette optique que l’association Climate Dividends, créée en 2022, porte l’idée des dividendes climat. Cette structure a été lancée par divers acteurs tels que l’Ademe, la société d’investissement Mirova ou encore Team for the planet. La présidente est Brune Poirson, directrice du développement durable du groupe hôtelier Accor et secrétaire d’État entre 2017 et 2020.

Pour l’instant, 39 entreprises distribuent ce type de dividendes, sans contrepartie financière, à leurs investisseurs. Parmi elles, le spécialiste du sport et des loisirs Decathlon ou encore l’ingénieriste de l’énergie Alterea. Veolia est en phase de test. Il s’agit d’une information extra-financière qui permet de valoriser la création de valeur environnementale de l’entreprise. Pour les investisseurs, cela peut représenter une information pour mieux flécher leurs investissements et également valoriser leurs choix d’investissement.

 

Valoriser l’impact climatique positif des entreprises

 

Pour bien comprendre cet outil, il est nécessaire avant tout de se pencher sur la notion d’émissions carbone évitées sur laquelle il se base. Il s’agit des émissions de gaz à effet de serre qu’une solution proposée par une entreprise permet d’éviter : « Une entreprise qui commercialise par exemple des panneaux solaires aide ses clients à se décarboner. Sans cela, ces derniers auraient peut-être utilisé des sources d’électricité davantage carbonées », illustre Laura Beaulier, directrice générale de l’association Climate Dividends. En suivant cette logique, malgré les émissions entraînées par la fabrication des panneaux solaires, l’activité de l’entreprise aurait un impact carbone global positif.

« Aujourd’hui, quand on pense à l’impact écologique d’une entreprise, on pense surtout à son impact négatif et à la façon de le réduire. Pour une entreprise qui réussit climatiquement, c’est très difficile de mesurer et de valoriser cette contribution positive. De même pour les investisseurs », explique Laura Beaulier.

La notion d’émissions de gaz à effet de serre évitées entend donc combler ce manque. Pour les calculer, il faut comparer le gaz à effet de serre émis par la solution à la moyenne d’émission des solutions présentes sur le marché, c’est-à-dire à ce que l’on appelle un scénario de référence. Chaque tonne de différence avec la moyenne des produits comparables est considérée comme une tonne évitée.

 

Une tonne évitée = un dividende climat

 

Une tonne d’émissions évitées permet à l’entreprise d’émettre un dividende climat. Il y a une autre façon de distribuer des dividendes climat : chaque tonne de gaz à effet de serre séquestrée, captée par un dispositif dédié, permet d’en générer un. Ce dernier type de dispositifs fait l’objet de critiques sur son efficacité. Le dividende climat est donc un indicateur extra-financier mis à la disposition des entreprises pour valoriser leur contribution positive à la transition écologique.

Selon le site de l’association, Decathlon peut par exemple distribuer aux détenteurs de capitaux plus de 1 072 000 dividendes climat. Alterea, lui, plus de 23 000. L’idée peut s’appliquer à un grand nombre de secteurs économiques qui disposent d’un scénario de référence. Les investisseurs, eux, récupèrent ces dividendes climat au prorata de la détention du capital. 

Les dividendes climat servent d’indicateur standard." Laura Beaulier, Climate Dividende.

« L’idée est de rendre tangibles et valorisables les activités qui ont une contribution climatique positive et les investissements réalisés dans celle-ci », explique Laura Beaulier. Ces émissions évitées sont calculées par l’entreprise en respectant une méthodologie définie par l’association. Tout cela est vérifié par un tiers indépendant. 

Aujourd’hui, diverses méthodes de calcul des émissions évitées existent, ce qui ne permet pas aux entreprises de se comparer : « L'intérêt des dividendes climat est qu’ils servent d’indicateur standard, comparable et fiable de cette mesure de la contribution climatique positive », considère Laura Beaulier. Cela permet donc aux entreprises et aux fonds d’avoir une unité de disposer d’une information extra-financière standardisée.

Ce nouvel indicateur extra-financier pourrait permettre de quantifier la contribution de l’entreprise à la transition écologique et ainsi donner un poids à cette donnée dans la valorisation financière de l’entreprise. Il se veut complémentaire de l'empreinte carbone et ne vient donc pas en substitution.

 

Un travail de plaidoyer à partir de la fin d'année

 

Pour l’association Reclaim finance, l'ONG qui œuvre pour mettre la finance au service du climat, cet outil n’est pas très convaincant : 

 

 L'idée des dividendes climat ne répond concrètement à aucun problème et ne permet pas de changer le système économique et financier au cœur du dérèglement climatique. Elle semble être une nouvelle fausse solution de plus pour faire face aux critiques légitimes quand des entreprises redistribuent des superprofits à des actionnaires alors qu'il manque des milliards à la transition écologique et énergétique », estime-t-elle.

 

Elle critique également le concept d’émissions évitées qui est, selon elle, « une stratégie de greenwashing et qui ne peut s'insérer dans une démarche sincère de la part des acteurs économiques et financiers pour verdir leurs activités et portefeuilles. Ces émissions évitées ne peuvent aucunement être une compensation de ces émissions. »

Mais pour Laura Beaulier, « les émissions évitées sont un concept à manier avec précaution et elles ne doivent être en aucun cas déduites de l'empreinte carbone des entreprises. A ce titre, elles n'ont donc aucune fonction de compensation et c'est un point très important du fonctionnement des dividendes climat. Ces derniers ont vocation à rendre plus standard et transparent le calcul et la communication autour de ces émissions évitées. Ils ne servent donc pas à mesurer ou modifier les émissions générées par les entreprises, mais à compléter cette analyse. »

Aujourd’hui, les entreprises ayant adopté les dividendes climat sont principalement basées en France, mais cet outil a vocation à dépasser les frontières. Un travail de plaidoyer politique sera mené à partir de la fin d’année pour essayer, à terme, de faire rentrer ce nouvel indicateur extra-financier dans la législation et pourquoi pas d’en faire une norme internationale.

 

Théo Nepipvoda

 

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