Un si grand soleil : pourquoi la série est-elle devenue un modèle de production écologique ?
La série diffusée sur France 2 du lundi au vendredi fait partie des premières productions à obtenir le label Ecoprod. Ce dernier est décerné à des productions ayant mis en place une démarche écologique.
En matière d’écologie, le secteur de l’audiovisuel réalise progressivement et lentement sa mue. Certaines productions, pionnières en la matière, se sont lancées dans une réflexion autour de leur impact sur l’environnement.
Mi-septembre, le label Ecoprod, créé par l’association éponyme et présenté en décembre 2022, a annoncé les noms des douze premières productions labellisées pour leur engagement environnemental. Parmi elles, la série à succès Un si grand soleil, diffusée à 20h45 en semaine sur France 2 et tournée à Vendargues, pas loin de Montpellier.
Une réflexion sur le maquillage et la décoration
Produite par France.tv studio, la série a déjà instauré un certain nombre de mesures pour rendre le tournage plus vert : « Nous essayons d’agir à chaque poste, du maquillage à la décoration. Nous accompagnons les personnes dans leur travail pour voir comment leurs achats peuvent contribuer à la diminution de l’impact de la série », explique Laura Gerardin, responsable prévention, sécurité et environnement à France.tv studio pour la série.
Côté coiffure et maquillage, la série se tourne vers des fournisseurs labellisés bio ou Ecocert : « Aujourd’hui, nous achetons 80 % de produits labellisés. C’est une belle réussite », se réjouit Laura Gerardin. Une réflexion est également menée pour habiller les acteurs avec des vêtements issus de la mode durable, mais « cela peut être une contrainte, car les produits sont souvent plus chers », tempère la responsable environnement de la série.
Comment réduire l’impact de l’alimentation ?
Autre point sur lequel la production s’est engagée, la restauration : « En réalisant notre bilan carbone, nous nous sommes aperçus que l’alimentation était un poste important d’émissions de CO2. C’est sur ce point qu’il faut agir principalement », justifie Laura Gerardin. Un repas végétarien est programmé chaque semaine pour les personnes travaillant sur place, la viande rouge est proposée une seule fois par semaine.
Comment les musées prennent-ils le virage écologique ?
Les déplacements représentent également un poste d’émissions important, même si la production travaille à 80 % avec des intermittents du spectacle habitant la région. « On devrait bientôt mettre en place des navettes électriques pour faire venir les gens, car nous sommes implantés dans une zone commerciale à dix kilomètres de Montpellier, pas bien reliée à la ville », se projette la jeune femme. Un travail est aussi mené en ce moment pour remplacer l’ensemble des véhicules thermiques utilisés pour le tournage par des hybrides. La production souhaite progressivement se tourner vers le tout électrique. Les voitures sont notamment utilisées pour la partie du tournage hors des studios.
Faire participer 2 500 intermittents au projet écologique
Engager une telle production dans une trajectoire écologique, un travail de titan ? Il faut dire que le tournage héraultais est un colosse. 260 jours de production avec plus de 2 500 intermittents chaque année. Chaque jour, ce sont 250 personnes qui travaillent dans cette fourmilière de 16 000 mètres carrés.
Vu la taille de l’enjeu, le nouveau label Ecoprod a été accueilli les bras ouverts par Laura Gerardin : « c’est un outil intéressant qui permet de nous structurer dans notre travail et notre démarche et aussi d’impliquer le maximum de personnes », considère-t-elle.
Un référentiel avec 80 actions à mener
Transition écologique : quel est le niveau de sensibilisation du secteur culturel ?
Ce label, présenté en 2022 lors des Assises de l’éco-production, est basé sur un référentiel listant 80 actions à mettre en place pour réduire l’impact environnemental de la production. Ces actions sont divisées en dix postes dont font partie les déplacements, la régie, la post-production ou encore les décors. Pour être éligible au label, il faut obtenir un score supérieur à 65 % et valider huit critères obligatoires. Des justificatifs sont demandés pour venir appuyer les réponses. AFNOR Certification est chargée d’auditer les candidats.
« L’objectif de ce référentiel est de pousser la transition environnementale du secteur en permettant à toute personne de structurer et de valoriser sa démarche », explique Pervenche Beurier, déléguée générale de l’association fondée en 2009 pour accompagner la transition environnementale de l’audiovisuel. « Comme toute les autres, l’industrie audiovisuelle est en retard par rapport à l’urgence environnementale et climatique. Cependant, les choses se structurent, il y a une volonté appuyée des instances », continue-t-elle.
Elle espère que l’exemple d’Un si grand soleil fera tache d’huile et montrera que l’éco-conception est adaptée à tous les types de tournages.
Diffuser la bonne parole à travers les épisodes
Un des postes d’action du label porte sur l’éditorial, c'est-à-dire les messages diffusés par l’émission à son public. « Très régulièrement dans Un si grand soleil, des arcs narratifs traitent de ces sujets. Il y a quelque temps, on a eu l’histoire d’un agriculteur qui enfouissait des produits toxiques dans les champs », se souvient Laura Gerardin. « Il y a également un comédien récurrent très engagé, qui a créé son association de permaculture ».
La production a en revanche conscience que l’ensemble des mesures mises en place est le début d’une longue route sinueuse : « Nous sommes dans une démarche d’amélioration continue, nous souhaitons aller toujours plus loin », lance Laura Gerardin.
Théo Nepipvoda