Le plan « Mieux manger pour tous » répondra-t-il à la précarité alimentaire ?
Les contours du plan « Mieux manger pour tous » ont été dévoilés jeudi dernier par Jean-Christophe Combe, ministre des Solidarités, lors d’un déplacement à Montreuil, en région parisienne. Doté du fonds de 60 millions d’euros annoncé par la Première ministre en novembre dernier, il doit répondre aux difficultés d’accès à une alimentation durable pour toutes et tous.
Annoncé il y a trois mois par Élisabeth Borne, le fonds de 60 millions pour une aide alimentation durable est devenu le plan « Mieux manger pour tous ». Il représentera près de 40 millions d’euros au niveau national pour 18 associations habilitées « aide alimentaire » et sera uniquement destiné à l’achat de denrées alimentaires. Les autres 20 millions iront aux organisations locales. Les associations pourront s’approvisionner en denrées alimentaires « plus écologiques et plus saines » peut-on lire dans le communiqué du ministère.
Issu d’un long processus de concertation entre les pouvoirs publics et les associations de terrain, ce plan vise à permettre aux associations d’acheter des produits frais (fruits, légumes, légumineuses et produits non transformés) sous des labels de qualité tels que définis dans la loi EGalim issue des États généraux de l'alimentation en 2018 (labels bio, AOP, AOC, IGP, Label rouge, Pêche durable).
« À l’horizon de la fin du quinquennat, nous souhaitons que les approvisionnements de l’ensemble des réseaux d’aide alimentaire soient conformes aux recommandations du Programme national nutrition santé (PNNS), notamment concernant les 5 fruits et légumes par jour », indique le ministère.
Les associations plutôt satisfaites
C'est la confirmation d’un travail mené au sein de l’État, notamment par l’IGAS (Inspection générale des affaires sociales), qui a fourni un rapport important fin 2018. Les conclusions étaient d’ailleurs sans appel : l’aide alimentaire n’était pas satisfaisante et « l'État est un payeur aveugle de cette aide », nous rappelle Julien Adda, directeur du Réseau Cocagne.
Les impacts du plan vont-ils pouvoir répondre aux besoins observés sur le terrain ? C’est ce qu’espère le directeur du réseau d’une centaine d’associations qui ont pour activité principale, le maraîchage en insertion.
« Nous allons nous appuyer sur ce plan pour tripler notre offre de paniers solidaires de légumes bio, fabriqués dans nos chantiers d’insertion et proposés à des personnes en situation de précarité alimentaire », détaille Julien Adda.
L’association Réseau Cocagne est une des 18 associations d’aide alimentaire bénéficiaires du plan. « Nous nous préparons depuis plusieurs mois au niveau de la mise en culture dans nos jardins bio pour accompagner la production des paniers solidaires. Sur 100 jardins, nous en avons 70 qui entrent dans cette démarche de triplement des paniers. En 2022, avec des financements compliqués, nous avions produit 120 000 paniers », indique-t-il.
Au-delà des répercussions directes sur la production des paniers, Julien Adda est assez satisfait. « Toutes les dimensions de notre projet sont remplies : produire des paniers bio, en chantier d’insertion, déployer des partenariats locaux avec des associations qui vont nous aider et voir arriver de nouvelles personnes adhérentes de nos jardins », souligne-t-il. Autre satisfaction, le fait de croire à l’action publique. « Il est possible de fabriquer de l'intérêt général, en toute confiance, entre acteurs associatifs et l’État, c’est important ! »
Un plan malgré tout insuffisant
Boris Tavernier, délégué général de l’association VRAC (Vers un Réseau d'Achat Commun), quant à lui, n’y trouve pas son compte. « À l’origine, ce fonds devait être teinté de transition écologique et devait concerner l'alimentation durable. Il est finalement adressé aux produits frais et locaux, sans garantie de qualité. Je pense que les 60 millions ne sont pas suffisants au vu de l’urgence sociale et environnementale actuelle », nous précise-t-il.
L’urgence serait d’orienter les montants vers une agriculture durable et soutenir les alternatives pour qu’elles ne soient plus considérées comme telles. « Ce fonds va toucher les 4 millions de personnes qui sont à l'aide alimentaire, mais pas les 10 millions qui sont en précarité alimentaire », avance-t-il.
La rédaction