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Par Carenews INFO - Publié le 16 juin 2023 - 10:00 - Mise à jour le 13 novembre 2023 - 10:13 - Ecrit par : Célia Szymczak
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Valérie de Robillard (Senior Vice-President, Accor) : « Nous sommes responsables d’une pollution dont on sait qu’elle ne sera pas nécessairement bien traitée »

Le Groupe Accor a annoncé mettre fin à l’utilisation des plastiques à usage unique d’ici 2025 dans ses hôtels. Décryptage des motivations d’Accor, des modalités et de l’impact de la mesure avec Valérie de Robillard, vice-présidente environnement chez Accor.

Accor s'engage à mettre fin aux plastiques à usage unique dans ses hôtels. Crédits : iStock.
Accor s'engage à mettre fin aux plastiques à usage unique dans ses hôtels. Crédits : iStock.

 

Brune Poirson, directrice du développement durable dans le groupe hôtelier Accor, annonçait le 4 juin au JDD la fin des plastiques à usage unique dans les hôtels d’ici 2025. Une démarche engagée en 2020 pour les plastiques visibles pour les clients. Valérie de Robillard, vice-présidente environnement chez Accor, a répondu à nos questions sur le sujet.

 

  • Accor a pour ambition de mettre fin à l’utilisation des plastiques à usage unique dans ses hôtels d’ici 2025. Quelles sont les raisons qui vous ont motivé à prendre cette décision ?

Les plastiques présents dans les hôtels jusqu’ici étaient principalement des plastiques à usage unique qui génèrent une grande quantité de déchets. C’est bien sur ceux-là que nous nous positionnons. Le plastique réutilisable, lui, peut ne pas poser de problème. 

Accor est présent dans plus de 110 pays, dans lesquels les systèmes de recyclage ne sont pas toujours au rendez-vous. Nous sommes responsables d’une pollution dont on sait qu’elle ne ne sera pas nécessairement très bien traitée. C’est la deuxième raison.

La troisième raison, c’est qu’ Accor est présent dans des sites d’exception comme sur des littoraux. Il n’y en a pas un seul aujourd’hui dans le monde où on ne trouve pas de déchets plastiques, ce qui gâche évidemment l’expérience client. 

Pour réduire les déchets plastiques, il y a encore beaucoup à faire de la part de tous les acteurs économiques. Il faut commencer à agir dans notre propre entreprise. 

 

  • Dans le cas de la France, il y existe des impératifs réglementaires liés à la loi AGEC. Dans quelle mesure ont-ils contribué à votre initiative ? 

Évidemment, ils y ont contribué. De fait, lorsque l’on mène ce genre d’initiatives, une réglementation locale contraignante nous aide. 

Néanmoins, la France représente moins de la moitié de la présence d’Accor dans le monde. La décision n’a pas été prise au seul prisme de la réglementation française. Le sujet des plastiques à usage unique est un enjeu global.

 

  • Disposez-vous de données chiffrées sur la consommation actuelle de plastique du groupe ? 

Nous ne mesurons pas le volume de plastique, nous mesurons le nombre de produits concernés. Nous avons enlevé ou remplacé 46 items à usage unique dans 84 % des hôtels depuis 2020, ce qui correspond à 200 millions de produits. C’est 98 % de ceux que les clients voient. 

 

  • Allez-vous mesurer l’impact écologique de cette démarche ?

Nous le mesurons par type de produits. Par exemple, l’élimination des mini-bouteilles de produits de toilette liquides a permis d’éviter 300 tonnes de déchets plastiques et 980 tonnes d’équivalent CO2 chaque année. 

 

  • Le faites-vous pour chaque produit ? 

Nous pouvons, mais ne le faisons pas aujourd’hui. En termes d’impact carbone, le plastique reste malgré tout une petite part de notre empreinte. 

 

  • Et sur les sujets de biodiversité ou de pollution des eaux ?

La pollution des eaux est un autre sujet, davantage concerné par les microplastiques. Nous sommes en phase assez préliminaire. Nous faisons actuellement l’état des lieux de nos blanchisseries pour savoir lesquelles sont équipées de filtres à microplastiques. 

Plus généralement, sur les plastiques résiduels, nous sommes en train de détailler davantage notre reporting sur les déchets pour repérer pays par pays les plastiques qui font l’objet d’une filière de recyclage, en sus de tout ce que nous faisons pour les éliminer. 

 

  • Concrètement, quelles sont les mesures que vous avez ou allez mettre en place dans les hôtels pour réaliser cette transition vers le zéro plastique à usage unique? 

La première démarche est de se demander ce dont nous avons vraiment besoin. Si un objet n’est pas ou peu utilisé, plutôt que de le remplacer, nous pouvons le supprimer et éventuellement le rendre disponible à la demande.

Lorsque nous le remplaçons, cela signifie que les services des achats doivent trouver des alternatives locales. Par exemple, pour les peignes, nous avons trouvé des alternatives en bois.

Le deuxième levier, c’est la sensibilisation des guests. On doit leur expliquer notre démarche. 

Le troisième volet représente peu de coûts opérationnels pour les hôtels. Dans certains cas, les mesures peuvent demander une main d’œuvre un peu plus importante. Par exemple, si trois guests téléphonent pour demander des charlottes de bains, il faut les apporter dans leurs chambres. 

 

  • La stratégie précédente d’Accor était d’éliminer tous les plastiques à usage unique « intégrés à l’expérience client » d’ici fin 2022. Quelles raisons expliquent que vous ayez prolongé ce délai ? 

L’objectif de 2025 inclut les plastiques de back of house, y compris dans les cuisines ou le nettoyage, par exemple. Nous n’avons pas tellement reculé l’objectif, nous avons intégré d’autres zones de l'hôtel. 

Il y a deux types de cas de figures où nous pouvons avoir des exceptions localement. Il peut y avoir des raisons sanitaires, comme l’accès à l’eau potable ou les allergies alimentaires, qui nécessitent des films plastiques sur les aliments. 

L’autre cas de figure, malheureusement plus répandu mais que nous pouvons  résoudre plus facilement, c’est la question de la disponibilité des solutions alternatives. Par exemple, dans certains pays, nous ne trouvons pas de sachets de café instantané qui ne soient pas en plastique. Les services des achats travaillent avec des fournisseurs locaux pour les inciter à trouver des solutions et des innovations, plutôt que de faire des absurdités environnementales en transportant des alternatives depuis l’autre bout du monde. 

 

  • La sensibilité des citoyens pour une consommation plus responsable est croissante. Quelle est la position des clients face à la diminution des plastiques ? 

C’est un sujet qui remporte plutôt l’adhésion quand il est bien expliqué et qu’il y a des solutions alternatives. Pour l’instant, les remarques que nous avons eu sur les réseaux sociaux pointent plutôt du doigt les cas où ce n’est pas appliqué. Les clients ont en tête cet engagement d’Accor. 

C’est un peu plus compliqué pour les bouteilles d’eau, sur lesquelles nous travaillons cette année. L’accès à l’eau minérale est perçu comme une valeur ajoutée importante. Nous travaillons d’arrache pied pour trouver des solutions qui donnent la même impression de qualité et de service client sans plastique. Parfois, vous avez à la fois le plastique à usage unique et le transport de certaines eaux minérales à l’autre bout du monde dans des hôtels de luxe. Ce sont vraiment des choses qui n’auront plus cours. Il y a énormément d’acteurs et de startups qui se développent pour proposer des systèmes de filtration ou d’ionisation de l’eau qui permettent d’améliorer le goût de l’eau. Nous rencontrons presque chaque semaine un nouvel acteur dans ce domaine. 

 

Propos recueillis par Célia Szymczak   

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