CSRD et CS3D : accord sur l’affaiblissement des obligations de durabilité des entreprises à l'échelle européenne
Les négociateurs du Parlement européen et du Conseil de l’Union européenne se sont mis d’accord la nuit du 8 décembre sur la réforme de la directive sur les rapports de durabilité des entreprises (CSRD) et de la directive sur le devoir de vigilance des entreprises (CS3D). Cette simplification sera actée si le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne approuvent le texte.
Ce sont deux textes européens majeurs pour la durabilité des entreprises, adoptés en 2022 et 2024, qui devraient être largement simplifiés. La directive sur les rapports de durabilité des entreprises (CSRD) les oblige à rendre compte de leur impact social et environnemental par un reporting. La directive sur le devoir de vigilance des entreprises (CS3D) exige qu'elles identifient, préviennent, réduisent, réparent ou suppriment les impacts de leur activité sur l’environnement et les droits humains sur toute leur chaîne de valeur, c’est-à-dire y compris ceux liés à l’activité de leurs fournisseurs et sous-traitants. Leur réforme est annoncée depuis fin 2024, elle a été lancée par la Commission européenne en février dernier : l’objectif affiché par les institutions européennes est de réduire les coûts et charges administratives auxquelles font face les entreprises, dans le but de favoriser leur compétitivité.
Après un long processus, le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne, représentant les États membres, ont trouvé un accord la nuit du 8 décembre sur le sujet. Il doit désormais être approuvé par les deux institutions européennes.
« Nous ne pouvons que regretter l'affaiblissement de la CSRD [et] de la directive sur le devoir de vigilance, a déclaré Caroline Neyron, la directrice du mouvement d'entreprises « à impact » et « en transition » Impact France. Au moment même où le monde se décarbone et se transforme, le choix politique qui est fait est celui du court terme ».
Une simplification des rapports
Pour la directive sur les rapports de durabilité des entreprises (CSRD), les entreprises concernées seraient celles de plus de 1 000 salariés et 450 millions d’euros de chiffre d'affaires, au lieu de celles de plus de 250 salariés et 50 millions d'euros de chiffre d'affaires. Les petites et moyennes entreprises cotées, qui devaient être concernées, ne le sont plus dans l’accord. Les holdings financières seraient exemptées des obligations. En conséquence de la réforme, 80 % des entreprises initialement concernées ne le seraient plus, a précisé Morten Bødskov, ministre danois de l’industrie, des entreprises et des affaires financières, lors d’une conférence de presse.
Le Conseil et le Parlement se sont également accordés sur une « simplification accrue des obligations de reporting, qui devraient devenir plus quantitatives, tandis que le reporting sectoriel deviendrait facultatif », peut-on lire dans un communiqué de Parlement.
Les entreprises de moins de 1 000 employés, si elles fournissent ou sous-traitent des biens ou des services pour les plus grandes, pourront refuser de rendre compte d'informations auprès d’elles « au-delà de ce qui est prévu par les standards volontaires » destinés aux entreprises non soumises à la CSRD.
Une sanction limitée
Au lieu d’un seuil de 1 000 salariés et 450 millions de chiffre d’affaires dans le texte initial, les entreprises concernées par la directive sur le devoir de vigilance (CS3D) seront celles de plus de 5 000 salariés et plus de 1,5 milliard de chiffre d’affaires. Ces dernières « ont la plus grande influence sur leur chaîne de valeur et sont les mieux équipées pour avoir un impact positif et absorber les coûts et les charges du processus d’évaluation des risques », peut-on lire dans le communiqué du Conseil.
Ces entreprises seraient uniquement contraintes de mener une analyse de leurs impacts négatifs potentiels dans les cas pour lesquels ils « sont les plus susceptibles de se produire », plutôt que de mener une cartographie complète de leur activité et des risques associés. Celle-ci deviendrait donc un « exercice de définition plus général », indique le Conseil.
L'obligation pour les entreprises d’adopter et de mettre en œuvre un plan de transition pour rendre leur modèle d'affaires compatible avec les objectifs de l’accord de Paris sur le climat serait quant à elle supprimée.
De plus, en cas de non-conformité avec la directive, le régime de responsabilité civile harmonisé à l’échelle européenne serait également supprimé. Les pénalités en cas de non-respect des obligations s’élèveraient à 3 % de leur chiffre d’affaires mondial net, au lieu de 5 %. Enfin, la date d’application de la CS3D est décalée d’un an : elle est désormais fixée à 2029 au maximum.
Une clause de revoyure, permettant l’extension des entreprises concernées par la CSRD et la CS3D, est inscrite dans l’accord.
À lire également : Devoir de vigilance : quels effets concrets dans les entreprises ?
Célia Szymczak 