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Par Carenews PRO - Publié le 28 février 2024 - 18:05 - Mise à jour le 29 février 2024 - 10:13 - Ecrit par : Célia Szymczak
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L’adoption du texte européen sur le devoir de vigilance compromise par le rejet des États membres

Une partie des États membres a empêché la validation formelle du texte, défendu par les ONG. Parmi eux : la France, qui aurait sollicité une modification à la dernière minute.

La rapporteure du texte, Lara Wolters, lors d'une conférence de presse faisant suite au rejet du texte par les Etats membres, le 28 février.  Crédits : European Union 2024 - Source : EP, Mathieu CUGNOT.
La rapporteure du texte, Lara Wolters, lors d'une conférence de presse faisant suite au rejet du texte par les Etats membres, le 28 février. Crédits : European Union 2024 - Source : EP, Mathieu CUGNOT.

 

Les États membres de l’Union européenne n’ont pas approuvé à la majorité le texte sur le devoir de vigilance européen, a annoncé la présidence belge du Conseil de l’Union européenne mercredi 28 février. Ils devaient formellement valider cette directive, appelée corporate sustainability due diligence (CSDD), alors qu’un accord sur son contenu avait été trouvé avec le Parlement européen en décembre.

Cette directive, si elle entrait en vigueur, rendrait les entreprises responsables des atteintes aux droits humains et à l’environnement causées par leur activité sur l’ensemble de leur chaîne de valeur. 130 ONG européennes dont Les amis de la Terre Europe, Oxfam, Amnesty international ou Notre affaire à tous déplorent dans une déclaration commune « un revers déplorable pour la responsabilité des entreprises ainsi que la protection des droits humains et de l’environnement dans le monde ». 

 


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Certains États se montrent réticents

Le matin du 28 février, Les Amis de la Terre publient un communiqué alarmant accusant la France de vouloir « faire couler » l’adoption de la directive. En cause : une demande de modification de son périmètre, la veille du vote des États. Le texte actuel vise les entreprises de plus de 500 salariés, et le gouvernement français exigerait de faire remonter ce seuil à 5 000 salariés, soit celui fixé par la loi française sur le devoir de vigilance promulguée en 2017. 14 000 entreprises auraient été exemptées, ce qui correspond à 80 % de celles visées par la proposition actuelle. 

 « Nous n’avons pas reçu de proposition en bonne et due forme. Il s’agit uniquement là de rumeurs », a précisé la rapporteure du texte, la député néerlandaise Lara Wolters appartenant à l’Alliance progressiste des socialistes et démocrates, en conférence de presse le 28 février. Si ces éléments sont exacts, ils « montrent un mépris vis-à-vis du Parlement européen et du processus démocratique », a-t-elle conclu. 

 

Le Medef exprime ses vives préoccupations quant au contenu de la proposition de directive.

Communiqué du Medef, le 9 février.

 

Les doutes émergeaient depuis plusieurs semaines. Le Mouvement des entreprises de France (Medef) avait exprimé le 8 février ses « vives préoccupations quant au contenu de la proposition de directive ». Le syndicat patronal déplorait des « risques juridiques trop importants », estimant qu’« aucune entreprise (...) n’est aujourd’hui réellement en mesure de contrôler l'entièreté de sa chaîne de valeur ». Il fustigeait également une « approche ouvertement répressive », avec des sanctions trop rapides et importantes. « Ce texte entrave sérieusement la compétitivité européenne », peut-on lire dans le communiqué

Les gouvernements allemand et italien ont aussi annoncé leur abstention. Celle de l’Allemagne est notamment liée aux réticences du FDP, l’un des partis de la coalition au pouvoir, et à celles des acteurs économiques. La Finlande ou Malte auraient pu suivre ces positions selon le CCFD-Terre Solidaire

 

L'échéance des élections européennes

En revanche, la coalition européenne de réseaux d’entreprises Business for a better tomorrow, dont fait partie le Mouvement Impact France, avait appelé le 9 février les États membres à ne pas retirer leur soutien au texte. « Les exigences de la CSDD sont appropriées, réalisables et désirables », soutenaient ces entreprises. La directive « n’est pas une menace pour les entreprises européennes, mais une opportunité historique pour construire un schéma économique juste », peut-on lire dans le communiqué. 

L’élargissement au plan européen était l’une des recommandations issues du rapport d’évaluation de la loi française publié en 2020. Un avis politique adopté par la Commission des affaires européennes de l’Assemblée nationale en juin 2023 soutenait « la position ambitieuse du Parlement européen consistant à étendre le champ d’application de la proposition de directive (...) aux entreprises à partir de 250 salariés » et 40 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel. Les députés mettaient en avant la cohérence de ce seuil avec celui de la corporate sustainability reporting directive (CSRD). Cette autre directive européenne impose aux entreprises de rendre compte des effets de leur activité sur l’environnement et les droits humains. 

« Nous devons maintenant voir s’il est possible de prendre en compte les préoccupations avancées par les États membres, en consultation avec le Parlement européen », a déclaré sur X la présidence belge. Le temps presse : le Parlement doit donner son accord formel, comme les États. Les élections européennes auront lieu en juin prochain. 

 

Célia Szymczak 

 

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