Zones à faibles émissions : concilier transition écologique et justice sociale, un défi difficile à relever
Dans un rapport publié le 10 juillet, l’association France urbaine effectue 25 propositions destinées à rendre plus acceptables socialement les zones à faibles émissions. Un défi, alors que celles-ci ont souvent des conséquences inégalitaires.
Faut-il choisir entre transition écologique et justice sociale ? Le débat sur les zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m, ou ZFE) illustre une fois de plus la difficile conciliation entre ces deux objectifs. Dans les agglomérations de plus de 150 000 habitants concernées par des dépassements de seuils de pollution, les véhicules les plus polluants doivent être interdits d’ici 2025. Une mesure écologique, mais aussi sanitaire. Chaque année, la pollution de l’air extérieur cause 48 000 décès prématurés par an, selon Santé publique France.
Problème : cette politique publique pourrait renforcer les inégalités sociales et territoriales. Selon une enquête publiée par le ministère de la Transition écologique, les ménages modestes possèdent les véhicules les plus polluants. En 2018, 66 % de leurs véhicules ont une vignette Crit’Air 3, au mieux. Ce sont aussi les personnes les moins en mesure de les remplacer. Autre enjeu, les ménages ruraux disposent de moins d’alternatives à la voiture individuelle.
Dans un rapport remis au ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires le 10 juillet, France urbaine effectue 25 propositions « pour allier transition écologique et justice sociale ». Cette association réunissant les grandes villes françaises rappelle « que les ZFE ne seront efficaces que si elles sont socialement justes et acceptées dans les territoires ».
Mesures d’accessibilité et de cohésion sociale
Les premières propositions visent en particulier les ménages modestes. France urbaine souligne que « l’achat d’un véhicule neuf pour les ménages les plus modestes est impossible malgré les aides ». Ainsi, il faut « doubler les aides d’État », y compris celles destinées au report modal. Ces aides devraient aussi permettre d'acheter des véhicules d’occasion. Par ailleurs, la mise en place d’un « guichet unique » permettant de connaître facilement la vingtaine d’aides existantes, la formation des agents et les actions « d’aller-vers » éviteront le non-recours.
Autre mesure : faciliter le « leasing social », cette pratique qui permet de louer des véhicules à tarif très faible lorsque cela s’avère indispensable. De même, l’accès aux prêts à taux zéro doit être renforcé.
Aux yeux de France urbaine, les ménages résidant dans des territoires voisins d’une métropole ayant mis en place une ZFE devraient également avoir accès aux aides.
Afin de susciter l’adhésion de tous les ménages à une mesure pour l’instant impopulaire, France urbaine explique qu’il faut mener « des actions de communication efficaces et de proximité » en rendant compte des progrès constatés.
Un véritable investissement public
Des mesures destinées à soutenir les ménages ne suffisent pas sans transformations structurelles, selon France urbaine. Ainsi, l’association appelle à « financer massivement les mobilités durables ».
Pour favoriser ces dernières, un investissement dans les services express métropolitains et départementaux s’avère indispensable. Un « soutien exceptionnel de l’État » est donc nécessaire pour multiplier les lignes de RER ou de bus express.
De même, les acteurs publics doivent promouvoir le covoiturage, notamment en accélérant le développement des voies dédiées. Pour favoriser le vélo, l’action doit porter sur la sécurisation des voies cyclables, les possibilités de stationnement et de location.
Célia Szymczak