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Par Carenews INFO - Publié le 21 janvier 2025 - 14:12 - Mise à jour le 23 janvier 2025 - 17:46
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L’ONG Oxfam dénonce le rôle du colonialisme dans la formation des inégalités

Dans un rapport publié le 20 janvier intitulé « L’art de prendre sans entreprendre », l’ONG pointe le rôle de l’héritage, des « liens de connivence », des situations de monopole et du colonialisme dans la formation des inégalités entre les personnes, mais aussi entre les pays du Nord et ceux du Sud.

Oxfam est une ONG de lutte contre les inégalités et la pauvreté. Crédits : Carenews.
Oxfam est une ONG de lutte contre les inégalités et la pauvreté. Crédits : Carenews.

 

Dans le monde, la fortune des milliardaires a augmenté trois fois plus vite en 2024 qu’en 2023, selon les calculs d’Oxfam, rendus publics dans un rapport publié le 20 janvier. En tout, cette augmentation s’élève à 2 000 milliards de dollars. L’ONG internationale met ces chiffres en parallèle avec le nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté dans le monde : elles sont 3,6 milliards, soit 44 % de l’humanité.  

Avec ce rapport intitulé « L’art de prendre sans entreprendre », Oxfam souhaite en particulier montrer que la richesse des milliardaires dans le monde est acquise plutôt que méritée. 60 % de leur fortune provient d'héritages, de liens de connivences et de corruption ou de situations de monopole, calcule-t-elle.  

 

Infographie présentant les calculs et chiffres rassemblés par Oxfam. Crédits : Carenews.
Infographie présentant les calculs et chiffres rassemblés par Oxfam. Crédits : Carenews.

Un potentiel « transfert intergénérationnel de richesse sans précédent » 

 

Elle met d’abord en avant le rôle de l’héritage dans cette « extrême-richesse ». D’après ses calculs, 36 % de la fortune des milliardaires est héritée. Les personnes devenues milliardaires en 2023 « sont plus nombreuses à devoir ce statut à des héritages » qu’à l’entrepreneuriat.  

« Sans garde-fous, nous pourrions être témoins d’un transfert intergénérationnel de richesse sans précédent », prévient l’ONG. Elle ajoute que la fortune issue de l’héritage n’est en majorité pas imposée, puisque les deux tiers des pays « ne soumettent les descendants directs à aucun impôt sur les successions ».  

 

Le rôle du « pouvoir monopolistique » 

 

De surcroît, 6 % de la fortune des milliardaires dans le monde provient de « liens de connivence », fustige Oxfam. Il s’agit de l’usage « de leur influence personnelle pour accaparer le pouvoir de l’État au service de leurs propres intérêts privés », de manière légale ou illégale. L’ONG inclut également dans ces liens « le lobbying, le financement de campagnes politiques et le pantouflage entre le secteur privé et la fonction publique », mais aussi le financement privé des médias. 

Autre source de richesse et d’inégalités, selon l’ONG : le « pouvoir monopolistique », permettant de « contrôler les marchés, dicter les règles du jeu commercial et les conditions d’échange avec les autres entreprises et avec la main-d’œuvre, et fixer des prix plus élevés sans perte d’activité ». Jeff Bezos possède Amazon, entreprise qui concentre « 70 % ou plus » du marché des achats en ligne dans plusieurs pays européens comme la France ou le Royaume-Uni, illustrent les auteurs. 18 % de la fortune des milliardaires provient de monopoles, évalue Oxfam.  

 

Le rôle du colonialisme dans la formation des inégalités mondiales 

 

Deuxième facette de la « polarisation des richesses », à ses yeux : le colonialisme. « Il est impossible de comprendre pleinement la nature de la crise des inégalités actuelle sans appréhender le lourd héritage de notre passé colonial et la manière dont il continue de peser sur notre présent », avancent les auteurs. 68 % des milliardaires vivent dans les pays du Nord, qui contrôlent 69 % des richesses mondiales.   

Pour Oxfam, le colonialisme « est un phénomène à la fois historique et contemporain ». Historique, d’abord, parce qu’il désigne une période d’occupation de territoires par les pays riches, avec pour conséquences des « inégalités extrêmes » et des crimes « d’une violence et d’une ampleur terribles ». La colonisation a permis aux plus riches d’accumuler des richesses dans les pays du Nord, détaillent les auteurs.  

 

Le rôle des institutions internationales dans la persistance des inégalités 

 

Pour Oxfam, le colonialisme est aussi moderne : « les pays riches du Nord continuent d’exercer un pouvoir et un contrôle sur les pays du Sud, de manière à perpétuer les effets du colonialisme formel, ainsi que les pratiques et idéologies qui l'étayent ».  

L’ONG insiste sur le rôle des institutions internationales dans la persistance des inégalités.  Les pays du G7 disposent de 41 % des voix au Fonds monétaire international (FMI) et à la Banque mondiale ; ils représentent pourtant moins de 10 % de la population mondiale. Le FMI « conditionne souvent l'octroi d'un nouveau prêt à la mise en place de politiques de type privatisation, libéralisation du commerce et réduction des déficits publics » au détriment des politiques d'accès à l’éducation ou à la santé, dénonce l’ONG. Les gouvernements des pays du Sud ont payé 3 300 milliards de dollars d'intérêts à « leurs créanciers des pays du Nord » entre 1970 et 2023.  

 

Des propositions pour réduire les inégalités dans le monde 

 

Les multinationales « exploitent la main-d’œuvre dans les pays du Sud » dans de mauvaises conditions de travail, avec un salaire 87 à 95 % plus bas que dans les pays du Nord, continue Oxfam. « Les chaînes d’approvisionnement internationales et les industries de la transformation et de l’exportation fonctionnent selon un système qui s’apparente à un colonialisme moderne », fustige-t-elle.  

L’ONG effectue un certain nombre de propositions destinées à réaliser « des changements systémiques significatifs » comme la taxation des personnes et des entreprises les plus riches, la réparation des victimes de la colonisation et la formulation d’excuses par les gouvernements des pays anciennement colonisateurs, ou la transformation de la gouvernance du FMI, de la Banque mondiale ou de l’ONU.  

 


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Célia Szymczak 

 

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