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Par SIAL Paris - Publié le 2 octobre 2024 - 17:32 - Mise à jour le 3 octobre 2024 - 09:52
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Cécile Béliot : « Nous devons être en mesure de nourrir 10 milliards de personnes d'ici à 2050 »

Dans cette interview exclusive, Cécile Béliot, PDG du Groupe Bel, présente la mission de l'entreprise qui consiste à promouvoir une alimentation plus saine et durable à l'échelle mondiale. Cécile Béliot prendra la parole et introduira le SUMMIT RSE le dimanche 20 octobre sur SIAL Paris.

  • Pouvez-vous nous parler du Groupe Bel ?

Le Groupe Bel est un groupe agroalimentaire familial français fondé en 1865 dans le Jura. Aujourd'hui, nous sommes un acteur majeur de l'alimentation à travers des produits laitiers, des fruits et des légumes sains et responsables, et l'un des leaders mondiaux dans le secteur des fromages de marque. Notre portefeuille de marques mondiales telles que La Vache qui rit, Kiri, Babybel, Boursin, Nurishh, Pom'Potes et GoGo squeeZ, ainsi qu'une trentaine d'autres marques locales, nous ont permis d'atteindre un chiffre d'affaires de 3,65 milliards d'euros en 2023.

Le groupe emploie plus de dix mille personnes dans près de soixante filiales à travers le monde, qui contribuent à la mise en œuvre de la mission du groupe : proposer une alimentation plus saine et plus responsable pour tous et œuvrer au développement d'un nouveau modèle alimentaire. Les produits Bel sont fabriqués sur 30 sites de production et distribués dans plus de 120 pays.

En 2024, nous avons officiellement adopté le statut d'entreprise à mission, formalisé comme suit : « En permettant l'accès à une alimentation plus saine et plus durable pour tous, nous œuvrons au développement d'un nouveau modèle alimentaire : un modèle respectueux des ressources naturelles de la planète ; un modèle qui bénéficie à l'ensemble de notre écosystème, de l'amont agricole aux consommateurs ; un modèle qui nous permet d'agir pour les générations d'aujourd'hui et celles de demain. »

 

  • Quelles sont les grandes priorités de votre groupe en matière de développement international ?

Nous avons identifié deux zones de croissance prioritaires : les Etats-Unis, qui sont aujourd'hui notre plus grand marché, où la demande de snacks sains est en forte croissance, et l'Asie, où nos produits ont tout pour réussir. En Inde, par exemple, nos produits sains et nutritifs, souvent vendus à la portion, se distinguent par leur accessibilité. Pour accélérer notre croissance dans cette région, nous fabriquons localement depuis 2022, dans le cadre d'une coentreprise avec Britannia, l'un des principaux fabricants indiens de produits alimentaires.

Notre développement passe aussi par le partage de la valeur au sein de l'entreprise, et en particulier avec nos employés. Cette année, en 2024, nous avons lancé un programme d'actionnariat salarié en France, aux États-Unis et au Canada, et bientôt en Chine. Les premières souscriptions ont rencontré un vif succès, ce qui montre que nos salariés sont très favorables à la stratégie du groupe.

  • Quelle est la place de la RSE dans votre groupe ?

Au cours des 20 dernières années, le Groupe Bel a initié une transformation profonde de son modèle économique en plaçant la responsabilité au cœur de son activité. L'une des étapes de cette transformation a été le regroupement des fonctions finance et RSE au sein d'une même direction Impact. La RSE occupe donc une place centrale, au sens propre du terme, puisque le pilotage de l'entreprise et de sa performance repose sur deux jambes, à la fois sur la performance financière et sur la responsabilité sociale et environnementale.

Nous pensons également que notre responsabilité ne s'arrête pas à la porte de l'usine. Notre transformation en matière de RSE vise à impliquer nos différentes parties prenantes, que ce soit en amont avec nos partenaires producteurs de lait ou de fruits, ou avec nos partenaires distributeurs. Nous mesurons et contrôlons nos objectifs de portée 1, 2 et 3, au-delà de nos activités industrielles de base.

  • Vous avez mentionné l'importance de faire de petits pas pour faire de grands paris. Pouvez-vous nous donner quelques exemples concrets des « grands paris » que Bel a faits dans le domaine de la RSE ?

Nous sommes la première génération de dirigeants à le savoir, avec le devoir de prendre résolument les décisions nécessaires pour changer d'échelle et agir vite.

Le Groupe Bel est une entreprise agroalimentaire, et à ce titre, l'essentiel de notre impact est lié à l'impact de la production agricole, qu'il s'agisse du lait (près de 70% de notre empreinte carbone) ou, dans une moindre mesure, des fruits. Notre défi est donc double : d'une part, faire évoluer les habitudes alimentaires vers des produits à plus faible impact carbone, et d'autre part, faire évoluer le modèle agricole vers des pratiques plus respectueuses de la nature, du climat et du vivant.

Au niveau du Groupe, nous avons mené la première révolution d'un acteur jusqu'alors positionné sur les portions laitières et le fromage, en choisissant de rééquilibrer notre portefeuille vers des produits plus végétaux. L'acquisition de MOM en 2016 - et notamment de ses portions de fruits à marque Pom'Potes et Materne - est un tournant majeur dans l'histoire du Groupe et de son développement responsable. Ce rééquilibrage du portefeuille nous permettra d'avoir un impact encore plus important sur les habitudes alimentaires, en favorisant l'accès à un snacking sain et plus végétal.

Parallèlement, nous travaillons main dans la main avec nos partenaires agricoles pour encourager le développement de pratiques agricoles durables, ce qui implique de faire évoluer notre modèle agricole vers une agriculture régénératrice. L'agriculture régénératrice consiste non seulement à préserver, mais aussi à améliorer la santé des sols et leur capacité à accueillir la biodiversité, à réguler les ressources en eau et à capter le carbone.

Pour mener à bien cette transition, le groupe travaille en étroite collaboration avec les producteurs laitiers, les pomiculteurs et l'ensemble de l'écosystème dans le cadre d'une Alliance pour l'agriculture régénératrice, afin de s'assurer que ces pratiques deviennent la norme.

La mesure de notre impact n'est pas un simple outil de reporting, c'est un véritable outil de pilotage de l'entreprise et de nos projets d'investissement.

  • Quelles sont vos priorités en matière de RSE ?

Nous adoptons une approche holistique des défis de la responsabilité sociale et environnementale, c'est-à-dire que nous concevons nos actions de manière à ce qu'elles aient un impact tangible sur la réduction des émissions de carbone, la préservation de la biodiversité, la protection du cycle de l'eau, des ressources naturelles et des êtres humains.

Nos priorités sont de consommer les ressources dont nous avons besoin, en particulier l'eau, de réduire notre empreinte, notamment pour les produits laitiers, de produire de la manière la plus durable possible dans nos usines et, enfin, de donner à chaque consommateur la possibilité de réduire l'impact de son alimentation en lui proposant des produits sains et de plus en plus responsables. A terme, notre objectif est de développer un portefeuille 50/50 de produits laitiers et de fruits.

  • Comment l'adoption d'une vision à long terme de votre impact a-t-elle influencé vos décisions ?

L'adoption d'une vision à long terme a modifié la nature de nos interactions avec nos parties prenantes, tant internes qu'externes. Par exemple, notre relation et notre partenariat avec les agriculteurs qui nous fournissent le lait nécessaire à la fabrication de nos fromages ont radicalement changé il y a 8 ans. Avant même Egalim, le Groupe Bel a initié une démarche de co-construction du prix du lait, fixé annuellement, avec ses agriculteurs partenaires.

L'objectif de cet accord est d'assurer une plus juste rémunération des producteurs de lait, qui doivent pouvoir vivre de leur travail (responsabilité sociale), mais aussi de leur donner de la visibilité sur leur capacité à investir dans la transition écologique de leurs exploitations (responsabilité environnementale). En 2 ans, grâce à un système de primes encourageant la mise en place de pratiques durables, 100% de nos partenaires éleveurs laitiers ont adopté une alimentation des vaches 100% sans OGM et mis en place un pâturage minimum de 150 jours par an.

La vision à long terme est aussi celle qui nous permet de nous projeter dans des investissements dont la période de retour sur investissement est plus longue. Il y a quelques années, nous avons décidé d'installer une chaudière à biomasse dans notre usine d'Evron, en remplacement de la chaudière à gaz qui assurait les besoins énergétiques de l'usine depuis sa création. Au moment de cette décision, le projet était certes bénéfique d'un point de vue environnemental, mais avec un retour sur investissement qui se comptait en décennies (17 ans). Ce projet a également été rendu possible par notre modèle familial et nos actionnaires familiaux, qui étaient convaincus de l'importance de décarboner notre production pour assurer la pérennité de notre entreprise. Et la guerre en Ukraine a montré à quel point ce choix est stratégique.

  • Comment intégrez-vous la RSE dans l'évaluation de votre performance globale ?

Nous avons développé un indice d'impact positif à l'échelle du groupe pour refléter notre engagement et évaluer notre performance RSE sur la base de critères définis et intégrés à notre mission : notre empreinte environnementale, l'engagement de nos collaborateurs, notre capacité à proposer des produits pour tous, la mise en œuvre de pratiques agricoles régénératrices, l'engagement de nos clients. La mesure de notre impact n'est pas un simple outil de reporting, c'est un véritable outil de pilotage de l'entreprise et de nos projets d'investissement. Nos décisions et notre fonctionnement quotidien intègrent cette nouvelle compréhension de notre impact, à tous les niveaux de l'entreprise, c'est pourquoi, de manière cohérente, les primes de tous nos salariés intègrent également des critères RSE.

  • Quelles sont les principales difficultés que vous rencontrez pour accélérer vos efforts dans ces domaines ?

Les deux principaux défis seront notre capacité à agir collectivement sur un modèle économique viable pour tous, de l'amont à l'aval, et à continuer à défendre la valeur d'une alimentation saine et responsable auprès des citoyens. Nous devons être en mesure de nourrir 10 milliards de personnes d'ici 2050. Le changement d'échelle et la rapidité avec laquelle nous évoluerons vers une industrie agroalimentaire responsable seront déterminants.

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