Congrès des maires : les élus locaux en première ligne face au changement climatique
Alors que le Congrès des maires se tient à Paris entre le 20 et le 22 novembre, Carenews s’intéresse au rôle des élus locaux dans la lutte contre le réchauffement climatique.
Face au changement climatique, la réponse doit avoir lieu à diverses échelles. L’échelle internationale avec les Cop, outils permettant aux États de se fixer des objectifs partagés. Mais aussi l’échelle ultra-locale, où la transition écologique prend forme grâce à des politiques ancrées sur les territoires. Or, quand on parle de politique locale, impossible de ne pas évoquer les maires.
Alors qu’ils se réunissent entre le 20 et le 22 novembre à Paris pour le Congrès des maires et présidents d’intercommunalités de France, le cabinet de conseil The Boson Project a publié une étude avec Bouygues Immobilier sur la vision des élus locaux de la ville de demain. Ils ont interrogé 30 élus représentatifs des différentes forces politiques en présence.
Une vague verte en 2020
Lors des élections de 2020, ayant en tête l’ampleur de ces défis, les citoyens de multiples grandes agglomérations ont élu des maires écologistes. Vague verte inédite avec notamment Grégoire Doucet à Lyon, Pierre Hurmic à Bordeaux ou encore Jeanne Barseghian à Strasbourg. Mais aujourd’hui, ce sont tous les maires qui doivent se mettre en ordre de bataille pour répondre à ce grand enjeu du siècle.
L’étude réalisée par The Boson Project note que pour la plupart des maires, l’enjeu environnemental occupe la première place des préoccupations. Ils l’ont tous abordé très tôt lors de l’entretien réalisé, souvent en premier lieu.
Mais alors, de quelle manière les maires peuvent-ils participer à la lutte contre le réchauffement climatique et la dégradation de la biodiversité ? Notamment en limitant l'étalement urbain et la pression de la construction sur la nature. Selon l’étude, ils ont conscience de cette nécessité et la formulent clairement. Ils auront d’ailleurs de moins en moins de marge de manœuvre, puisque la loi Climat et résilience, adoptée en 2021, prévoit la « zéro artificialisation nette » (ZAN) d’ici à 2050, ce qui limitera drastiquement leurs capacités à créer de la ville.
L’écologie s’oppose au social ?
Mais comment arrêter le grignotage des terres alors que le besoin de nouveaux logements n’a jamais été aussi pressant ? L’Union sociale pour l’habitat (USH) évalue ainsi qu’il faudra construire ou mettre sur le marché 518 000 nouveaux logements par an d’ici à 2040, dont 198 000 de logements sociaux.
« Comme je refuse d’opposer la fin du monde et la fin du mois, nous ne pouvons opposer les enjeux d’écologie et de logement. Il faut bien évidemment réussir à concilier les deux », a expliqué la maire écologiste de Nantes, Johanna Rolland à The Boson Project. Apparaissent alors deux solutions : rénover ou densifier. Fini le ou la maire constructeur, bienvenue au maire rénovateur !
Loger sans détruire la nature, voilà un des innombrables défis auxquels les maires vont devoir faire face dans les décennies à venir.
La « votation » d’Anne Hidalgo sur les SUV
Ce défi n’est pas le seul. Autre mission périlleuse : faire évoluer les mobilités. Anne Hidalgo, maire socialiste de Paris, a récemment annoncé l’organisation d’une « votation » en février pour choisir ou non d’augmenter de manière très significative le prix du stationnement pour les véhicules SUV. L’édile a fait de la réduction de la place de la voiture dans la ville, un des éléments centraux de sa politique. À Lyon, un tarif pénalisant pour les véhicules lourds et polluants sera appliqué dès 2024.
Des mesures qui peuvent se heurter au manque d’acceptabilité des habitants. Pour preuve, les zones à faibles émissions (ZFE) mises en place dans certaines agglomérations. Ce dispositif appliqué par les élus locaux, mais rendu obligatoire par le gouvernement, exclut certains vieux véhicules des grandes métropoles. Blocage sur les territoires, le gouvernement a même dû reculer cet été dans un certain nombre de villes, gardant en tête l’épisode des gilets jaunes qui a eu lieu il y a déjà cinq ans.
Le maire se voit donc confier un rôle important en la matière, accentué par la décentralisation croissante à l'œuvre depuis plusieurs décennies.
L’ESS, outil pour les maires face au réchauffement climatique
Face à l’accélération du réchauffement climatique, les maires peuvent même aller plus loin par la promotion de nouveaux modèles économiques. Lyon et sa métropole sont des exemples en la matière. La Gonette est une monnaie locale et citoyenne en circulation depuis 2015 et adoptée par la ville de Lyon en 2021. Elle permet de financer l’économie responsable et la production locale.
Les monnaies locales et complémentaires sont reconnues comme des titres de paiement depuis la loi de 2014 relative à l'économie sociale et solidaire. Elles favorisent la transition écologique des territoires en soutenant la relocalisation de l’économie et les circuits de proximité.
Outre ces monnaies locales, d’autres modèles d’économie sociale et solidaire (ESS) peuvent apparaître comme des solutions pertinentes pour les édiles. Les sociétés coopératives d'intérêt collectif (Scic) sont des coopératives basées sur le modèle du multisociétariat avec différents types d’acteurs regroupés en collèges. Ce modèle permet notamment d’impliquer les collectivités locales qui en ont la capacité et la volonté de devenir sociétaires de ces coopératives impliquées dans des projets d’intérêt collectif, souvent tournés vers les enjeux de transition écologique. Ainsi, les maires peuvent être moteurs dans la transformation écologique des territoires.
Théo Nepipvoda