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Par Carenews INFO - Publié le 27 janvier 2025 - 10:00 - Mise à jour le 27 janvier 2025 - 10:00 - Ecrit par : Camille Dorival
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Entreprises de l’ESS et entreprises classiques : comment coopérer davantage ?

Comment mieux articuler l’action des entreprises classiques et celle des entreprises de l’économie sociale et solidaire ? Comment favoriser les alliances et les coopérations entre ces différents types d’acteurs ? Il s’agissait de l’un des axes de réflexion des 11e Rencontres du Mont-Blanc, organisées à Genève le 16 janvier.

Table-ronde « Les entreprises de l'ESS et les entreprises classiques peuvent-elles partager les mêmes concepts pour assurer leur développement ? », lors des 11e Rencontres du Mont-Blanc, à Genève. Crédit : Carenews.
Table-ronde « Les entreprises de l'ESS et les entreprises classiques peuvent-elles partager les mêmes concepts pour assurer leur développement ? », lors des 11e Rencontres du Mont-Blanc, à Genève. Crédit : Carenews.

 

 

Comment créer davantage de ponts et de coopérations entre entreprises classiques et entreprises de l’économie sociale et solidaire (ESS) ? Cette question constituait l’un des axes de travail de la 11e édition des Rencontres du Mont-Blanc, organisées au BIT (Bureau international du travail) à Genève, le 16 janvier dernier.

« Nous n’avons pas l’ambition de nous poser en exemple pour le reste de l’économie, mais nous souhaitons essaimer nos bonnes pratiques et travailler avec de plus en plus d’entreprises classiques », estime ainsi Arnaud Breuil, directeur des partenariats chez Upcoop, anciennement Chèque Déjeuner, la plus grande société coopérative de production (Scop) de services de France.

 

Les Rencontres du Mont-Blanc, qu'est-ce que c'est ? 
Organisées depuis 2004, les Rencontres du Mont Blanc sont portées par ESS FI, réseau international de dirigeants et d’acteurs de l’ESS issus de quatre continents (Europe, Afrique, Amérique du Nord et du Sud, Asie). L’objet de ce réseau est de promouvoir l’ESS comme un moyen d’atteindre les ODD (objectifs de développement durable) fixés par les Nations-Unies, et plus généralement comme le fondement possible d’un modèle économique, social et politique « plus transparent, plus durable, en somme plus responsable ».

 

Upcoop, la première « coopérative à mission »

 

Le groupe, qui compte aujourd’hui 3 200 salariés implantés dans 25 pays, a été créé sous forme de Scop dès sa fondation en 1964. « Certes, on dit souvent dans l’ESS que statut n’est pas vertu : ce n’est pas parce qu’on est une Scop qu’on est forcément vertueux. Néanmoins, les statuts de l’ESS, notamment celui de Scop, induisent certaines pratiques qui sont des garde-fous : le partage du pouvoir, avec une gouvernance démocratique, et le partage de la valeur, avec des mises en réserve importantes de nos bénéfices au profit de la coopérative et une redistribution à part égale du reste entre les sociétaires de la Scop », souligne Arnaud Breuil.

Au-delà, Upcoop a toujours été engagée dans une démarche sociétale et environnementale appuyée. « Dès 2015, notamment, nous avons intégré les objectifs de développement durable (ODD) dans la stratégie de l’entreprise », souligne Arnaud Breuil.

Pour aller plus loin, Upcoop a choisi, en 2023, d’adopter la qualité de société à mission, de se doter d’une raison d’être (« Coopérer durablement pour un pouvoir d’achat à utilité sociale et locale ») et d’inscrire dans ses statuts cinq objectifs de mission, qui correspondent aux cinq piliers de responsabilité sociétale de l’entreprise (RSE) de la coopérative : porter les principes démocratiques de l’ESS et la RSE dans la gouvernance ; favoriser l’engagement des salariés grâce à un dialogue social innovant et à des conditions de travail attractives ; conjuguer les offres de soutien au pouvoir d’achat avec l’incitation à la consommation locale et responsable ; placer la solidarité et la proximité au cœur de l’action territoriale ; mieux protéger l’environnement et contribuer à la transition écologique.

« Aujourd’hui, tous les projets que nous menons le sont à l’aune des objectifs que nous nous sommes fixés collectivement, puisque la décision de devenir société à mission a été approuvée par 92 % de nos sociétaires », note Arnaud Breuil.

La cohérence de l’engagement du groupe lui permet aussi de se démarquer de ses concurrents : « de plus en plus d’entreprises classiques choisissent de travailler avec nous et de devenir clients de nos solutions de paiement précisément parce que nous sommes une Scop », estime Arnaud Breuil.

 

La RSE, une opportunité pour construire des alliances

 

Autre exemple, cette fois en Espagne, Abacus est une coopérative créée en 1968, en pleine période franquiste, par des enseignants qui souhaitaient alors résister à la propagande étatique. La coopérative produit des supports pédagogiques pour les enseignants et a créé ce qui est devenu la plus grande librairie de Catalogne.

Face à ce que Victor Meseguer, son directeur général adjoint, appelle la « concurrence déloyale d’Amazon », la coopérative est aujourd’hui incitée à se rapprocher davantage des entreprises classiques, pour mener des projets communs. Ainsi, Abacus a contribué au financement de plusieurs librairies indépendantes en statut classique et non coopératif, « pour que nous soyons plus forts face aux géants, quels que soient nos statuts », explique-t-il.

« Les défis auxquels nous sont confrontés sont beaucoup trop lourds pour ne pas envisager d’alliances, ajoute Victor Meseguer. Si nous n’agissons pas ensemble, nous ne pourrons pas atteindre les ODD. » Or, « la RSE est une vraie opportunité pour construire des alliances avec les entreprises qui veulent travailler avec nous », estime-t-il.

 

L’ESS, un « partenaire naturel » pour Orange

 

Ce que confirme Valérie Tiacoh, directrice Stratégie et innovation sociale chez Orange. Le groupe, qui est présent dans 26 pays, estime que l’ESS est un « partenaire naturel », souligne-t-elle. Ainsi l’un des piliers de sa politique de RSE est de devenir « net zéro carbone », c’est-à-dire d’atteindre la neutralité carbone, d’ici à 2040. Cela implique une réduction de 45 % de ses émissions de gaz à effet de serre (tous scopes confondus) en 2030 par rapport à 2020.

« Pour cela nous travaillons notamment pour développer l’économie circulaire, sur laquelle l’ESS est très présente », explique Valérie Tiacoh. C’est ainsi qu’Orange a choisi de travailler avec Les Ateliers du bocage, entreprise d’insertion et entreprise adaptée membre du mouvement Emmaüs, pour valoriser et reconditionner le matériel numérique usagé récupéré auprès de ses clients.

L’entreprise travaille également avec le groupe associatif SOS, notamment en Afrique, sur des programmes d’inclusion numérique, mais aussi sur un programme de préservation de la mangrove au Cameroun, via l’association Planète urgence.

Orange s’engage par ailleurs via une politique d’achats « solidaires et inclusifs » auprès d’entreprises du handicap. « En France, le montant de ces achats a dépassé les 20 millions d’euros annuels », souligne Valérie Tiacoh.

 

S’appuyer sur l’ESS pour identifier les besoins sociaux

 

Jules Gouhan, qui préside le Réseau ivoirien de l’ESS (RIESS), insiste lui aussi sur la nécessité de travailler davantage avec les entreprises classiques, en s’appuyant sur le développement de la RSE mais aussi de la notion de responsabilité territoriale de l’entreprise (RTE). « Il peut notamment être très utile aux entreprises classiques de s’appuyer sur le savoir-faire des acteurs de l’ESS pour identifier les besoins sociaux, afin d’ajuster leurs offres à ce dont les populations ont vraiment besoin », souligne-t-il.

« La CSRD est une vraie opportunité pour les entreprises de l’ESS, car elles sont les mieux placées pour intervenir sur la dimension de matérialité de l’impact exigée dans le cadre de ce reporting », conclut quant à elle Valérie Tiacoh, ouvrant de belles perspectives à ce mouvement.

 

Camille Dorival 

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