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Par Carenews PRO - Publié le 30 juin 2023 - 14:00 - Mise à jour le 19 juillet 2023 - 09:31
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Transition énergétique, décarbonation, devoir de vigilance… Antoine Sire (BNP Paribas) revient sur les derniers engagements du Groupe

Depuis janvier 2023, BNP Paribas a annoncé ses ambitions en matière de transition énergétique, notamment concernant l'arrêt du financement des projets gaziers et pétroliers. Comment la banque peut-elle atteindre cet objectif ambitieux ? Comment répond-elle aux exigences de la société civile et de la réglementation ? Rencontre avec Antoine Sire, directeur de l’Engagement d’entreprise chez BNP Paribas.

Entretien avec Antoine Sire, directeur de l'engagement de BNP Paribas. Crédit : BNP Paribas
Entretien avec Antoine Sire, directeur de l'engagement de BNP Paribas. Crédit : BNP Paribas

 

 

  • BNP Paribas a annoncé « l'arrêt de tous les financements dédiés au développement de nouveaux champs gaziers et pétroliers ». Comment la banque compte-t-elle honorer ces décisions ambitieuses en termes d’instruments financiers (prêts, émissions d’obligations, etc.) ?

 

BNP Paribas est avant tout un prêteur, sa principale activité est d’octroyer des crédits. Nous regardons la solvabilité d’une entreprise pour savoir si nous lui prêtons ou pas. Pour ajouter des critères environnementaux et sociaux à ces critères financiers, nous transformons rapidement nos circuits de décision. Cela s’applique en priorité au secteur de l’énergie, jugé le plus sensible d’un point de vue climatique.

En janvier 2023, nous nous sommes fixé un objectif de réduction de nos crédits à l’exploration-production pétrolière de 80% d’ici 2030. Compte tenu de l’inertie d’un portefeuille de crédits, l’atteinte de ces objectifs suppose des décisions immédiates. Pour atteindre cet objectif, nous avons notamment annoncé l'arrêt de tout financement dédié au développement de nouveaux champs pétroliers et gaziers. Cette décision concerne naturellement les crédits, mais aussi toute autre forme de financements dédiés aux projets notamment par voie obligataire.

 

 

  • Comment la banque a-t-elle prévu de s’aligner sur la trajectoire de décarbonatation qui s’impose par la réglementation à toutes les grandes entreprises d’ici 2030 ?

 

BNP Paribas est, comme d’autres grandes banques internationales, un financeur historique de la production d’énergie. Il y a une dizaine d’années, environ 90 % de nos financements à la production d’énergie finançaient des projets d’énergie fossile et 10 % finançaient les énergies bas-carbone. Fin décembre 2022, les énergies bas-carbone représentaient près de 60 % de ces financements et atteindront a minima 80 % d’ici 2030, avec un montant d’au moins 40 milliards d’euros.

Le monde est très en retard par rapport aux objectifs d’accélération des énergies renouvelables pour atteindre la neutralité carbone. Notre priorité absolue en matière d’énergie est de financer les projets et les entreprises contribuant à rattraper ce retard.

 

  • Comment BNP Paribas va-t-elle faire pour atteindre cet objectif?

 

Notre priorité est de contribuer très fortement au financement des énergies bas-carbone pour qu’elles se substituent dans l’économie aux énergies fossiles, mais nos objectifs de baisse concernant ces dernières sont tout aussi forts.

Nous avons donc décidé de diviser par cinq d’ici 2030 les crédits octroyés à l'exploration-production pétrolière (production, maintenance, etc.), soit une baisse de 80 % de ces financements, et de baisser de 30 % nos financements à l’exploration-production gazière.

En ce qui concerne le secteur pétrolier, au-delà de l’arrêt des financements dédiés au développement de nouveaux champs pétroliers, nous cessons également les financements consentis aux acteurs non diversifiés de l’exploration-production pétrolière (les indépendants pétroliers) et destinés à soutenir la production pétrolière.

Enfin, en nous appuyant sur la méthodologie PACTA, nous réduisons également la part attribuable à l’exploration-production pétrolière des crédits généralistes accordés aux entreprises du secteur de l’énergie.

 

  • Toutes ces annonces arrivent au moment où la banque est mise en demeure sur le non-respect du devoir de vigilance en matière de protection de l’environnement par des ONG. Quelle influence ont-elles?

 

L’action conjointe des acteurs économiques, des régulateurs et de la société civile permet à la finance durable d’être en progrès constant. Les ONG ciblent les banques qui ont sans doute le plus fort levier d’action sur les enjeux climatiques.

Nous travaillons sur ces sujets depuis plus de dix ans même si les décisions annoncées les 24 janvier et 11 mai 2023 conduisent à une accélération sans précédent.

 

Mais la transformation que nous menons va en réalité beaucoup plus loin que les engagements pris dans le cadre du dialogue avec la société civile. La banque, sans être actionnaire de l’économie, utilise ses capacités de conseil et de financement pour influencer les entreprises en matière de transition énergétique.

 

En 2021, BNP Paribas a créé le Low Carbon Transition Group, une équipe dédiée au financement de la transition écologique des grandes entreprises mondiales et au développement des énergies renouvelables. Son objectif à 2025 est de financer à hauteur de 200 milliards d’euros les transformations industrielles décisives en matière de réduction des émissions de CO2.

 

  • Ces projets (pétroliers et gaziers) existent, car ils sont financés par les banques…

 

Notre rôle de banque est d'orienter les flux financiers vers l’économie de demain, en assurant une transition juste qui prend en compte les besoins des populations, le temps de l’industrie et le rythme défini par les pouvoirs publics et notamment l’Union Européenne dont les politiques de transition sont de plus en plus ambitieuses.

 

Face à ces enjeux, seul un engagement collectif peut être totalement efficace. Lorsque nous cessons de financer tous les nouveaux champs pétroliers et gaziers, d’autres acteurs financiers avec des critères climatiques moins exigeants pourront nous remplacer. Nous espérons donc que d’autres grandes banques s’appliquent des critères restrictifs aussi stricts.

 

 

  • Comment percevez-vous ce sujet - très prégnant en Europe - dans le contexte international, notamment américain ?

 

Aux États-Unis, certains Etats considèrent que la transition écologique n’est pas un sujet. Il existe un clivage fort entre les États côtiers et les autres. Les premiers ont de fortes considérations climatiques, c’est notamment le cas de la Californie où il existe des voies dédiées au covoiturage et aux voitures électriques. Cependant, les Américains ont la capacité de changer très vite leurs habitudes. A l’heure d’aujourd’hui, ils ont décidé d'investir massivement dans les énergies renouvelables avec le dispositif « Inflation Reduction Act ».

 

Des mesures de cette ampleur se font encore attendre en Europe. Le scénario NZE élaboré par l’Agence Internationale de l’Energie met en évidence la nécessité d’une très forte accélération des investissements dans les énergies bas-carbone, indispensable pour permettre le désengagement complet des énergies fossiles et l’atteinte de la neutralité carbone en 2050.

 

Cela sera possible notamment grâce à une forte mobilisation des pouvoirs publics sur ce sujet et à un cadre législatif qui favorise la réalisation de projets renouvelables. Alors que le premier parc éolien en mer en France a été imaginé il y a quinze ans, sa mise en service complète est intervenue en 2022. Chez BNP Paribas, nous sommes déterminés à accompagner massivement les projets d’énergies bas-carbone.

 

 

Christina Diego 

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