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Par Carenews PRO - Publié le 13 février 2024 - 16:21 - Mise à jour le 13 février 2024 - 17:25 - Ecrit par : Théo Nepipvoda
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Le secteur de la santé en fait-il suffisamment pour limiter son impact environnemental ?

Le premier sommet de l’engagement se tenait le 8 février à l’OCDE à Paris. Une table ronde a réuni des représentants de l’industrie pharmaceutique pour réfléchir à leur action en matière d’environnement.

La première édition du sommet de l'engagement. Crédit : Théo Nepipvoda.
La première édition du sommet de l'engagement. Crédit : Théo Nepipvoda.

 

Le secteur de la santé s’est-il suffisamment saisi des enjeux environnementaux ? C’est à cette question qu’ont tenté de répondre les participants à une table ronde organisée lors de la première édition du sommet de l’engagement. Cet événement s’est déroulé le 8 février à l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) à Paris.

Il a réuni des représentants politiques, d’associations, chefs d’entreprises, pour « fédérer tous les acteurs du changement dans un nouveau pacte de confiance puissant entre l’entreprise, la société et les pouvoirs publics », selon les organisateurs.

La table ronde consacrée à la santé a donné la parole à des représentants de plusieurs grandes entreprises du secteur, qui ont évoqué leurs engagements en matière d’environnement. 

 

La santé émet du CO2

 

Il faut dire que le secteur de la santé a du chemin à faire puisqu’il produirait 49 millions de tonnes d’équivalent CO2, soit près de 8 % des émissions de la France, selon un rapport de The Shift Project, un think-tank spécialisé. Selon cette même étude, un tiers des émissions de la santé provient de l’achat des médicaments, 21 % de l’achat de dispositifs médicaux. 

Le groupe pharmaceutique suédo-britannique AstraZeneca, par exemple, s’est engagé dans un plan de réduction de ses émissions carbone. L'objectif est de parvenir à une réduction de 50 % en 2030 et de 90 % en 2045 des émissions sur l’ensemble de la chaîne de valeur. 

Il y a un lien très fort entre l’environnement et la santé."

« Il y a un lien très fort entre l’environnement et la santé », explique Emmanuel de Gabory, directeur de la business unit respiratoire et immunologie chez AstraZeneca France. « Par exemple, les températures extrêmes, la pollution de l’air ou encore la sécheresse entraînent une augmentation très forte des maladies respiratoires dans le monde en touchant particulièrement les personnes les plus vulnérables. »

L’usine française du groupe, installée à Dunkerque (Nord), est spécialisée dans la production de produits inhalés. Ces médicaments contiennent un gaz propulseur très émetteur en CO2 : « Nous développons un nouveau type de produit qui utiliserait un gaz moins émetteur. Des études cliniques sont réalisées et on parle potentiellement d’une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 99,5 % par rapport à ce qui existe », se réjouit Emmanuel de Gabory.

 

Un secteur particulièrement régulé

 

Toutes les entreprises de la santé n’ont pas engagé un tel changement. Un accord de branche a été signé en novembre en matière de transition écologique obligeant  les entreprises à réaliser un bilan carbone et fixant des objectifs de réduction d’émissions carbone. Selon le document consulté par l’AFP, 60 % des entreprises n’auraient pas encore initié ce travail.

Le secteur pharmaceutique est très régulé. Il y a des barrières au changement importantes."

« Le secteur pharmaceutique est très régulé. Il y a des barrières au changement importantes », justifie Renaud Sermondade, président d’Aptar Pharma division injectable. L’entreprise est spécialisée dans la fabrication de mécanismes d’administration et notamment d’inhalateurs. Elle fournit de nombreuses entreprises pharmaceutiques. : « Quand les laboratoires veulent travailler sur leur empreinte, ils se tournent vers les fournisseurs. Il y a donc là un enjeu de travailler en filière », considère Renaud Sermondade. Selon lui, 80 % de l’empreinte carbone du médicament provient du dispositif d’administration.

Aptar Pharma travaille notamment pour remplacer le plastique actuel par du plastique recyclable ou recyclé. Même s’il s’agit d’une avancée, la solution qui représente le recyclage n’est pas sans limites. Selon l’OCDE, la part des déchets plastiques qui sont effectivement recyclés devrait représenter 17 % du total en 2060 contre 9 % en 2019, soit une part très insuffisante face à l’urgence environnementale. Par ailleurs, comme le soulignent régulièrement les acteurs environnementaux, le réemploi est largement préférable à la solution du recyclage. Or il est peu développé dans la santé. 

 

La relocalisation, une partie de la solution 

 

L’une des solutions à mettre en œuvre est la relocalisation de la production dans l’Hexagone pour éviter les émissions liées aux transports : 

 Pendant le Covid, nous nous sommes rendu compte que la souveraineté dans le domaine de la santé était quelque chose de très important. La France a toute sa place à jouer sur des médicaments qui ont un impact réduit sur l’environnement grâce à une production plus proche », considère Renaud Sermondade. 

La relocalisation est un chantier de longue haleine qui s’étalera sur plusieurs décennies. En juin 2023, le gouvernement a d’ailleurs présenté un plan de relocalisation de la production de produits de santé sur le territoire français, non pas pour des raisons écologiques, mais de sécurisation de l’approvisionnement.

 

Trouver des substituts aux emballages plastiques

 

Biocodex, entreprise pharmaceutique française, a mis en place plusieurs mesures pour réduire son impact sur l’environnement. Elle s’apprête à lancer une nouvelle version d’un produit d’hygiène féminine : « Il va substituer à de l’eau une version à reconstituer », explique Nicolas Coudurier, directeur général de Biocodex. « Cela permettra d’éviter de transporter des millions de litres d’eau. De plus, un flacon d’aluminium sera utilisé pour progresser vers la réduction du plastique. » 

Biocodex souhaite également miser sur le végétal. L'entreprise fait partie du collectif « Pulp in action » qui tente de trouver des solutions d’élimination des emballages plastiques pour les cosmétiques, notamment par la recherche d’un substitut végétal. 

Bien que limitant l’utilisation du pétrole, cette solution n’est pas sans conséquences. Elle demande une quantité très importante en ressources et notamment en terres pour la production agricole. Ressource déjà rare dans certains coins du monde.

 

Comment le secteur doit-il communiquer sur ses engagements ?

 

Frédérique Saas, directrice des affaires corporate en France pour l’entreprise pharmaceutique Bristol myers squibb intervenait également lors de la table ronde. Elle a expliqué que l’entreprise avait diminué son empreinte carbone de 8,2 % entre 2021 et 2022 alors qu’il s’agissait de la période de reprise d’activité post-covid. Elle indique que l’entreprise a notamment joué sur le scope 3, c’est-à-dire ses émissions indirectes en amont et en aval de la chaîne de valeur de l’entreprise.


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Enfin, la table ronde a soulevé l’enjeux de la communication en matière d’engagement : « Les entreprises du médicament ont toujours eu des difficultés à communiquer sur ce qu’elles font concernant le social et l'environnemental », considère Patrice Carayon, président de Chiesi France. Il s’agit d’un groupe biopharmaceutique italien spécialisé notamment dans les solutions pour les maladies respiratoires et les traitements pour les maladies rares. En 2021, l’entreprise est devenue le premier laboratoire pharmaceutique en France à obtenir le statut d’entreprise à mission, créé en 2019 par la loi Pacte : « Il s’agit d’une bonne façon de dire ce que nous faisons en matière environnementale », considère-t-il.

Pas évoqué durant la table ronde : le gaspillage important des médicaments et le travail sur sa réduction. Une étude de l’OCDE montrait que 17 600 tonnes de médicaments auraient été jetés en 2018 en France.

 

Théo Nepipvoda 

 

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