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Par Carenews INFO - Publié le 27 mars 2020 - 09:15 - Mise à jour le 27 mars 2020 - 10:03
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Sur Leetchi, un collectif monte une cagnotte pour aider les étudiants précarisés de Bordeaux

En cette période de crise sanitaire liée au coronavirus, la situation des étudiants précaires s’est, elle aussi, aggravée. Sur Leetchi, une cagnotte a été lancée par le collectif Solidarité - Continuité Alimentaire, créé spécialement pour aider les étudiants de l’université de Bordeaux à se nourrir.

Crédit photo : Collectif Solidarité - Continuité Alimentaire.
Crédit photo : Collectif Solidarité - Continuité Alimentaire.

En raison de la crise que nous traversons, les personnes sans domicile et isolées sont particulièrement fragilisées. Mais on tend à oublier les étudiants, notamment les plus précaires et/ou d’origine étrangère. « 20% des étudiants vivent sous le seuil de pauvreté », rappelle Jérôme, enseignant-chercheur et membre du collectif Solidarité - Continuité Alimentaire Bordeaux. C’est à la suite de la fermeture de l’université de Bordeaux, le vendredi 13 mars, que ce dernier s’est constitué. Son objectif : soutenir les étudiants en situation de précarité qui n’ont pas pu rentrer dans leur famille en leur apportant une aide alimentaire. 

En effet, nombreux sont ceux qui, en raison des mesures de confinement, se sont retrouvés privés de travail, mais aussi des distributions des banques alimentaires dont ils dépendent souvent pour se nourrir. « Au début du confinement, certains des membres du collectif ont croisé des étudiants qui n’avaient pas mangé depuis deux jours, et qui étaient dans un état de grande faiblesse et de fébrilité », relate Jérôme. Une dizaine d’étudiants, de maîtres de conférence et de doctorants se sont alors réunis pour leur acheter et leur distribuer des produits de première nécessité. Ils ont dans un premier temps personnellement contribué, puis la multiplication croissante des demandes a poussé le collectif à lancer une campagne Leetchi pour récolter des fonds. À l’heure actuelle, la cagnotte comptabilise 736 donateurs, pour des dons s’élevant au total à près de 31 600 euros. Jérôme nous raconte les dessous de cette initiative.

  • Comment avez-vous diffusé votre initiative auprès des étudiants ?

Au départ, nous avons communiqué en collant des affiches dans les résidences universitaires. C’était le moyen le plus simple de toucher le plus de gens possible. Par la suite, certains des membres du collectif étant informaticiens, nous avons créé un questionnaire, que nous diffusons en ligne. Les étudiants le remplissent en spécifiant leur adresse et leurs besoins. Les réponses sont traitées et nous permettent de faire un listing des produits à acheter et des personnes chez qui nous devons passer.

Comme nous ne possédions pas les listes des e-mails des étudiants, nous avons fait appel à la présidence de l’université pour qu’elle se charge de diffuser notre action au plus grand nombre. Celle-ci ayant refusé, nous avons demandé aux personnels de la faculté de relayer l’information à tous les étudiants dont ils avaient les contacts. Au total, aujourd’hui, nous comptabilisons environ 500 bénéficiaires.

  • Comment vous organisez-vous pour acheter les produits et les distribuer aux étudiants ?

L’un de nos membres appartient à une association qui assure la gestion d’un BDE (Bureau des élèves) dans une école d’ingénieurs. Il disposait d’une carte METRO, que nous utilisons pour faire des achats de gros dans un magasin de l’enseigne en fonction des besoins exprimés dans le questionnaire. Ensuite, nous stockons les marchandises dans un local et nous les répartissons en colis individuels. Ils se composent de trois kilos de féculents, de conserves, de pots sauce tomate et de produits d’hygiène. Nous n’avons pas de local réfrigéré, donc nous n’assurons pas la distribution de produits frais.

Pour la livraison des colis, nous nous organisons en quatre ou cinq équipes de deux, qui circulent en voiture. Nous nous arrangeons pour regrouper les lieux de distribution pour limiter le nombre de déplacements et de contacts entre les gens. Nous prévenons également les étudiants de notre passage par SMS deux ou trois heures en amont, afin qu’ils soient bien présents quand nous passons chez eux.

  • Quelle est la situation actuelle des étudiants qui font appel à vous ?

En temps normal, la situation des étudiants précaires est déjà très difficile, mais là, elle a réellement empiré. Beaucoup travaillent dans des restaurants ou en tant qu’indépendants auprès d’entreprises comme Deliveroo, qui sont fermés ou qui ne tournent plus qu’au ralenti en raison des mesures de confinement. D’autres pouvaient compter sur leurs parents pour les aider, mais nombre d’entre eux sont aussi des travailleurs indépendants, qui manquent aujourd’hui de ressources. 

Nous leur apportons une aide alimentaire, mais ils affrontent de nombreux problèmes auxquels nous ne pouvons pas répondre. Ils sont logés dans de petites chambres, dont la literie est souvent infestée de punaises de lit, et les équipements des résidences ne fonctionnent plus ou ils ne peuvent pas y avoir accès, car ils n’ont plus la capacité de les payer. Nous avons d’ailleurs demandé au Crous (Centre régional des œuvres universitaires et scolaires) de suspendre les loyers durant la période de confinement. Une telle mesure serait d’une grande aide et représenterait un souci en moins. Depuis le lancement de notre initiative, nous avons reçu des appels d’étudiants de Nice et de Lyon, qui souhaitaient mettre en place le même type d’action, preuve que la question de la précarité étudiante est présente partout.

  • Recevez-vous un appui de la part des pouvoirs publics ou de l’université ?

L’université diffuse l’adresse du questionnaire sur son site Internet, mais elle n’a mis aucune mesure en place pour venir en aide à ces étudiants. Quant au Crous, il a organisé au début du confinement une distribution des denrées alimentaires qu’il avait en stock et une autre pour donner des yaourts et des fruits. Mais les conditions pour y avoir accès étaient compliquées : il fallait d’abord s’être signalé trois jours avant et avoir reçu une convocation. La mairie de Bordeaux, elle, serait en train de mettre quelque chose en place, mais elle réagit un peu tard. De notre côté, nous avons créé un formulaire pour recenser les gens qui voudraient nous aider bénévolement.

Propos recueillis par Audrey Parvais 

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